TEXTE SOUMIS À LA DÉLIBÉRATION

DU CONSEIL DES MINISTRES

ÉTUDE D'IMPACT

PROJET DE LOI

relatif au développement de l'offre de logements abordables

NOR : TREL2410050L/Bleue-1

6 mai 2024

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION GÉNÉRALE 4

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS 6

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION 9

TABLEAU D'INDICATEURS 11

CHAPITRE IER - DE NOUVEAUX OUTILS POUR LES ÉLUS BÂTISSEURS 15

Article 1er - Permettre la prise en compte du logement locatif intermédiaire dans la loi SRU pour les communes qui s'engagent dans une trajectoire de rattrapage 15

Article 2 - Accorder aux maires les primo-attributions de logements sociaux 39

Article 3 - Permettre une meilleure maitrise du foncier par les communes 52

CHAPITRE II - SIMPLIFIER ET ACCÉLÉRER LES PROCÉDURES 70

Article 4 - Réduire les délais de recours 70

Article 5 - Faciliter la transformation urbaine des zones pavillonnaires et des zones d'activité économique 80

Article 6 - Généraliser le permis d'aménager multisites 97

CHAPITRE III - RENFORCER LES CAPACITÉS DE PRODUCTION DES BAILLEURS 104

Article 7 - Permettre aux bailleurs sociaux de produire davantage de logements locatifs intermédiaires 104

Article 8 - Permettre aux bailleurs sociaux de mieux financer leurs investissements grâce à une politique des loyers optimisée 117

Article 9 - Diversifier les ressources des bailleurs 136

CHAPITRE IV - FACILITER L'ACCÈS AU LOGEMENT 151

Article 10 - Faciliter l'accès au logement social des travailleurs 151

Article 11 - Rendre plus efficace le réexamen de la situation des locataires dans le parc social 160

Article 12 - Inciter à la mobilité par les compléments de loyers 171

Article 13 - Ouvrir le bail mobilité au logement social 183

Article 14 - Encourager la vente directe aux locataires dans le parc social 191

INTRODUCTION GÉNÉRALE

La France connaît depuis 2022, comme les autres pays européens, une crise du logement qui complique l'accès au logement des Français. Les classes moyennes sont, de plus en plus, confrontées à la difficulté de se loger à un coût abordable à proximité de leur lieu de travail, en particulier en zone tendue. Ainsi, un nombre croissant de personnes expriment leur attente d'un logement abordable par une demande de logement social ; plus encore ont probablement renoncé à en faire même la demande, devant les faibles perspectives de voir celle-ci un jour aboutir.

Pourtant, le logement tient une place fondamentale dans la vie de chacun. Il conditionne nos performances économiques ainsi que notre cohésion sociale. Il constitue en particulier une condition essentielle dans l'atteinte des objectifs que nous avons en partage : le plein-emploi, la réindustrialisation du pays, le renforcement des services publics partout sur le territoire et l'augmentation du pouvoir d'achat des classes moyennes.

C'est donc sur chacun de ces objectifs que pèse la crise du logement. Ce constat ne constitue pourtant pas une fatalité. Il est en effet possible de produire plus de logements abordables avec une conviction : c'est l'offre qui doit primer, car lorsqu'elle existe en nombre suffisant, ce sont des prix et des loyers moins chers. Il faut donc produire plus : plus de logements libres, plus de logements intermédiaires, plus de logements sociaux, partout où sont nos besoins et nos emplois. Les catégories de logement ne s'opposent pas entre elles : chacun doit pouvoir trouver un logement en fonction de ses revenus. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement soutient la production de logements abordables, à savoir les logements sociaux et les logements intermédiaires, en complément des travaux en cours pour renforcer l'attractivité de la location longue durée dans le parc privé.

Par chacun de ses quatre chapitres et de ses 14 articles, ce projet de loi entend concrétiser cette ambition.

Son chapitre premier traduit notre conviction qu'il faut faire confiance aux maires pour construire, en leur octroyant des outils nouveaux. Conformément à l'annonce faite par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, le texte offre aux maires deux nouveaux outils pour encourager l'acte de construire : il leur permet d'intégrer le logement intermédiaire à leurs objectifs de construction issus de la loi SRU ; il leur fait confiance en leur accordant la première attribution de tout logement social dont ils ont décidé la construction. Il les arme face au renchérissement du prix du foncier, qui représente 25 à 50 % du prix d'un logement, en élargissant leur droit de préemption, de manière à ce qu'ils puissent contrer les logiques inflationnistes.

Le deuxième chapitre simplifie et accélère les procédures d'urbanisme pour produire plus,

plus vite et mieux. Il réduit les délais de recours gracieux et parallélise les délais de recours gracieux et contentieux, de manière à réduire les délais de recours de deux tiers. Par ailleurs, il dote les élus de de nouveaux instruments pour accompagner et maîtriser la densification pavillonnaire douce. Enfin, il encourage les démarches d'aménagement global en pérennisant et en élargissant la faculté d'obtenir un permis d'aménager qui porte sur plusieurs sites non contigus.

Le troisième chapitre vise à renforcer les capacités d'investissement des bailleurs sociaux, qui sont les principaux producteurs de logements sociaux et intermédiaires. Il prévoit le doublement des capacités de production de logements intermédiaires. Il prévoit une mesure structurelle de renforcement des fonds propres des bailleurs et leur permet de diversifier leurs ressources en investissant des activités de copromotion immobilière ou de cessions de logements neufs libres en complément de leur activité de production de logements sociaux et intermédiaires.

Le quatrième chapitre vise à faciliter l'accès au logement, en location comme en accession. Pour améliorer la mobilité dans le parc social, il augmente et renforce les critères qui justifient la fin du droit au maintien dans les lieux ; il incite à la mobilité par des surloyers plus dynamiques lorsque les revenus augmentent. Ce dernier chapitre entend favoriser la légitime aspiration à la propriété de nombreux locataires en facilitant l'achat de leur logement social.

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS

Article

Objet de l'article

Consultations obligatoires

Consultations facultatives

1er

Permettre la prise en compte du logement locatif intermédiaire dans la loi SRU pour les communes qui s'engagent dans une trajectoire de rattrapage

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

2

Accorder aux maires les primo-attributions de logements sociaux

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

3

Permettre une meilleure maîtrise du foncier par les communes

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

4

Réduire les délais de recours

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

5

Faciliter la transformation urbaine des zones pavillonnaires et des zones d'activité économique

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

6

Généraliser le permis d'aménager multisites

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

7

Permettre aux bailleurs sociaux de produire davantage de logements locatifs intermédiaires

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

8

Permettre aux bailleurs sociaux de mieux financer leurs investissements grâce à une politique des loyers optimisée

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

9

Diversifier les ressources des bailleurs

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

10

Faciliter l'accès au logement social des travailleurs

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

11

Rendre plus efficace le réexamen de la situation des locataires dans le parc social

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

12

Inciter à la mobilité par les compléments de loyers

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

13

Ouvrir le bail mobilité au logement social

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

14

Encourager la vente directe aux locataires dans le parc social

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil national de l'habitat (CNH)

Néant

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION

Article

Objet de l'article

Textes d'application

Administration compétente

1

Permettre la prise en compte du logement locatif intermédiaire dans la loi SRU pour les communes qui s'engagent dans une trajectoire de rattrapage

Décret en Conseil d'Etat

Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages

2

Accorder aux maires les primo-attributions de logements sociaux

Décret en Conseil d'Etat

Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages

3

Permettre une meilleure maîtrise du foncier par les communes

Décret en Conseil d'Etat

Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages

4

Réduire les délais de recours

Néant

Sans objet

5

Faciliter la transformation urbaine des zones pavillonnaires et des zones d'activité économique

Néant

Sans objet

6

Généraliser le permis d'aménager multisites

Néant

Sans objet

7

Permettre aux bailleurs sociaux de produire davantage de logements locatifs intermédiaires

Néant

Sans objet

8

Permettre aux bailleurs sociaux de mieux financer leurs investissements grâce à une politique des loyers optimisée

Néant

Sans objet

9

Diversifier les ressources des bailleurs

Néant

Sans objet

10

Faciliter l'accès au logement social des travailleurs

Néant

Sans objet

11

Rendre plus efficace le réexamen de la situation des locataires dans le parc social

Néant

Sans objet

12

Inciter à la mobilité par les compléments de loyers

Décret en Conseil d'Etat

Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages et direction générale des finances publiques

13

Ouvrir le bail mobilité au logement social

Néant

Sans objet

14

Encourager la vente directe aux locataires dans le parc social

Néant

Sans objet

TABLEAU D'INDICATEURS

Indicateur

Objectif et modalités de l'indicateur

Objectif visé (en valeur et/ou en tendance)

Horizon temporel de l'évaluation (période ou année)

Identification et objectif des dispositions concernées

Nombre de communes ayant intégré dans un contrat de mixité sociale la possibilité d'atteindre une part de leur objectif triennal par la réalisation de logements locatifs intermédiaires

L'indicateur vise à identifier le taux de recours à la possibilité ouverte par la mesure

L'indicateur sera calculé en pourcentage du nombre de communes éligibles à cette intégration

DHUP

33 %

Fin de la période triennale 2023-2025

Article 1

Permettre la prise en compte du logement locatif intermédiaire dans la loi SRU pour les communes qui s'engagent dans une trajectoire de rattrapage

Nombre de délégations du contingent préfectoral accordées au maire pour les primo-attributions

Enquête annuelle auprès des services déconcentrés

En hausse

Annuel

Article 2

Accorder aux maires les primo-attributions de logements sociaux

Date de prononcé de la décision par le tribunal administratif

L'analyse des délais d'intervention de la décision pourra traduire une introduction plus précoce du recours contentieux, en lien avec le raccourcissement du délai d'introduction du recours gracieux et de la suppression de son caractère non suspensif

Tendance baissière

Année 2026

Article 4

Réduire les délais de recours

Nombre de permis d'aménager (PA) multisites délivrés

Appréciation du niveau d'appropriation de cette nouvelle procédure par un suivi du volume de PA multisites délivrés

15 sur les 3 premières années d'utilisation

3 ans révolus après l'entrée en vigueur de la loi

Article 6

Généraliser le permis d'aménager multisites

Nombre de logements intermédiaires produits par les bailleurs sociaux ou leurs filiales

Mesure annuelle de la production de logements locatifs intermédiaires par le secteur HLM

Accroissement de la production de LLI par les bailleurs sociaux de 50% en volume par rapport à 2021 et 2022 soit un objectif d'environ 10 000 logements par an

3 ans (2026)

Article 7

Permettre aux bailleurs sociaux de produire davantage de logements locatifs intermédiaires

Taux de mobilité

L'augmentation de la mobilité dans le parc doit permettre de loger plus efficacement les demandeurs de logements sociaux

L'information figure dans le projet annuel de performance du programme 135

Hausse (1 point de rotation annuel correspond à près de 50 000 attributions supplémentaires soit une hausse des capacités d'attribution annuelles de 12% environ)

Annuel

Article 11

Rendre plus efficace le réexamen de la situation des locataires dans le parc social

Suivi de l'augmentation du nombre de ménages sortant du parc social au titre du SLS et de la détention de patrimoine

Quantifier l'impact des nouvelles conditions d'application des modalités de maintien dans les lieux et évaluer son évolution par rapport aux dispositions antérieures

En hausse

Annuel

Article 12

Inciter à la mobilité par les compléments de loyers

Nombre d'appels à l'API DGFIP

Quantifier l'utilité du recours à la future API

Suivi de la nouvelle disposition de suivi

Annuel

Article 12

Inciter à la mobilité par les compléments de loyers

Nombre de logements sociaux faisant l'objet d'un bail mobilité

Evaluer la montée en charge du dispositif du bail mobilité ouvert par la loi dans le parc social

 

Mesure annuelle

Article 13

Ouvrir le bail mobilité au logement social

Total des ventes de logements sociaux, dont ventes aux occupants

L'indicateur vise à suivre l'évolution des ventes HLM, notamment aux locataires occupants les logements sociaux.

 

Statistique annuelle ANCOLS

Article 14

Encourager la vente directe aux locataires dans le parc social

CHAPITRE IER - DE NOUVEAUX OUTILS POUR LES ÉLUS BÂTISSEURS

Article 1er - Permettre la prise en compte du logement locatif intermédiaire dans la loi SRU pour les communes qui s'engagent dans une trajectoire de rattrapage

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, modifiée, dite « loi SRU », codifié aux articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation, impose aux communes de plus de 3 500 habitants (1 500 dans l'unité urbaine de Paris) comprises dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et/ou une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, une part de logements locatifs sociaux représentant 20 % à 25 % de résidences principales, selon le niveau de tension sur la demande de logement social du territoire. En outre, les communes qui, sans appartenir à un de ces territoires, ont plus de 15 000 habitants, une croissance démographique importante et un niveau de tension sur la demande de logements sociaux significatif doivent atteindre le seuil de 20 %.

Pour l'application du dispositif SRU, sont considérés comme des logements sociaux (IV de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation) :

- Les logements conventionnés APL (aide personnalisée au logement) ou ANAH (agence nationale de l'habitat), avec un loyer plafonné et dont l'accès est soumis à des plafonds de ressources ;

- Certains produits d'accession sociale : les logements financés par un prêt social location-accession (PSLA) et ceux faisant l'objet d'un bail réel solidaire (BRS) ;

- Certains logements spécifiques : intermédiation locative, terrains locatifs familiaux, centres d'hébergement et de réinsertion sociale, centres d'accueil pour demandeurs d'asile, parc historique des bailleurs sociaux, logements des bassins houillers et miniers, logements des anciens supplétifs de l'armée française en Algérie.

Ne sont pas intégrés à cette définition les logements intermédiaires, notamment le logement locatif intermédiaire dit « institutionnel » visé à l'article 279-0 bis A du code général des impôts. Le logement locatif intermédiaire institutionnel correspond à une offre abordable développée par des personnes morales dans les zones tendues, soutenue par un dispositif fiscal créé par l'article 73 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014. Destinés à la location à usage de résidence principale aux ménages de la classe moyenne dont les ressources n'excèdent pas les plafonds du dispositif « Pinel », les logements locatifs intermédiaires sont proposés à des loyers ne dépassant pas les plafonds applicables pour ce même dispositif, soit un niveau intermédiaire entre le parc social et l'offre libre. L'article 21 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a supprimé l'agrément préalable pour ces logements et l'a remplacé par une obligation de déclaration des opérations de logements locatifs intermédiaires applicable aux propriétaires ou gestionnaires, permettant de maintenir un suivi de la production et de contrôler le respect des conditions d'obtention de l'avantage fiscal. Le segment intermédiaire a vocation à se développer essentiellement dans les zones les plus tendues, notamment au sein des métropoles sur le territoire desquelles les classes moyennes rencontrent des difficultés d'accès au logement. Entre 2014 et fin 2022, 89 351 logements locatifs intermédiaires ont été agréés ou déclarés, dont 31 274 sur le territoire de communes déficitaires SRU.

En 2023, parmi les 2 007 communes soumises au dispositif SRU, 1 161 n'atteignent pas le taux cible qui leur est imposé et sont donc considérées comme déficitaires. A ce titre, elles font l'objet d'un prélèvement annuel calculé en fonction de leur nombre de logements sociaux manquants et de leur potentiel fiscal par habitant (article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation).

Par ailleurs, les communes déficitaires se voient affecter un objectif triennal de rattrapage (article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation). Cet objectif, qui allait en augmentant au fur et à mesure des périodes triennales jusqu'à atteindre 50 % pour la période triennale 2020-2022, a été figé pour l'essentiel1(*) à 33 % du déficit par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « 3DS », qui a également pérennisé le dispositif au-delà de son échéance initialement prévue au terme de la période 2023-2025.

Dans une logique de différenciation, les articles 68 et 69 de la loi dite « 3DS » ont mis en place un dispositif de contractualisation entre l'Etat, la commune, l'EPCI et tout acteur susceptible de contribuer à la réalisation des objectifs qu'il porte (établissement public foncier, bailleurs sociaux) : le contrat de mixité sociale (CMS). Cet outil partenarial vise, sur la base d'un constat partagé sur les contraintes pesant sur la collectivité et les leviers dont elle dispose, à constituer un cadre d'engagement et de moyens devant permettre à la commune de sortir à terme de sa situation déficitaire. Le CMS peut, lorsque la situation locale le justifie, emporter un aménagement à la baisse du rythme de rattrapage triennal imposé à la commune (jusqu'à 25 % du déficit). Il peut également conduire, au niveau de l'EPCI, à une mutualisation des objectifs de rattrapage entre les communes déficitaires.

Cet outil est en cours de déploiement : au 1er avril 2024, 224 contrats ont été signés ou sont en cours de signature et 184 supplémentaires devraient l'être d'ici la fin du 1er semestre 2024. Parmi eux, 62 % prévoient un aménagement des objectifs de rattrapage (dont un contrat prévoyant une mutualisation).

A côté de cet objectif quantitatif, les communes déficitaires sont soumises à un objectif qualitatif. Pour favoriser le développement de logements à destination des ménages les plus fragiles, le dispositif SRU impose qu'au moins 30 % du rattrapage de la commune soit réalisé à la faveur de logements financés en prêt locatif aidé d'intégration (PLAI) ou assimilé destinés aux ménages les plus modestes et que la part de logements financés en prêt locatif social (PLS) ou assimilé, ouverts à des ménages pouvant dépasser de 30 % les plafonds de revenus pour l'accès à un logement social de droit commun, ne dépasse pas 30 %2(*) (article L. 302-9-1-2 du code de la construction et de l'habitation).

Au terme de chaque période triennale, les préfets dressent le bilan des réalisations des communes déficitaires et engagent une procédure de carence à l'égard de celles n'ayant pas respecté l'ensemble de leurs objectifs quantitatif et qualitatifs. Après dialogue contradictoire avec la commune et en tenant compte de ses résultats, de ses contraintes et des perspectives de production de logements sociaux sur son territoire, le préfet peut prononcer sa carence (article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation).

La mise en carence d'une commune emporte une série de sanctions à son encontre, notamment :

- La majoration de son prélèvement, dont l'ampleur est décidée par le préfet dans son arrêté prononçant la carence et qui doit être comprise entre un plancher correspondant au niveau de réalisation lors du triennal ayant justifié la carence et un plafond de 400 % ;

- La reprise par l'Etat du droit de préemption urbain ;

- L'instauration d'une servitude de mixité sociale sur l'ensemble du territoire de la commune, au sein de laquelle toute opération de plus de douze logements collectifs ou de plus de 800 m² doit contenir au moins 30 % de logements sociaux, hors PLS ;

- Si le préfet le décide dans son arrêté, une reprise par l'Etat de l'instruction des autorisations d'urbanisme sur des secteurs identifiés.

Au terme du bilan de la période triennale 2020-2022, les préfets ont décidé de prononcer la carence de 341 communes en 2023.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel a jugé à plusieurs reprises que la fixation aux communes d'un taux cible de logements sociaux décliné en objectifs triennaux et le mécanisme de sanction en cas de carence sont conformes à la Constitution (v. not. décisions n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000, n° 2001-452 DC du 6 décembre 2001, n° 2012-660 DC du 17 janvier 2013 et n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017). Selon le Conseil, les articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation, qui visent à mettre en oeuvre l'objectif de mixité sociale et à accroitre la production de logements sociaux, répondent à une fin d'intérêt général et leurs dispositions ne sont pas manifestement inappropriées à l'objectif poursuivi. Le législateur, en imposant de telles contraintes aux communes, n'a pas porté à leur libre administration une atteinte d'une gravité telle qu'elle entrainerait une méconnaissance des articles 72 et 72-2 de la Constitution (v. not. décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017, cons. 39).

A cet égard, le Conseil d'Etat a récemment refusé le renvoi au Conseil constitutionnel d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité au principe de libre administration des collectivités territoriales de l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation, en tant qu'il donne au préfet la compétence pour fixer les objectifs triennaux d'une commune. Relevant que la loi encadre l'ensemble de la procédure - détermination des communes concernées, fixation des objectifs, règles applicables en cas de carence - le Conseil d'Etat a estimé que le grief soulevé par les requérants ne présentait pas de caractère sérieux (CE, 1er décembre 2023, Commune d'Olivet, n° 488444).

A l'inverse, le Conseil constitutionnel a estimé que l'instauration automatique du régime de la carence dès lors qu'une commune n'avait pas atteint ses objectifs triennaux, sans distinguer la nature ou la valeur des raisons à l'origine de ce manquement, constituait une atteinte à l'article 72 de la Constitution (décision n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000). Le dispositif a été jugé conforme après son adaptation par le législateur, qui a prévu que la carence devait résulter d'une appréciation du préfet, au terme d'une procédure contradictoire, fondée sur des critères prévus par la loi lui permettant d'apprécier les raisons pouvant expliquer les manquements constatés (décision n° 2001-452 DC du 6 décembre 2001).

Enfin, il convient de relever que le dispositif SRU, en tant qu'il concourt à l'accroissement de la production de logements sociaux, participe aux politiques publiques visant à offrir la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent, finalité reconnue comme objectif de valeur constitutionnelle par le Conseil constitutionnel (décision n° 94-359 DC du 19 janvier 1995).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Dans le silence des traités et en application du principe de subsidiarité, l'Union européenne n'est pas compétente en matière de politique du logement.

En revanche, le droit à une aide au logement destinée à assurer une existence digne à tous ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes figure à l'article 34 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Par ailleurs, la Cour de justice de l'Union européenne a considéré que les objectifs de mixité sociale et de lutte contre la pénurie de logements destinés à la location pouvaient justifier des restrictions à la libre prestation de services (CJUE, C-724/18, Cali Apartments SCI c/ Ville de Paris, 22 septembre 2020).

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Entendu largement, la part du parc social est de 17 % en France, contre 9 % en Europe. La France compte avec le Royaume-Uni le volume le plus important de logements sociaux (5,3 millions), mais ceux-ci représentent une part plus importante du parc de logements dans certains Etats (38 % au Pays-Bas3(*), 24 % en Autriche, 20 % au Danemark4(*)). A l'inverse, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, le Luxembourg et le Portugal ont une part de logements sociaux inférieure à 5 %5(*).

En France, le parc social a une vocation généraliste : il vise non seulement les ménages les plus défavorisés, exclus du marché du logement, mais aussi ceux qui disposent de ressources modérées (cf. 4.6 : les plafonds de ressources rendent environ 30 % de la population inéligibles au logement social). Dans ce modèle, les revenus constituent un critère d'éligibilité, l'attribution pouvant être réalisée parmi l'ensemble des ménages éligibles. Cette approche diverge de l'approche résiduelle adoptée en Espagne, au Portugal, ou au Royaume-Uni, où l'attribution de logements sociaux n'est réalisée qu'au regard de critères de vulnérabilité et de besoins des ménages. A rebours de ces approches ciblées, certains pays européens (Danemark, Pays-Bas) adoptent une approche universelle du logement social, dont l'accès n'est pas conditionné à un plafond de ressources.

Les niveaux des loyers par rapport au marché privé sont particulièrement hétérogènes en Europe, certains pays ayant une approche du parc social incluant, de fait, une offre intermédiaire : 15 % des prix du marché en Estonie, 40 % au Luxembourg, 64 % en France, 90 % en Autriche6(*).

Au-delà, si des obligations locales peuvent exister à l'étranger, la France est le seul pays européen à avoir instauré un dispositif d'obligation de production de logements sociaux sur les territoires les plus tendus7(*).

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Mis en oeuvre depuis plus de vingt ans, le dispositif SRU demeure un pilier fondamental des politiques du logement et de la mixité sociale portées par le Gouvernement. Les obligations qui y sont associées participent pleinement à l'enjeu de développement d'une offre de logements abordables répartie équitablement sur l'ensemble des territoires où le besoin est avéré. Les communes n'ayant pas atteint leur taux cible de logements sociaux ont ainsi accueilli près de 50% de la production de logements sociaux nationale depuis 2000.

Depuis la création du dispositif, la mise en oeuvre du régime de la carence repose systématiquement sur une analyse approfondie des services de l'Etat, qui s'attachent à examiner le volontarisme et les actions mises en oeuvre par une commune déficitaire pour parvenir à atteindre les niveaux de rattrapage attendus d'elle. Pour tenir compte de la diversité des situations dans lesquelles sont placées les communes concernées, et notamment les éventuelles difficultés qu'elles sont susceptibles de rencontrer, le législateur a renforcé l'adaptabilité du dispositif à la faveur de la loi dite « 3DS », ouvrant la possibilité d'un aménagement de la trajectoire de rattrapage par la voie d'un contrat de mixité sociale.

Pour autant, la décision du préfet de prononcer ou non la carence demeure fondée, en plus des « difficultés rencontrées le cas échéant par la commune » et des « projets de logements sociaux en cours de réalisation » sur son territoire, sur l'« écart entre les objectifs et les réalisations constatées au cours de la période triennale échue »8(*). A cet égard, les efforts consentis en matière de production de logements ne sont pris en compte que lorsqu'ils concernent strictement des produits susceptibles d'entrer dans la part de logements sociaux calculée pour l'application du dispositif.

Si cette situation parait cohérente avec l'idée de résorption d'un déficit en logements sociaux, elle conduit toutefois à nier le rôle moteur qu'a vocation à jouer le logement locatif intermédiaire sur le territoire des communes les plus tendues, tant en matière de développement d'une offre de logements abordables, en particulier pour les classes moyennes, que de garantie de la mixité sociale à toutes les échelles, de celle de la résidence à celle la commune.

En effet, si le logement locatif intermédiaire n'appartient pas au segment du logement social, il constitue toutefois un produit abordable qui participe directement à l'accès au logement des ménages de la classe moyenne, confrontés à des difficultés croissantes de logement. Dans un contexte de crise du logement et au regard des difficultés en matière de financement des opérations dans les zones tendues, la plus grande rentabilité du segment intermédiaire permet de faciliter l'équilibre financier d'opérations mixtes contenant des logements aux loyers très accessibles par une péréquation économique entre les différents produits au sein d'une même opération.

Par ailleurs, le développement du logement locatif intermédiaire contribue à accélérer la mobilité résidentielle en provenance du parc social, favorisant la rotation au sein de ce dernier au profit des ménages qui attendent de pouvoir y accéder. A ce titre, il permet de garantir que l'occupation du parc social au sein de la commune vise effectivement les ménages qui en ont le plus besoin. Au-delà, en tant qu'il vise les classes moyennes, et particulièrement les ménages qui souhaitent se loger à proximité de leur emploi à des prix abordables, le logement locatif intermédiaire participe à la diversification de l'offre de logements dans la commune, et donc à la mixité sociale au sein de celle-ci. Les études menées par les deux principaux opérateurs de ce segment de l'offre, Action Logement et CDC Habitat, confirment la vocation abordable de ce parc qui accueille plus de 50 % de ménages par ailleurs éligibles au logement social réduisant d'autant la pression de la demande sur le parc locatif social9(*). Au sein du parc géré par CDC Habitat, 18 % des ménages du parc locatif intermédiaire sont issus du parc social, confirmant ainsi la contribution du parc intermédiaire au parcours résidentiel des ménages du parc social et à la fluidité du parc social. Déjà appréhendée par le dispositif SRU depuis l'intégration des produits d'accession sociale (BRS et PSLA)10(*), cette approche globale de la mixité sociale appelle une prise en compte du segment intermédiaire.

Une intervention législative paraît ainsi nécessaire pour permettre cette prise en compte. Outre le fait qu'elle permettrait de renforcer le mouvement d'adaptabilité et de différenciation dans l'application du dispositif SRU engagé par la loi dite « 3DS », cette intervention participerait directement aux engagements du Gouvernement en faveur du développement du logement intermédiaire.

En outre, le vecteur législatif doit être retenu au regard de l'article 34 de la Constitution, qui réserve à la loi la détermination des principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le présent article poursuit plusieurs objectifs.

2.2.1. Renforcer l'adaptabilité et l'acceptabilité du dispositif SRU

La prise en compte du logement locatif intermédiaire dans l'effort de rattrapage des communes déficitaires en logements sociaux doit permettre une application plus adaptée du dispositif SRU. Le régime de la carence, en tant qu'il vise à un renforcement des sanctions à l'égard des communes les plus récalcitrantes au développement d'une offre de logements à destination des ménages les plus fragiles sur leur territoire, doit résulter d'une appréhension large des dynamiques à l'oeuvre localement en matière de politique de l'habitat. De ce point de vue, dans certaines communes les plus tendues, la production de logements intermédiaires constitue un complément logique et cohérent aux efforts attendus en matière de développement du parc social. Cette intégration doit donc permettre d'appliquer le dispositif SRU de manière plus cohérente avec les spécificités locales, conformément au mouvement engagé par le législateur à la faveur de la loi « 3DS ».

Cette application adaptée doit également aboutir à une plus grande acceptabilité des obligations imposées aux communes déficitaires. Si la pérennisation du rythme de rattrapage à 33 % du déficit en logements sociaux par période triennale a permis de rendre celles-ci plus réalistes, la mesure envisagée doit permettre d'accompagner au mieux les communes engagées dans un rattrapage cohérent et planifié, sans qu'elles aient à craindre les effets d'une application strictement mécanique du dispositif.

2.2.2. Inciter au développement de l'offre, notamment de logement locatif intermédiaire

La mesure envisagée doit constituer une incitation à la production de logements locatifs intermédiaires sur les territoires où son développement apparait opportun. A cet égard, elle contribue pleinement à la stratégie du Gouvernement en faveur du logement pour les classes moyennes, avec un objectif de doublement de la production de logements intermédiaires d'ici 2026, soit 75 000 logements en trois ans. Elle est complémentaire à d'autres mesures en faveur du logement intermédiaire déjà engagées :

- La mise en place par le groupe Caisse des dépôts et consignations et le groupe Action Logement, à la demande du Gouvernement, de plans de rachat auprès de promoteurs privés de près de 50 000 logements engagés dès le printemps 2023 en vue de créer une large part de logements locatifs intermédiaires (qui représentent les deux tiers de ce plan de rachat), avec le soutien d'une offre de prêts exceptionnelle de la Banque des Territoires, autorisée par le ministère de l'économie et des finances ;

- L'augmentation de capital de 250 M€ au sein de la Société pour le logement intermédiaire, un fonds d'investissement de l'Etat dans le logement intermédiaire, décidée par le Gouvernement au second semestre 2023, en vue de construire 4 000 logements intermédiaires supplémentaires ;

- L'ouverture, par la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, du régime du logement locatif intermédiaire à de nouveaux territoires, à l'acquisition-amélioration, et aux résidences gérées à destination des étudiants, des jeunes actifs ou des séniors ;

- L'engagement de 14 assureurs, en mars 2024, à apporter plus de 400 M€ de fonds propres en faveur du financement du secteur locatif intermédiaire, qui s'ajoute à l'engagement de la Caisse des Dépôts, à la fin de l'année 2023, à apporter 250 M€ dans un nouveau fonds dédié ;

- La signature d'un pacte pour le logement intermédiaire entre l'Etat, les opérateurs du logement intermédiaire et les investisseurs, en mars 2024, contenant les engagements de chacun en vue de permettre une meilleure accessibilité au logement intermédiaire.

2.2.3. Maintenir l'ambition d'un rattrapage SRU en faveur des ménages les plus modestes

Dans ses modalités d'application, la mesure doit s'articuler avec l'impératif d'atteinte par les communes de leur taux cible de logements sociaux à moyen terme et la nécessité de préserver l'orientation de la production attendue d'elles vers des produits à destination des ménages les plus modestes.

A ce titre, la mesure doit permettre de renforcer le rôle joué par le logement locatif intermédiaire dans le financement des opérations incluant des logements locatifs sociaux, en particulier les produits proposés aux loyers les plus bas à destination des ménages les plus fragiles, grâce à une péréquation économique entre les différents produits indispensables à l'équilibre des opérations. Si ce rôle a pu être joué, dans les opérations mixtes, par les logements financés par des prêts locatifs sociaux, ces derniers ne permettent pas systématiquement d'obtenir une rentabilité globale suffisante, en particulier dans les zones où les prix du foncier ou les coûts de construction sont les plus élevés.

A contrario, la mesure envisagée doit permettre une intégration du logement locatif intermédiaire sans créer un effet d'éviction sur le développement du parc social. En ce sens, elle doit prévenir les effets d'aubaine dont pourraient se saisir les collectivités récalcitrantes à l'accueil des ménages les plus modestes, qui souhaiteraient réaliser leurs obligations triennales à la faveur du seul logement locatif intermédiaire. L'intégration ne doit en outre se concevoir qu'au regard du rôle complémentaire qu'a vocation à jouer le logement intermédiaire par rapport au logement social, ce qui suppose l'existence d'un parc social déjà suffisamment développé et l'existence d'un besoin local avéré sur le territoire de la commune.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Aucune alternative à une intervention législative ne permet d'offrir aux communes déficitaires la garantie que la production de logements locatifs intermédiaires sur leur territoire sera effectivement prise en compte par le préfet dans sa décision de prononcer ou non leur carence.

En effet, en vertu de l'article L. 302-9-1 du CCH, la décision de prononcer la carence d'une commune est prise par le préfet en tenant compte de trois critères :

1) L'importance de l'écart entre les objectifs et les réalisations constatées au cours de la période triennale ;

2) Les difficultés rencontrées par la commune ;

3) Les projets de logements sociaux en cours de réalisation sur son territoire.

En cas de contentieux, le juge administratif se fonde sur ces trois critères pour contrôler que le préfet n'a pas réalisé une erreur d'appréciation en prononçant la carence et que la sanction infligée (le niveau de majoration du prélèvement et le champ de l'éventuelle reprise de l'instruction des décisions d'urbanisme) ne revêt pas un caractère disproportionné (CE, 28 octobre 2022, Commune d'Auvers-sur-Oise, n° 453414).

En ce sens, le juge du référé a déjà pu suspendre un arrêté de carence au motif que le préfet n'avait pas pris en compte la bonne atteinte de l'objectif quantitatif d'une commune en dépit de sa part trop élevée de logements financés en PLS (TA Montreuil, ord., 23 mars 2018, Commune de Neuilly-Plaisance, n° 1802094). Les juges du fond ont également annulé ou réformé des arrêtés de carence en relevant les difficultés d'une commune liées à l'inconstructibilité d'une partie importante de son territoire du fait de ses plans de prévention des risques (CAA Versailles, 21 mars 2023, Commune d'Auvers-sur-Oise, n° 22VE02496) ou en estimant qu'un projet de zone d'aménagement concertée (ZAC) comprenant un nombre important de logements sociaux avait insuffisamment été pris en compte (CAA Marseille, Commune de Saint-Jean-de-Védas, n° 10MA02307).

Sans intervention législative, un autre élément, et notamment les efforts réalisés pour la production de logements intermédiaires, ne pourrait pas utilement être invoqué par une commune pour justifier la non-atteinte de ses objectifs.

Seule une intervention législative permet d'inclure le logement locatif intermédiaire dans le calcul de l'atteinte de l'objectif quantitatif d'une commune. Or, ce calcul est directement opposable pour la détermination du plancher légal de majoration du prélèvement d'une commune lorsque sa carence est prononcée11(*).

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le dispositif retenu vise à reconnaitre la possibilité pour une commune d'atteindre une partie de son objectif triennal de rattrapage par la réalisation de logements locatifs intermédiaires. A cet égard, la mesure ne conduit pas à intégrer le logement locatif intermédiaire à l'inventaire des logements sociaux pris en compte pour l'atteinte du taux cible (20 % ou 25 %) imposé par le dispositif SRU. La composition de l'inventaire des logements sociaux n'est pas modifiée. Ainsi, seules les obligations en termes de flux de production sont concernées par l'intégration du logement locatif intermédiaire, laquelle n'a en revanche aucun impact sur l'objectif général en stock.

Au-delà, cette possibilité est encadrée par quatre limites :

1) Elle n'est ouverte qu'aux communes dont le taux de logement social est à moins de dix points du taux cible qu'elles doivent atteindre.

Les communes devant atteindre un taux cible à 25 % devront donc disposer d'un taux de logement social supérieur à 15 % et celles devant atteindre un taux cible à 20 % devront disposer d'un taux de logement social supérieur à 10 % pour bénéficier de cette intégration du logement locatif intermédiaire à leur bilan.

Cette limite vise à garantir que les communes disposant de déficits importants concentrent l'essentiel de leurs efforts sur le développement d'un parc social sur leur territoire. Elle permet également de s'assurer que la production de logement locatif intermédiaire aura effectivement un rôle complémentaire au segment social au sein de la commune, tant en termes de mixité sociale que de parcours résidentiel.

2) Elle n'est ouverte que dans la limite de 25 % de l'objectif triennal de la commune.

Seule une fraction de l'objectif triennal d'une commune pourra être satisfaite par la production de logements locatifs intermédiaires. Cette fraction ne pourra pas dépasser 25 % de l'objectif triennal de la commune. Les logements locatifs intermédiaires excédant la fraction qui aura été définie ne seront pas retenus pour l'atteinte de l'objectif.

Cette limite vise à s'assurer que les communes ne substituent pas massivement la réalisation de logements locatifs intermédiaires à leur production de logements sociaux, ce qui rendrait ineffectif le rattrapage attendu d'elles.

La fraction ouverte par le dispositif retenu ne consiste pas en un sous-objectif qui ne pourrait être atteint que par la réalisation de logements locatifs intermédiaires. Il s'agit de permettre l'atteinte d'une fraction de l'objectif par la réalisation de logements locatifs intermédiaires ou de logements sociaux. Une commune pourra donc atteindre son objectif en ne produisant pas de logements locatifs intermédiaires malgré l'ouverture de cette fraction.

3) Son principe et son ampleur doivent faire l'objet d'un accord dans le cadre d'un contrat de mixité sociale.

La fraction de l'objectif pouvant être satisfaite par la réalisation de logements locatifs intermédiaires devra être ouverte et définie dans son ampleur au sein d'un contrat de mixité sociale conclu entre l'Etat, la commune, l'EPCI à fiscalité propre dont elle est membre et les éventuelles autres parties prenantes. Le contrat de mixité sociale devra prévoir l'ampleur de la fraction de l'objectif pouvant être atteinte par la réalisation de logements locatifs intermédiaires sans pouvoir dépasser 25 % de l'objectif triennal de la commune.

Le dispositif retenu fait ainsi du contrat de mixité sociale l'unique vecteur d'ouverture de cette fraction. Fondé sur un constat partagé sur la situation de la commune, notamment sur l'ampleur et la nature de ses besoins en logements, l'outil conventionnel est le plus pertinent pour s'assurer d'une ouverture adaptée de cette possibilité.

4) Le dispositif retenu actualise en conséquence l'obligation qualitative existante : la somme des logements financés en PLS et des logements locatifs intermédiaires pris en compte ne pourra pas dépasser 40 % de l'objectif triennal.

Afin de garantir que le rattrapage des communes déficitaires bénéficie majoritairement aux ménages les plus modestes tout en limitant la concurrence entre les produits destinés aux classes moyennes - notamment le BRS et le PSLA, assimilés au PLS pour le calcul des obligations qualitatives - le dispositif retenu actualise l'objectif qualitatif relatif au logement social, en imposant que la somme du nombre de logements locatifs intermédiaires pris en compte au titre du contrat de mixité sociale et du nombre de logements financés en PLS sur la période n'excède pas 40 % de l'objectif triennal de rattrapage.

Les deux objectifs qualitatifs existants - maximum 30 % de PLS et minimum 30 % de PLAI - demeurent pleinement applicables : une commune ne pourra donc pas utiliser son contrat de mixité sociale pour augmenter à 40 % sa part de logements financés en PLS. Comme tous les autres objectifs triennaux, la méconnaissance de ces exigences qualitatives ouvrira la possibilité au préfet de prononcer la carence de la commune.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

L'article L. 302-8-1 du code de la construction et de l'habitation, qui institue le contrat de mixité sociale et prévoit la procédure d'aménagement des objectifs que ce dernier peut ouvrir, est complété par un III qui crée, dans ce même cadre, la possibilité d'identifier une fraction de l'objectif pouvant être satisfaite par la réalisation de logements locatifs intermédiaires.

Le III de l'article L. 302-8 du même code, qui prévoit les objectifs qualitatifs, est complété par une phrase instituant l'obligation de ne pas excéder 40 % du rattrapage par la réalisation de logements financés en PLS et de logements locatifs intermédiaires.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Sans objet.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Les difficultés d'accès à un logement abordable pour les travailleurs génèrent une perte d'attractivité de certains bassins d'emploi et réduisent la mobilité professionnelle des salariés. Elles affectent le pouvoir d'achat des classes moyennes tout en créant des rigidités dans le marché de l'emploi.

En tant qu'incitation au développement d'une offre de logements locatifs intermédiaires, la mesure vise à résorber ces difficultés en facilitant l'installation des ménages à proximité de leur emploi, particulièrement dans les zones les plus tendues.

Eu égard à son dimensionnement et à la complémentarité entre les produits, la mesure ne devrait pas créer d'éviction au détriment de la production de logements destinés aux ménages les plus modestes, qui restera ciblée sur les communes déficitaires.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les difficultés d'accès à un logement abordable pour les travailleurs créent des difficultés de recrutement pour les entreprises situées dans les zones les plus tendues, engendrant un renchérissement du coût du travail et un frein à leur développement.

En tant qu'incitation au développement d'une offre de logements locatifs intermédiaires, la mesure vise à résorber ces difficultés en facilitant l'installation des ménages à proximité de leur emploi, particulièrement dans les zones les plus tendues. Les travailleurs essentiels des classes moyennes figurent en particulier parmi les cibles prioritaires de publics visées par l'offre locative intermédiaire.

La mesure participera, en outre, à faciliter l'équilibre économique des opérations mixtes, renforçant les capacités d'investissement des bailleurs sociaux et ouvrant de nouvelles opportunités au secteur immobilier.

Le logement locatif intermédiaire étant très largement produit par vente en l'état futur d'achèvement (84 % des opérations en 2021, 85 % en 2022 et 92 % en 202312(*)), la mesure facilitera la commercialisation des opérations des promoteurs immobiliers. En 2023, 79 % des logements neufs vendus en bloc ont été réservés par des bailleurs sociaux13(*).

De manière générale, les incitations induites par la mesure participeront au soutien au secteur de la construction, qui emploie 168 000 salariés et a produit 16 Mds € de valeur ajoutée en 202114(*).

4.2.3. Impacts budgétaires

L'impact budgétaire sur l'Etat dépend de la manière dont cette faculté sera mise en oeuvre par les communes concernées.

Dans l'hypothèse maximaliste où toutes les communes déficitaires qui le peuvent se saisissaient pleinement de la possibilité offerte, la production de LLI au titre de SRU pourrait atteindre 26 739 logements sur trois ans, soit 8 913 logements par an (cf.  § 4.3.).

Sur la base des déclarations des opérateurs de 2023, le coût moyen TTC d'un LLI s'élève à 3 575 €/m2, pour une surface moyenne de 63 m2, soit un prix moyen de 225 225 € par logement. En retenant l'hypothèse d'une évolution des prix des logements neufs similaires à l'IPC en 2024 (prévision à 2,4 %), et d'une taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) de l'ordre de 700 € par logement, le coût budgétaire brut maximal pour l'Etat pourrait être évalué à :

- au titre du taux réduit de TVA : 20 966 € par logement, soit 186,9 M€ de dépenses fiscales l'année de la livraison des logements,

- au titre du crédit d'impôt sur les sociétés équivalant à l'exonération de TFPB : 700 € par logement pendant 15 ans, soit une dépense fiscale annuelle de l'ordre de 6,2 M€ et générationnelle de l'ordre de 93,5 M€ (en € constants, sur la base d'une exonération moyenne de 15 ans et d'une dynamique de la TFPB équivalente à l'inflation),

- soit une dépense fiscale générationnelle de l'ordre de 280 M€ et une dépense fiscale l'année de la livraison de 193 M€.

Il convient cependant de déduire de cette dépense fiscale brute celle correspondant à l'effet de substitution du LLI à des logements locatifs sociaux (LLS). En effet, sans l'adoption de cette mesure, les communes concernées devraient atteindre les mêmes objectifs quantitatifs via la production de LLS. Le plancher de 30 % de PLAI étant commun aux deux situations, l'effet de substitution ne porterait que sur les PLUS et les PLS. Or, les PLUS et les PLS bénéficient du même taux réduit de TVA à 10 % que le LLI (sauf en QPV pour les PLUS où ce taux réduit est ramené à 5,5 %). Ils bénéficient également d'une exonération de TFPB, d'une durée de 25 ou 30 ans, mais compensée par l'Etat les 10 premières années pour les LLS agréés jusqu'à fin juin 2026. Ainsi l'impact pour l'Etat en cas de substitution complète des LLI à des LLS est-il très faible. En l'absence d'exonération de TFPB pour le LLI, il est légèrement favorable aux communes et EPCI à fiscalité propre, mais seulement 11 ans après la livraison des logements (fin de la compensation intégrale de l'exonération de TFPB par l'Etat aux communes).

La prise en compte du LLI dans les objectifs de rattrapage des communes déficitaires doit permettre une meilleure atteinte de ces objectifs. La substitution du LLI à du LLS ne devrait donc être que partielle.

Hormis cette substitution partielle, d'autres effets viennent réduire le coût budgétaire brut pour l'Etat du dispositif : il contribue à inciter des communes à autoriser la construction de logements qui ne l'auraient pas été sans cette fraction de LLI dans les opérations, induisant des recettes directes de TVA nouvelles et un soutien au secteur de la construction avec un impact indirect favorable aux finances publiques.

La mesure pourrait par ailleurs contribuer, dans des hypothèses et des proportions limitées, à minorer la majoration de prélèvement supportée par les communes carencées versée au Fonds national des aides à la pierre.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Communes concernées par la mesure

Parmi les 1 161 communes déficitaires, 656 communes ont un taux de logement social à moins de dix points de leur taux cible et pourraient bénéficier de la mesure dès son entrée en vigueur. Par ailleurs, 271 communes ont un écart avec leur taux cible compris entre 10 et 15 points (dont 132 avec un écart compris entre 10 et 12 points) et pourraient en bénéficier à court terme.

Ecart entre le taux de logement social et la cible SRU

Nombre de communes déficitaires

Ecart inférieur à 10 %

656

Ecart entre 10 % et 15 %

271

Ecart entre 15 % et 20 %

185

Ecart supérieur à 20 %

49

Total des communes déficitaires

1 161

Sur les 656 communes qui respectent aujourd'hui l'exigence de mixité sociale pour bénéficier de la mesure, 462 communes ont l'ensemble de leur territoire situé en zone éligible au logement locatif intermédiaire (zonage Abis/A/B1).

Les 194 autres communes peuvent toutefois potentiellement réaliser du logement locatif intermédiaire sur tout ou partie de leur territoire, à la faveur des zones d'éligibilité complémentaires. Il est ainsi possible d'en réaliser dans le cadre d'une grande opération d'urbanisme, d'une opération programmée d'amélioration de l'habitat, d'une opération de requalification de copropriétés dégradées, sur les territoires de réindustrialisation, mais aussi dans les communes ayant conclu un contrat de projet partenarial d'aménagement ou une convention d'opération de revitalisation de territoire15(*). Par ailleurs, la situation de ces communes pourrait évoluer au regard de l'engagement du Gouvernement, dans le cadre du pacte pour le logement intermédiaire, d'opérer dès 2024 une actualisation du zonage A/B/C en vue de rendre éligibles au logement locatif intermédiaire des communes supplémentaires rassemblant environ 1,5 million d'habitants.

Le caractère particulièrement évolutif de ces zonages ne permet pas de déterminer précisément le nombre de communes qui pourront effectivement accueillir du logement locatif intermédiaire et qui seront ainsi susceptibles de bénéficier de la mesure. Il apparait toutefois que la moitié des communes déficitaires pourrait, au moins en partie, y prétendre.

En toute hypothèse, la mesure vise principalement les communes présentant les plus fortes tensions sur le marché du logement, qui constituent les territoires d'intervention privilégiés des opérateurs du logement locatif intermédiaire.

Effets sur les obligations de production de logements locatifs sociaux

Dans l'hypothèse où l'ensemble de ces 656 communes se saisiraient pleinement de la possibilité offerte par la mesure en concluant des contrats de mixité sociale ouvrant l'intégration du logement locatif intermédiaire jusqu'à la fraction maximale de 25 % de l'objectif triennal, ces dernières pourraient faire valoir jusqu'à 26 739 logements locatifs intermédiaires au titre de leur bilan 2023-2025.

En ce sens, les logements locatifs intermédiaires représenteront, au maximum, 13,4 % de la somme des objectifs triennaux notifiés aux communes pour la période (198 782 logements locatifs sociaux à réaliser). La part incompressible de logements locatifs sociaux à produire (172 043) resterait, dans ce scénario de plein recours à la prise en compte du segment intermédiaire, à des niveaux proches des objectifs globaux notifiés lors des périodes 2017-2019 (196 671) et 2014-2016 (177 437).

Effets sur le prononcé des carences et sur les sanctions associées

Sur les 656 communes potentiellement concernées par la mesure, 573 ont été soumises à un bilan de leurs réalisations sur la période 2020-202216(*). En cas de maintien, sur la période 2023-2025, du niveau de production de logements locatifs sociaux de ces communes observé en 2020-2022, 383 d'entre elles atteindraient leur objectif quantitatif triennal sans prise en compte du logement locatif intermédiaire.

Parmi les 190 autres communes, 14 pourraient atteindre leur objectif quantitatif en maintenant leur niveau de production de logements locatifs intermédiaires observé en 2020-2022 et en concluant un contrat de mixité sociale ouvrant la possibilité d'atteindre 25 % de leur objectif en prenant en compte ces derniers. Dans le même temps, cette intégration permettrait à 9 communes de voir leur taux d'atteinte dépasser 75 %. La limite de prise en compte à hauteur de 25 % de l'objectif produirait ses effets pour 21 communes, les autres ayant produit un volume inférieur à cette part. Parmi ces communes qui verraient leur bilan évoluer significativement, à production constante, du fait de la prise en compte du logement locatif intermédiaire, 9 sont des communes dont la carence a été prononcée au titre de la période 2020-2022.

Eu égard aux effets incitatifs attendus de la mesure et au soutien apporté récemment à la production de logements locatifs intermédiaires, une augmentation du volume des réalisations est à prévoir dans les prochaines années.

En postulant que l'ensemble des communes concernées concluent un contrat de mixité sociale ouvrant une fraction de 25 % de l'objectif pouvant être atteinte par la réalisation de logements locatifs intermédiaires et que toutes en réalisent un nombre atteignant ou dépassant cette limite, 59 des 190 communes concernées atteindraient leur objectif quantitatif. Parmi elles, figurent 19 communes dont la carence a été prononcée au terme du bilan des réalisations de la période triennale 2020-2022. Dans le même temps, 52 communes verraient leur taux d'atteinte dépasser les 75 % à la faveur de la prise en compte du logement locatif intermédiaire, dont 22 communes actuellement sous le régime de la carence.

L'ensemble de ces projections, et notamment celles tenant aux effets à attendre de la mesure sur le bilan des réalisations de la période 2023-2025, doivent être relativisées dans la mesure où :

- Les niveaux de production de logements locatifs sociaux d'une commune peuvent varier sensiblement d'une période triennale à l'autre ;

- Certaines communes pourraient ne pas conclure de contrat de mixité sociale, notamment en cas d'absence d'accord entre les parties signataires sur son opportunité, ou prévoir une limite de prise en compte du logement locatif intermédiaire inférieure au seuil légal de 25 % ;

- Dans les communes mobilisant pleinement cette possibilité jusqu'à la limite légale, le niveau de réalisation de logements locatifs intermédiaires pourrait être inférieur à cette limite ;

- La décision de prononcer la carence d'une commune se fonde, au-delà des résultats quantitatifs, sur le contrôle du respect des exigences qualitatives. Si, au regard des effets de substitution entre les produits de logement, il n'est pas possible d'évaluer précisément l'ampleur de ce phénomène, la prise en compte du logement locatif intermédiaire sur le plan quantitatif pourrait avoir pour pendant, dans certaines communes, une dégradation de leur bilan sur le plan qualitatif, pouvant justifier leur mise en carence.

Enfin, il convient de relever que la prise en compte du logement locatif intermédiaire pourra conduire à minorer, dans certaines communes carencées, le niveau de la majoration de prélèvement qui leur est appliquée. En effet, en application de l'article L. 302-9-1, la mise en carence d'une commune s'accompagne de la détermination d'un niveau de majoration de son prélèvement annuel, qui ne peut être inférieur à son taux de non-atteinte de l'objectif sur la période triennale au titre de laquelle sa carence a été prononcée. Aussi, en participant à l'augmentation du taux d'atteinte de l'objectif quantitatif d'une commune carencée, la prise en compte du logement locatif intermédiaire contribue à la minoration de son plancher légal de majoration de prélèvement. Les préfets restent néanmoins libres de prévoir une majoration allant au-delà de ce plancher (dans la limite du quintuplement du prélèvement initial) : aujourd'hui, parmi les 341 communes carencées, 122 se voient appliquer le plancher légal de majoration.

Exemple des effets potentiels de la mesure pour une commune

Hypothèse d'une commune disposant de 10 000 résidences principales, dont 2 000 logements sociaux. La commune se voit imposer un taux cible de 25 % : en vertu du dispositif SRU, elle doit disposer de 2 500 logements locatifs sociaux.

Elle est donc déficitaire, avec un taux de logement social de 20 % et 500 logements sociaux manquants.

Avant la mesure :

1) Son prélèvement annuel correspond à : 25 % de son potentiel fiscal par habitant × 500 logements sociaux manquants ;

2) Son objectif triennal est de 165 logements sociaux (33 % du déficit) ;

3) Elle doit réaliser au moins 50 logements financés en prêt locatif aidé d'intégration (PLAI) et au plus 50 logements financés en prêt locatif social (PLS) (30 % de l'objectif triennal) ;

4) Si la commune réalise 100 % de son objectif triennal, son prélèvement annuel en fin de période sera calculé sur la base de l'écart entre 25 % de ses résidences principales et 2 165 logements sociaux

Avec la mesure :

1) Le prélèvement annuel reste inchangé : 25 % du potentiel fiscal par habitant × 500 logements sociaux manquants

2) Son objectif triennal reste inchangé d'un point de vue quantitatif : 165 logements (33 % du déficit) ;

3) Elle doit réaliser au moins 50 logements financés en prêt locatif aidé d'intégration (PLAI) et au plus 50 logements financés en prêt locatif social (PLS) (30 % de l'objectif triennal). Si elle se saisit pleinement de la possibilité offerte par la mesure, elle pourra réaliser 41 logements locatifs intermédiaires, qui contribueront à l'atteinte de l'objectif de 165 logements (25 % de l'objectif triennal). Le cumul du nombre de logements financés en PLS et du nombre de logements locatifs intermédiaires ne pourra pas dépasser 66 logements.

4) Si la commune réalise 100 % de son objectif triennal en produisant 41 logements locatifs intermédiaires, son prélèvement annuel en fin de période sera calculé sur la base de l'écart entre 25 % de ses résidences principales et 2 124 logements sociaux. Il sera donc plus élevé, mais la commune s'exonère de la carence bien qu'elle n'ait produit que 124 logements locatifs sociaux

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure n'induit que le prolongement de pratiques administratives existantes, notamment du point de vue de la négociation des contrats de mixité sociale.

Les services déconcentrés de l'Etat (DDT-M, DREAL, DEAL) pourront s'appuyer, pour le décompte du nombre de logements locatifs intermédiaires réalisés, sur la déclaration que les gestionnaires sont tenus de produire annuellement (art. L. 302-16-1 et D. 302-31 et suivants du code de la construction et de l'habitation).

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La mesure, en plus de maintenir une forte incitation à produire des logements sociaux, encourage le développement du logement locatif intermédiaire. A cet égard, elle contribuera à renforcer la mixité sociale au sein des communes déficitaires en permettant une diversification des publics et en favorisant la fluidité des parcours résidentiels. En cela, elle s'inscrit pleinement dans l'objectif de solidarité territoriale porté par le dispositif.

En tant qu'elle participe à assurer un accès abordable au logement pour l'ensemble des ménages, la mesure contribue à garantir des conditions de vie dignes pour tous.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La mesure, en plus de maintenir une forte incitation à produire des logements sociaux, encourage le développement du logement locatif intermédiaire. L'ensemble du parc abordable étant soumis aux règles de droit commun en matière d'accessibilité, la mesure présente un impact positif pour les personnes en situation de handicap, qui peuvent rencontrer des difficultés dans l'accès au logement dans les zones les plus tendues.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

En ce qu'elle maintient une forte incitation à produire des logements sociaux, la mesure favorise l'accès au logement des familles monoparentales, davantage représentées dans le parc social que dans le parc privé (37 % contre 16 %)17(*). Or, dans ces familles - qui connaissent des difficultés financières plus nombreuses (40,5 % de pauvreté, contre 15,6 % dans les familles avec deux parents en couple)18(*) -, le parent assumant la charge des enfants est une femme dans 82 % des cas19(*).

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

La mesure, en plus de maintenir une forte incitation à produire des logements sociaux, encourage le développement de logements locatifs intermédiaires. L'ensemble du parc abordable étant accessible à tous les publics, dont les jeunes, la mesure présente un impact positif pour ces derniers. D'après les statistiques transmises par les grands opérateurs, l'âge moyen des locataires des logements locatifs intermédiaires est d'ailleurs significativement inférieur à celui des locataires du parc social (34 ans vs. 50 ans).

Le logement locatif intermédiaire constitue, en outre, un produit privilégié pour les jeunes actifs, notamment au sein des résidences gérées, et les étudiants, qui peuvent bénéficier d'une offre meublée et en colocation au sein du parc intermédiaire. Pour illustrer l'intérêt du parc intermédiaire pour l'accueil des jeunes, il a été constaté que les jeunes ménages de petite taille constituaient la catégorie de ménages la plus représentée au sein du parc développé par Action Logement et CDC Habitat (32 % des ménages ayant emménagé dans un LLI de CDC Habitat avaient moins de 30 ans et 71 % des locataires de LLI étaient des ménages sans enfant)20(*).

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure, en plus de maintenir une forte incitation à produire des logements sociaux, encourage le développement du logement locatif intermédiaire. L'accroissement du parc abordable qu'elle permet aura impact positif très large pour les particuliers.

Pour rappel, les plafonds actuels des logements financés en prêts locatifs sociaux permettent à environ deux tiers des ménages d'y accéder21(*).

Si, au regard des plafonds des ressources, le logement locatif social parait accessible aux classes moyennes, la forte demande sur ce segment conduit de facto à leur éviction dans les zones les plus tendues, au stade des attributions, lors desquelles les ménages plus fragiles sont priorisés : en 2022, seules 1 % des attributions de logements sociaux ont concerné des ménages présentant des ressources situées entre les plafonds PLUS et PLS22(*).

Plafonds de ressources PLS

Selon une étude menée par la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) en 2019, autour de 79 % des ménages présentent des ressources leur permettant d'accéder à un logement locatif intermédiaire, avec des variations notables selon la zone et la composition du ménage :

Catégorie de ménage

Zone A Bis

Zone A

Zone B1

Zone B2 et C

1

78 %

90 %

87 %

88 %

2

60 %

79 %

64 %

65 %

3

74 %

85%

75 %

73 %

4

69 %

86 %

75 %

78 %

5

73 %

91 %

83 %

86 %

6

83 %

96 %

91 %

92 %

Filocom 2019 - Calculs DHUP à partir des revenus fiscaux de référence des ménages en 2019 et des plafonds de ressources du PLI en 2019

Plafonds de ressources logement locatif intermédiaire

Le développement d'un parc de logements locatifs intermédiaires permettra de favoriser l'accès au logement des classes moyennes et de créer une rotation dans le parc social qui bénéficiera aux ménages en attente d'une attribution.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La mesure, en plus de maintenir une forte incitation à produire des logements sociaux, encourage le développement de logements locatifs intermédiaires. Le parc abordable, en plus d'être soumis aux normes environnementales en vigueur pour la construction neuve, se singularise par son caractère essentiellement collectif (84 % des logement sociaux) et par son implantation dans les zones les mieux desservies en transports en commun. En cela, sa contribution à l'artificialisation des sols est moindre : le logement collectif n'est responsable que de 3 % de l'artificialisation nouvelle entre 2006 et 2014, contre 46 % pour le logement individuel23(*).

En outre, les opérations de logements locatifs intermédiaires s'inscriront nécessairement dans des ensembles immobiliers comprenant une part de logements sociaux. A ce titre, elles bénéficieront au même titre que le logement social au mécanisme d'incitation au recyclage foncier et immobilier porté par le fonds national des aides à la pierre, qui accorde un bonus de financement (3 000 € par logement PLAI ou PLUS en 2024) aux opérations n'entrainant pas d'artificialisation nette des espaces naturels, agricoles et forestiers (surélévation, renaturation, densification, opérations impliquant la dépollution de friches).

Au-delà, la réalisation de logements locatifs intermédiaire peut intervenir, comme dans le parc social, par la voie d'opérations d'acquisition-amélioration ou de reconversion d'immeubles de bureaux contribuant à la sobriété foncière et à la constitution d'un parc hautement performant d'un point de vue énergétique.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Des réunions de concertation ont eu lieu entre le ministre en charge du logement et les associations représentatives des élus locaux, des fédérations de bailleurs sociaux et des organisations représentatives du secteur immobilier.

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les mesures proposées entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

Elles seront applicables pour la période triennale en cours. Ainsi, avant la fin de l'année 2025, les communes pourront conclure des contrats de mixité sociale prévoyant qu'une fraction de leurs objectifs au titre de la période 2023-2025 pourra être atteinte par la réalisation de logements locatifs intermédiaires. Pour les communes déjà engagées dans un contrat de mixité sociale au titre de cette période, des avenants pourront être pris à cette même fin.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble des communes déficitaires au sens des articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation.

Le dispositif SRU s'applique de plein droit en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et à La Réunion. Il s'applique également de plein droit à Mayotte, à l'exception du prélèvement annuel supporté par les communes déficitaires24(*). Ces territoires sont éligibles à la réalisation de logements locatifs intermédiaires dans les mêmes conditions qu'en métropole.

Il ne s'applique ni dans les collectivités d'outre-mer (Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna) ni en Nouvelle-Calédonie.

5.2.3. Textes d'application

L'article L. 302-9-2 prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat détermine, en tant que de besoin, les conditions d'application des articles L. 302-1 et suivants. Sur cette base, un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités de prise en compte du logement locatif intermédiaire, et notamment le fait générateur du décompte.

Article 2 - Accorder aux maires les primo-attributions de logements sociaux

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Dans son discours de politique générale, le Premier ministre a annoncé son intention de confier aux maires le pouvoir d'attribuer les logements sociaux.

Les maires ont une responsabilité importante en matière de développement du logement social puisqu'il leur revient en particulier d'accorder le permis de construire, d'apporter un terrain ou un financement et de garantir des emprunts et d'assumer le portage politique des opérations de logement social devant leurs administrés. En outre, ce sont les communes qui sont assujetties au respect des obligations en matière d'offre de logement social résultant de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation (article 55 de la loi SRU).

Toutefois, s'il existe plusieurs dispositions donnant un rôle au maire dans l'attribution d'un logement (voix prépondérante en commission d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements en cas d'égalité des voix, 20% des réservations contre une garantie d'emprunts, attribution revenant au maire en cas d'échec d'un logement à un candidat présenté par un réservataire dans les quartiers prioritaires de la politiques de la ville ...), le maire ne pèse pas de manière déterminante dans les attributions de logement social à l'échelle de l'ensemble d'une résidence ou de leur commune. Depuis la loi ALUR du 24 mars 2014, au sein des acteurs en charge des politiques locales de l'habitat, c'est l'intercommunalité qui a été consacrée comme le chef de file de la réforme des attributions. Il lui revient de mettre en place une politique de l'habitat (programme local de l'habitat), une conférence intercommunale du logement (CIL), un plan partenarial de gestion de la demande et d'information des demandeurs (PPGDID). Plus récemment, dans le cadre de la loi ELAN du 23 novembre 2018, l'intercommunalité s'est vu confier la responsabilité d'élaborer une convention intercommunale d'attribution fixant des enjeux et des engagements en matière de politique d'attribution des logements sociaux.

Enfin, il convient de signaler l'absence de représentant du conseil départemental au sein des commissions d'attribution des logements sociaux. Du fait des compétences en matière sociale dévolues aux départements (gestion du fonds de solidarité logement, accompagnement social, aide sociale à l'enfance, handicap, séniors...) et de l'engagement de la majorité des départements dans les politiques locales du logement social, la participation d'un représentant du département à ces commissions pourrait utilement éclairer les échanges au sein de la commission et contribuer à une meilleure coordination des actions entre le bailleur social et le département en matière d'accompagnement social pour les ménages en situation de précarité.

Par ailleurs, la décision d'attribution d'un logement relève de la commission d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements (CALEOL) mentionnée à l'article L. 441-2 du code de la construction et de l'habitation. La loi prévoit la mise en place a minima d'une CALEOL par bailleur avec la possibilité d'en créer plusieurs suivant la répartition géographique du patrimoine du bailleur. Le bailleur a l'obligation de créer une CALEOL à l'échelle des intercommunalités (EPCI, EPT, Paris) si elles le demandent et si l'organisme possède plus de 2000 logements sur le territoire de l'EPCI.

La CALEOL doit examiner pour chaque logement au moins trois candidatures pour un même logement à attribuer (article R. 441-3) sauf en cas de ménages labellisés « DALO » où une seule candidature est requise. Le CCH ne précise pas si les trois candidats doivent être présentés par un seul ou plusieurs réservataires, cela renvoie aux relations que chaque bailleur entretient avec ses réservataires et à sa gestion des conventions de réservation. Le principe d'un minimum de trois candidatures connait toutefois des exceptions : insuffisance du nombre de candidats, candidat présenté reconnu prioritaire et urgent (ménages dits « DALO » : Droit au Logement Opposable) - quel que soit le réservataire - ou attribution à un ménage répondant aux conditions du PLAI adapté (logements financés grâce au Prêt Locatif Aidé d'Intégration qui sont destinés à des ménages en grande fragilité nécessitant un accompagnement social - article D. 331-25-1 du CCH).

Le maire est de fait isolé au sein de la CALEOL puisque, outre sa présence, elle est composée de six représentants de l'organisme bailleur (dont un représentant des locataires), du préfet et du président de l'EPCI. Peuvent également participer à la commission, sans voix délibérative, un représentant des organismes d'intermédiation locative (car le demandeur peut se voir attribuer un logement par un de ces organismes), les maires d'arrondissement à Paris, Lyon et Marseille (si l'attribution a lieu sur l'un de leur arrondissement) et les réservataires non membres de droit.

Le maire dispose ainsi de peu de poids au sein de ces commissions. La voix prépondérante qui lui est attribuée depuis 2003, à la place du président de l'organisme de logement social, et qui lui avait été retirée en 2017 par la loi dite égalité et citoyenneté puis redonnée par la loi dite ELAN en 2018, n'est guère utilisée, le partage des voix étant rare du fait de la composition de la commission au sein de laquelle les représentants du bailleur sont, de fait, majoritaires.

Les attributions au niveau national sont en baisse continue et ont atteint 420 000 en 2022, selon le dernier tableau de bord publié par l'ANCOLS :

Les logements mis en service lors des trois dernières années s'élèvent quant à eux à :

Situation SRU de la commune

2021

2022

2023

Moyenne 3 ans

Déficitaires

20 830

23 918

23 235

22 661

Déficitaires carencées

5 781

7 441

7 618

6 947

Hors périmètre

10 285

13 207

12 483

11 992

Périmètre SRU, taux atteint

29 673

31 376

27 811

29 620

TOTAL

66 569

75 942

71 147

71 219

Les premières attributions représentent donc environ 17% des attributions globales. Les premières attributions en communes non carencées représentent quant à elles environ 15% des attributions.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle depuis une décision du conseil constitutionnel du 19 janvier 199525(*). L'existence de logements locatifs sociaux, réservés aux ménages les plus modestes, participe à garantir le respect de ce droit. Confier plus de responsabilités aux maires dans le processus d'attributions n'affectera pas ce droit garanti par la Constitution qui est mis en oeuvre dans le respect du principe à valeur constitutionnelle d'égalité. En effet, le maire sera tenu aux mêmes exigences légales que les CALEOL actuellement, à savoir l'obligation de fonder ses décisions sur des critères objectifs, à partir du dossier du candidat et, dans les EPCI concernés par la réforme des attributions de logements sociaux, en ayant connaissance de la cotation des demandes de logement social, en respectant les priorités en matière d'attribution définies par les articles L. 441-1 et L. 441-2-3-1 en tenant compte des conventions intercommunales d'attribution prévues à l'article L. 441-1-6. Par ailleurs, l'article du projet de loi prévoit que ses nouvelles prérogatives soient très encadrées. Ainsi, son droit de véto ne concernera qu'un nombre limité de logements sociaux (les premières mises en location soit moins de 20% des attributions), devra être motivé et ne pourra servir qu'une fois.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

La convention européenne des droits de l'homme prévoit en son article 14 l'interdiction de toutes discriminations fondées notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion. Ces principes s'appliquent aux attributions de logements sociaux. Au sein des CALEOL, les membres sont tenus de respecter cet article de la même manière qu'ils doivent respecter les articles L. 225-1 et suivants du code pénal. L'évolution du rôle du maire prévu par l'article 2 du projet de loi ne remet nullement en cause ces obligations, les décisions d'attribution relevant in fine de la CALEOL. Ce présent article prévoit d'ailleurs un certain nombre de garde-fou et notamment l'obligation pour le maire de motiver ses décisions de refus d'attribuer un logement social (droit de véto) qui ne peuvent servir qu'une fois par logement.

Par ailleurs, les articles 31 de la charte sociale européenne (droit au logement) et 25 de la déclaration universelle des droits de l'Homme (droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour le logement) ne sont pas affectés par le fait de confier plus de responsabilités aux maires dans le processus d'attributions. En effet, le maire sera tenu aux mêmes exigences légales que les CALEOL actuellement, à savoir l'obligation de fonder ses décisions sur des critères objectifs, à partir du dossier du candidat et, dans les EPCI concernés par la réforme des attributions de logements sociaux, en ayant connaissance de la cotation des demandes de logement social. Par ailleurs, cet article prévoit que ses nouvelles prérogatives soient très encadrées. Ainsi, son droit de véto ne concernera qu'un nombre limité de logements sociaux (les premières mises en location), devra être motivé et ne pourra servir qu'une fois.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Le Gouvernement ne dispose pas d'éléments ou d'études en la matière. De plus, les politiques suivies à l'étranger en matière de logements social (quand il en existe) sont très diverses. Ainsi, un rapport de la Cour des comptes intitulé « Le recours aux comparaisons européennes en matière de logement » (S2023-0075-1), rendu public en 2023, constatait que « les indicateurs disponibles ne sont pas encore harmonisés à l'échelle européenne, limitant le champ et la qualité des comparaisons ».

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La procédure d'attribution et le rôle des membres de la commission d'attribution relèvent de la loi. En effet, l'article L. 441-2 du CCH prévoit la composition de la CALEOL et le fait que cette dernière attribue nominativement les logements. Il est donc nécessaire de modifier cet article afin de prévoir les nouvelles compétences du maire et d'ajouter un représentant du conseil départemental parmi les membres de la CALEOL

Enfin, les accords collectifs intercommunaux et départementaux sont prévus aux articles L. 441-1-1 et L. 441-1-2 du CCH. Il est nécessaire de passer par la loi pour les supprimer.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les premières attributions des nouveaux logements sociaux marquent durablement le peuplement d'un programme neuf et peuvent être préparées finement en amont, plusieurs mois avant la livraison des logements, sans contrainte de vacance du parc de logements pour le bailleur social. Cet article vise à accorder une plus grande confiance aux maires en leur accordant la première attribution de tout logement social dont ils ont décidé la construction et en leur confiant la présidence de la CALEOL. En effet, les mises en location initiales emportent de forts enjeux pour les communes concernées et nécessitent un positionnement des maires pour la maîtrise des équilibres de peuplement sur leur territoire, équilibre à inscrire dans la durée. Le renforcement du pouvoir des maires dans la première attribution de logements sociaux mis en service doit lui permettre de mieux assumer la responsabilité de la production de programmes de logements sociaux sur son territoire et de mieux expliquer à ses habitants l'enjeu que représentent ces opérations pour répondre aux besoins en logement social du territoire. Il s'agit d'inciter ainsi les maires à s'engager plus fortement encore dans le développement de l'offre de logement social sur son territoire alors que la production de logements sociaux connaît un ralentissement au niveau national depuis quelques années et reste inférieure aux besoins identifiés.

Le maire est celui qui connait le plus finement son territoire et il est l'acteur le plus pertinent dans la définition des contours de sa politique de peuplement et des grands enjeux économiques, et sociaux du territoire. Sachant que le maire dispose en amont de la capacité à délivrer les autorisations d'urbanisme pour les programmes de construction de logements, il apparaît pertinent de lui donner un rôle central dans la phase aval d'un projet d'aménagement urbain, à savoir la capacité à envisager les primo-attributions de ces mêmes programmes.

C'est la raison pour laquelle l'article propose, pour les communes qui participent à l'effort de construction, notamment sociale, de donner un rôle prépondérant au maire en matière d'attribution de logements sociaux sur les logements sociaux dits « ordinaires » nouvellement mis en service. Il s'agirait notamment de lui confier la présidence de la commission d'attribution, de lui accorder un droit de véto sur les premières attributions et de lui permettre de classer les différents candidats présentés par les réservataires sur un même logement à attribuer. Fin connaisseur des enjeux de son territoire, il disposerait ainsi d'une marge de manoeuvre plus importante sur les orientations de sa politique de peuplement.

Bien que le présent article prévoie un droit de véto pour le maire ou son représentant, à l'exception des communes carencées, ce droit ne pourra s'exercer que sur les mises en location initiales et non sur l'ensemble du parc de logement social. De plus, le présent article prévoit que dans le cas d'une gestion non déléguée, la décision de ne pas donner suite à une proposition d'un réservataire ou de modifier le classement proposé par ce dernier doit être notifiée au réservataire et dûment motivée.

Cet article prévoit également la possibilité pour l'Etat de confier à la commune son contingent, hormis pour les agents civils et militaires de l'Etat, pour les premières attributions lors de la mise en location initiale des logements, soit 25% des logements à attribuer. Le maire pourra ainsi disposer de droits de réservation détenus directement ou par délégation de l'Etat à hauteur de 45% du programme (dont a minima 30 % dédié au DALO ou à défaut à des publics prioritaires relevant respectivement des articles L. 441-2-3-1 et L. 441-1) correspondant à la délégation du contingent de l'Etat pour 25% maximum des logements et à son contingent propre dont il disposera lorsqu'il aura consenti des garanties d'emprunt au bailleur, ouvrant droit à 20% de droits de réservation au maximum. En cas d'octroi de subventions complémentaires au projet par la commune, les droits de réservation dont bénéficiera la collectivité pourront même dépasser ce taux de 45% dans la limite des droits des autres réservataires. Le maire bénéficiera sur ces logements d'un droit de désignation des candidats.

Cet article ambitionne donc de responsabiliser les maires dans la procédure d'attribution sur les logements nouvellement mis en service.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Une option aurait été de conserver le statu quo tout en incitant par voie d'instruction à mieux prendre en compte la voix du maire dans les commissions d'attribution. Cette option n'a pas été retenue car elle n'aurait eu que peu d'effets sur les pratiques existantes, la réglementation actuelle ne prévoyant qu'un rôle secondaire du maire dans le processus d'attributions au sein duquel, de fait, ce sont les réservataires et les représentants du bailleur social qui disposent des prérogatives principales.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le présent article accorde des pouvoirs spécifiques aux maires en matière de primo-attribution des logements sociaux, sauf pour les communes qui ne respectent pas leurs obligations de production de logements sociaux au titre de la loi SRU et font l'objet d'un arrêté de carence. En effet, les premières attributions des nouveaux logements sociaux marquent durablement le peuplement d'un programme ; le maire, qui connait finement le territoire, est le plus à même de les préparer avec la plus grande expertise.

L'article prévoit ainsi que le maire dispose, pour les premières attributions des logements sociaux, du pouvoir de classer les différentes candidatures proposées par chaque réservataire sur son contingent et de les examiner pour chaque logement à attribuer. Il dispose aussi d'un droit de véto, à motiver, sur les candidatures proposées par chaque réservataire sur son contingent. Pour ce faire, il peut s'appuyer, dans les EPCI soumis à la réforme des attributions, en toute transparence, sur la cotation des demandes de logement social et sur les orientations définies par la conférence intercommunale du logement prévue à l'article L. 441-1-5. En outre, le préfet peut déléguer au maire tout ou partie de son contingent de réservation, à l'exception des logements réservés au bénéfice des agents civils et militaires de l'État, pour les primo-attributions. Le maire doit alors respecter les obligations qui pèsent sur le préfet en matière de logement des ménages DALO ou à défaut prioritaires, le contingent du préfet étant dévolu à des attributions à destination de ménages prioritaires. Ainsi, si le maire décide de changer l'ordre de classement, il devra le faire dans le cadre général applicable aux attributions c'est-à-dire en respectant les ordres de priorités fixés par la loi (ménages DALO et prioritaires de l'article L. 441-1 du CCH). Les principes généraux de non-discrimination et de priorisation s'appliqueront de fait au classement proposé par le maire. De même, en cas de délégation par le préfet de son contingent, le maire sera tenu de proposer sur ce contingent des ménages reconnus DALO ou prioritaires en respectant les principes de non-discrimination et de priorisation rappelés ci-dessus. Pour rappel, cette délégation ne porterait que sur les premières attributions des logements mis en service et hors contingent dédié aux agents publics de l'Etat.

Au-delà des seules premières attributions pour les logements neufs, l'article prévoit que le maire exerce la présidence des commissions d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements (les CALEOL). D'un point de vue organisationnel, la présidence de la CALEOL sera exercée consécutivement par chaque maire concerné par les attributions de logements sociaux sur sa commune. Ce sera une présidence tournante au cours de la CALEOL. Au cas où le maire ou son représentant serait absent, c'est un membre des représentants des bailleurs qui exercera la présidence comme c'est le cas actuellement. Ce membre pourra être désigné par le bailleur pour l'ensemble des CALEOL ou lors de la tenue de la CALEOL en début de séance.

Du fait des changements d'organisation induits par le présent article, il est également proposé de modifier l'alinéa relatif à l'attribution des logements faisant l'objet de conventions de gérance entre bailleurs sociaux pour prévoir que ce soit un représentant de l'organisme du bailleur qui soit membre de droit de l'organisme gérant et non le président de la commission puisque ce dernier sera le maire.

Par ailleurs, cet article prévoit d'ajouter le président du conseil départemental, ou son représentant, parmi les membres ayant voix consultative au sein de la CALEOL. Le représentant pourra être un membre élu ou un membre des services techniques du département.

La rédaction actuelle de la loi ne tient pas compte de la complexité des positionnements et jeux d'acteurs entre les bailleurs sociaux, les réservataires (Etat, collectivités territoriales, Action Logement) et ne distingue pas clairement les obligations de motivation des décisions en fonction des cas. Cet article propose donc de clarifier le cas des décisions de non-attribution. Celles-ci peuvent en effet parfois être source d'incompréhension et d'inefficacité entre réservataires et bailleurs. Il faut donc que leurs motivations soient parfaitement transparentes et partagées, et puissent faire l'objet de discussions dans les instances locales chargées de définir la stratégie en matière de peuplement. C'est pourquoi il est proposé de renforcer les obligations de motivation des décisions :

- en cas de rejet d'une demande d'attribution suivie d'une radiation de la demande, le président de la CALEOL doit motiver la décision auprès du demandeur ;

- en cas de décision de ne pas donner suite à la proposition d'un réservataire ou de changer l'ordre de priorité, le président de la CALEOL doit motiver la décision auprès du réservataire lorsque la gestion des réservations n'est pas déléguée.

En revanche, en cas de non attribution d'un demandeur, en dehors des cas de radiation prévus au R. 441-2-8 (absence de réponse du demandeur, rejet pour irrecevabilité de la demande au regard de la réglementation, absence de renouvellement de la demande...), le présent article ne prévoit pas de notification aux demandeurs des décisions car cela représenterait une charge trop lourde pour les commissions d'attribution. Cette disposition ne modifie pas la réglementation existante ; en effet, le 6ème alinéa de l'article R. 441-2-17 prévoit notamment que le demandeur a accès à un certain nombre d'informations à l'issue de la CALEOL : décision de la commission d'attribution, rang du demandeur en cas d'attribution sous réserve de refus du ou des candidats précédents et motifs de la décision en cas d'attribution sous condition suspensive et en cas de non-attribution. Par ailleurs, les demandeurs ne perdent aucun droit dans le cas où leur demande de logement social n'est pas radiée (ce qui est en revanche le cas pour les demandeurs relevant des critères de radiation prévus au R. 441-2-8 ce qui justifie la nécessité de leur notifier la décision de radiation).

Aussi, cet article rationnalise dans un souci de simplification les documents concourant à la politique des attributions en supprimant les accords collectifs intercommunaux et départementaux dans les territoires et en encourageant l'adoption de conventions intercommunales d'attribution (CIA) y compris dans les territoires non soumis à la réforme. Dans les territoires soumis à la réforme des attributions engagée depuis 2014, les lois successives ont en effet peu à peu substitué de fait au cadre légal initial de définition des politiques prioritaires d'attribution constitué par les accords collectifs départementaux puis intercommunaux, les conférences intercommunales et les conventions intercommunales d'attributions (articles L. 441-1-5 et L. 441-1-6 du même code). L'articulation entre ces différents dispositifs qui poursuivent des objectifs voisins est particulièrement complexe et peu opérationnelle dans les faits. Le Gouvernement entend ainsi simplifier le droit et le rendre plus lisible. A noter qu'en 2023, seuls 31 accords collectifs intercommunaux étaient signés (source : ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires).

Enfin, cet article précise que la CALEOL s'appuie sur les données enregistrées dans le système national d'enregistrement de la demande (SNE) afin de l'appuyer sur des éléments partagés et incontestés dans sa décision.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Les mesures envisagées relatives aux premières attributions modifient des dispositions législatives suivantes : articles L. 441-2 et L. 441-2-2 du code de la construction et de l'habitation (CCH).

Celles relatives à la suppression des accords collectifs abrogent les articles L. 441-1-1, L. 441-1-2 et L. 441-1-3, et nécessitent plusieurs mesures de coordination, à savoir, la modification des articles L. 441-1, L. 441-1-6, L. 441-1-7, L. 441-2-3, L. 445-2, L. 521-3-3 du CCH.

Les articles L. 302-1, L. 441-2-5 et L. 531-3 du code de la construction et de l'habitation ainsi que l'article L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales sont également modifiés.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Sans objet.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La délégation du contingent préfectoral hors agents publics civils et militaires de l'Etat représente un maximum de 25% des attributions. A supposer que la délégation du contingent préfectoral soit réalisée dans tous les départements pour les premières attributions, elle représentera donc un maximum d'environ 16 000 attributions annuelles au rythme d'aujourd'hui, pour une proportion d'environ 3,8% du total des attributions. Par ailleurs, cette disposition n'a pas d'impact direct sur l'économie locale.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les dispositions proposées auront pour principale conséquence pour les bailleurs sociaux de revoir l'organisation de leur CALEOL et de repenser leur process pour les premières attributions des logements neufs. Il ne s'agira cependant que d'un aménagement à la marge sans effet de répétition.

4.2.3. Impacts budgétaires

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les maires (ou leur représentants) sont déjà membres de la CALEOL. Le fait de leur confier la présidence n'induira pas d'impact significatif pour ces derniers. Il en va de même concernant le droit de véto de la commune et de la possibilité de classer les candidats.

Toutefois, les procès-verbaux des commissions d'attributions devraient augmenter sensiblement du fait de la présidence « tournante » du maire pour les attributions sur sa commune. Cette charge supplémentaire pourra être absorbée via une signature anticipée en fin de séance ou via la dématérialisation des procès-verbaux. Par ailleurs, ces procès-verbaux peuvent être signés par un membre de la commission d'attribution en cas d'absence du président, comme c'est le cas actuellement.

La participation des départements aux CALEOL devra se traduire par la mobilisation de représentants issus des services ou de l'assemblée départementale. Ce temps consacré aux discussions des CALEOL devrait toutefois avoir pour conséquence de mieux travailler sur la prévention des difficultés, en amont des attributions, en facilitant la mise en place de mesures d'accompagnement social par exemple.

Concernant la mesure relative à la délégation du contingent de l'Etat, il n'est pas possible à ce jour de préjuger du nombre de délégations qui leur seront accordées. Lorsque cette possibilité de délégation existait, avant la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, elle était pratiquée notamment en Ile-de-France (32 des 36 communes des Hauts de Seine et 15 communes réparties dans les départements suivants : Yvelines, Essonne, Val-de-Marne, Val-d'Oise), dans l'Oise (1 commune) et en Provence Alpes Côte d'azur (24 communes dans le Var).

La suppression des accords collectifs intercommunaux et départementaux permet de rationaliser les documents cadres de la politique d'attribution, ce qui doit permettre un gain d'efficacité dans l'action publique en allégeant la charge de travail des intercommunalités et des départements ainsi que celle des bailleurs sociaux sur lesquels repose l'obligation légale du respect des différentes obligations en matière d'attribution de logements sociaux aux publics prioritaires. Cette disposition n'enlève en rien le rôle de chef de file des intercommunalités dans la politique d'attribution. Elles auront toujours en charge la mise en place des conférences intercommunales du logement, des conventions intercommunales d'attributions notamment.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les services de l'État dans le département seront amenés à assurer le suivi des délégations du contingent préfectoral dans les départements dans lesquels elle sera mise en oeuvre. Ce suivi pourra a minima prendre la forme d'un bilan annuel, que les services du maire adresseront au préfet pour que ce dernier s'assure du respect des objectifs légaux. Cette délégation est à la discrétion du préfet. Il lui reviendra de juger de l'opportunité de déléguer son contingent aux maires. Toutefois, cette mesure ne concernera que les premières mises en location. Son impact est de ce fait faible. Enfin, le préfet, membre de droit des CALEOL, pourra s'assurer du bon usage de cette faculté de délégation en participant aux CALEOL concernées.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Il est attendu une meilleure efficience des attributions et un meilleur contrôle des effets sur un territoire des politiques de peuplement dans le patrimoine social. Le maire, qui est l'élu le plus proche de ses administrés, sera plus à même d'assurer la mixité et la cohésion sociale, sur ces mises en location initiales.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Les personnes handicapées peuvent se voir attribuer un logement social adapté, elles font d'ailleurs partie des publics prioritaires pour l'obtention d'un logement social. Il s'agit également d'un critère pour la reconnaissance du caractère prioritaire et urgent de la demande (ménage « DALO »). Les maires devront également, lorsqu'un logement adapté sera livré, attribuer ce logement à la personne handicapée qui en aura fait la demande.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Actuellement, les membres de la CALEOL ne peuvent se fonder sur des motifs discriminatoires pour attribuer un logement. Il est ainsi prohibé de prendre en compte un des critères définis aux articles L. 225-1 et suivants du Code pénal (sexe, origine, religion, patronyme, etc.). Les mêmes obligations s'imposeront aux maires concernant les primo attributions, notamment le respect de l'égalité hommes/femmes.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Les jeunes sortant de l'aide sociale à l'enfance font partie des publics prioritaires pour l'obtention d'un logement social. En outre, ils peuvent faire l'objet d'une priorité en matière d'attributions de logements sociaux en CALEOL dans les programmes de logements sociaux agréés en application de l'article 109 de la loi dite ELAN. Ainsi, les maires devront tenir compte de ces priorités.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Ces mesures visent à responsabiliser le maire en lui donnant des prérogatives plus importantes dans les politiques d'attribution pour permettre une plus grande efficacité des politiques d'attributions. In fine, ces mesures auront un impact positif pour les demandeurs de logements sociaux d'une part, mais aussi pour tous les habitants de la commune.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R*361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

Les dispositions des 4° à 13° du I et du II ne s'appliquent pas aux accords collectifs conclus au titre des articles L. 441-1-1 et L. 441-1-2 du code de la construction et de l'habitation, dans leur rédaction en vigueur à la date de publication de la présente loi. Ces accords collectifs continuent à s'appliquer jusqu'à leur terme, sans possibilité de prorogation ou de renouvellement.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions sont applicables sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à la Réunion. En revanche, elles ne sont pas applicables dans les collectivités d'outre-mer qui sont compétentes en matière de logement.

5.2.3. Textes d'application

Cet article nécessitera des adaptations de la partie réglementaire du CCH, notamment l'article R. 441-9 du code de la construction et de l'habitation qui détermine les règles de fonctionnement de la CALEOL (décret en Conseil d'Etat).

Article 3 - Permettre une meilleure maitrise du foncier par les communes

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le foncier représente le principal poste de dépense dans une opération de production de logements (pouvant atteindre jusqu'à 50 % du coût d'une opération dans les territoires très tendus en matière immobilière26(*)). D'après une étude de « notaires de France »27(*), « les prix ont presque triplé sur le foncier et doublé sur le bâti ancien entre 2000 et 2020 ». De fait, la hausse de son prix pèse fortement sur les bilans d'aménagement et de promotion immobilière et constitue un frein à la production de logements, notamment dans les zones tendues.

Des outils ont été déployés pour permettre aux collectivités du bloc communal et à leurs groupements de mieux connaître l'occupation du territoire et le marché du foncier :

- L'Etat a tout d'abord mis en oeuvre l'ouverture des données foncières. Les fichiers fonciers obtenus par retraitement des fichiers MAJIC (données cadastrales), produits par la direction générale des finances publiques (DGFIP), et les données relatives aux transactions foncières et immobilières (Demandes de valeurs foncières DVF - DGFIP) sont désormais disponibles (sur le site Etalab depuis avril 2019) pour un certain nombre d'acteurs publics (collectivités, services de l'Etat, agences d'urbanisme, établissements publics fonciers), de même que les données des notaires. Depuis 2015, la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) assure, en s'appuyant sur le Cerema, un traitement de ces données qui vise à faciliter leur usage par les acteurs publics ( site data foncier).

- La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets dite « Climat et résilience » a par ailleurs renforcé les observatoires locaux du foncier et de l'habitat adossés aux programmes locaux de l'habitat (PLH), pour outiller les stratégies foncières du bloc communal28(*). Ces observatoires, qui sont généralisés, permettent d'analyser la conjoncture des marchés foncier et immobilier ainsi que l'offre foncière disponible pour permettre la production de logements à prix maîtrisés, tout en veillant à une gestion économe des espaces et à limiter l'artificialisation des sols. Ainsi, le bloc communal, avec l'appui de l'ingénierie des établissements publics fonciers (EPF) de l'Etat et locaux et des agences d'urbanisme dont les missions ont été complétées pour intégrer cet enjeu, pourra définir sa stratégie foncière à l'échelle de ses territoires de compétence grâce à la connaissance du marché, à l'identification des gisements pouvant faire l'objet d'une optimisation urbaine et des espaces non artificialisés à préserver. Les finalités et le contenu de ces observatoires ont été précisés par un décret29(*).

Aux échelles régionales et départementales, d'autres dispositifs d'observation existent, par exemple l'Observatoire Régional du Foncier en Ile-de-France (ORF), animés par les établissements publics fonciers, les services de l'Etat régionaux ou départementaux et les agences d'urbanisme.

De plus, afin de concourir à la bonne information des acquéreurs, l'administration fiscale met à disposition gratuitement sous forme électronique les prix des ventes immobilières et foncières sur le territoire national, Haut-Rhin, Bas-Rhin, Moselle et Mayotte exclus30(*).

La planification offre des leviers pour réguler le prix du foncier. La rédaction des documents d'urbanisme (tant en matière de zonage, de règlement que d'orientations d'aménagement ou de servitudes) peut en effet fortement influencer l'évolution de la valeur des terrains. Les documents d'urbanisme peuvent notamment déterminer le caractère urbanisable ou non de certains terrains et imposer des règles de hauteur et de gabarit, des emplacements réservés, des secteurs de mixité sociale ou plus généralement des servitudes qui ont un impact sur la valeur du foncier. En contrôlant l'ouverture à l'urbanisation des terrains et la définition des droits à construire, ils représentent un levier important pour peser sur la mise en oeuvre d'une stratégie foncière et immobilière ainsi que pour négocier, dès le départ, les caractéristiques des projets urbains avec les aménageurs ou les promoteurs. C'est pourquoi, les démarches de planification ont aujourd'hui de plus en plus intérêt à s'articuler avec celles de l'urbanisme opérationnel pour prendre en compte les impératifs économiques des opérations et pour ajuster la valeur du foncier avec les droits à construire, le coût de l'aménagement et de la construction et le prix de vente des constructions futures. Le document d'urbanisme, essentiellement le plan local d'urbanisme(PLU), éventuellement intercommunal (PLUi), et la carte communale dans une moindre mesure) peuvent notamment :

- doter la collectivité de leviers directs d'intervention en matière de maîtrise foncière (préemption, expropriation31(*), emplacements réservés32(*)) dans le but de réguler les prix du foncier et, le cas échéant, de capter une partie de la plus-value d'urbanisation ;

- modifier le règlement33(*) des zones constructibles et accorder des majorations de droits à construire34(*) pour augmenter la constructibilité des terrains et équilibrer plus facilement le bilan des opérations d'aménagement ou jouer sur les prix de sortie ;

- négocier directement ou indirectement avec les propriétaires et les aménageurs, en même temps, les modalités d'acquisition du foncier, d'ouverture à l'urbanisation des terrains et de réalisation du projet d'aménagement afin de trouver un accord gagnant-gagnant équitable et raisonnable.

Les collectivités territoriales, leurs groupements ou des établissements publics, voire éventuellement d'autres acteurs agissant pour leur compte, comme par exemple des sociétés publiques locales (SPL), peuvent également intervenir directement sur le marché foncier, en procédant à des acquisitions à l'amiable, par voie de préemption ou même par expropriation pour cause d'utilité publique, avec l'appui voire le contrôle du service des Domaines35(*). La constitution de réserves foncières (sous forme de zone d'aménagement différé - ZAD - ou déclaration d'utilité publique « réserve foncière ») permet ainsi de geler les prix du foncier, le temps de sa maîtrise par la puissance publique (d'où la constitution de réserves foncières « long terme »).

Les collectivités territoriales peuvent également appliquer une décote au prix de leur foncier privé qu'elles vont céder pour favoriser un projet d'intérêt général, principalement pour la production de logements sociaux ou intermédiaires36(*). Pour s'assurer qu'aucune spéculation ne sera réalisée par les bénéficiaires des dispositifs d'aides dans les années à venir, les actes de vente peuvent contenir des clauses dites « anti-spéculatives »37(*).

Les baux emphytéotiques de longue durée, et plus particulièrement ceux entrainant une dissociation du foncier du bâti, peuvent également permettre de conserver une maîtrise publique du foncier sur le long terme et de consentir des droits réels immobiliers à un coût moindre par rapport à une pleine propriété et au marché libre. L'intérêt de ce type de contrat a pris une dimension plus forte avec le régime des organismes de foncier solidaire (OFS), créés par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové dite ALUR. Ils s'appuient plus clairement sur le principe de la dissociation de la propriété foncière et bâtie qui est mis en oeuvre par le bail réel solidaire (BRS)38(*). Ce bail permet d'encadrer la cession des droits réels immobiliers pour des logements à des ménages modestes sous conditions de ressources. Grâce à la conservation de la propriété du foncier par l'OFS et la capacité de cession du BRS sous condition de ressources des ménages, ce dispositif permet ainsi de créer une offre de logement en accession sociale à la propriété durablement abordable dans la mesure où les prix de cession entre accédants successifs sont encadrés par le BRS. Ce dispositif a été consolidé avec la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale dite 3DS du 21 février 2022 et il a été élargi aux locaux d'activités avec l'ordonnance n° 2023-80 du 8 février 202339(*). Ce cadre a fortement inspiré le régime du bail réel d'adaptation à l'érosion côtière (BRAEC), créé par l'ordonnance n° 2022-489 du 6 avril 202240(*), pour lequel un des points essentiels est également de pouvoir éviter les effets spéculatifs compte tenu de la situation des biens concernés et de l'objectif d'intérêt général de recomposition des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte.

Les collectivités territoriales peuvent s'appuyer, en métropole et outre-mer, sur différents acteurs, comme les établissements publics fonciers (12 EPF/EPFA) les établissements publics fonciers locaux (25 EPFL) ou les 50 agences d'urbanisme.

Plusieurs rapports41(*) ont été remis aux gouvernements successifs, s'agissant de l'accès au foncier et de la lutte contre la spéculation foncière. Sur le plan juridique, ce type de mesures soulève des questions importantes car il peut en résulter, dans certains cas, une atteinte au droit de propriété, qui est notamment constitutionnellement garanti. Dès lors, les juges européens comme nationaux considèrent en général que l'atteinte au droit de propriété induit par ces dispositifs n'est acceptable que si elle présente un caractère proportionné et si elle peut se justifier par la poursuite d'un objectif d'intérêt général.

Sur les zones d'aménagement différé (ZAD)

La zone d'aménagement différé (ZAD)42(*) est une procédure mise en place pour une durée de six ans renouvelable, qui permet aux collectivités locales, via l'utilisation d'un droit de préemption particulier dans un périmètre défini, de s'assurer progressivement de la maîtrise foncière de terrains où il est prévu à terme une opération d'aménagement, et ainsi d'éviter que l'annonce de ce projet ne provoque une envolée des prix. En ce sens, l'objectif de faire échec à la spéculation foncière peut motiver la création d'une ZAD43(*). La contrepartie est un droit de délaissement au bénéfice des propriétaires qui s'impose à la collectivité44(*).

Actuellement, le délai de droit commun pour exercer le droit de préemption dans les ZAD est de six ans renouvelable à compter de la publication de l'acte qui a créé la zone. Il peut être d'une durée de dix ans dans le cadre des dispositifs de grande opération d'urbanisme (GOU)45(*) et des opérations d'intérêt national (OIN)46(*).

Sur le droit de préemption

Les droits de préemption constituent des outils d'acquisition foncière, à la disposition notamment des collectivités territoriales ou de leurs groupements. Il s'agit de la faculté donnée à une collectivité publique ou à un organisme d'acquérir prioritairement, dans certaines zones et en vue de certaines actions ou opérations d'intérêt général, des biens immobiliers mis en vente pour lesquels un acquéreur est pressenti.

Le droit de préemption, en particulier celui dit « urbain »47(*) (DPU) offre la possibilité à une collectivité locale, dans un périmètre prédéfini par elle en zone urbaine ou à urbaniser d'un document d'urbanisme, de se substituer à l'acquéreur éventuel d'un bien immobilier mis en vente, pour réaliser une action ou une opération d'aménagement, et dans certains cas un projet ou une opération de construction répondant à un motif d'intérêt général. Dans les territoires soumis au droit de préemption urbain, chaque propriétaire envisageant de céder un bien foncier ou immobilier doit déposer en mairie une déclaration d'intention d'aliéner (DIA) comprenant en particulier l'indication du prix de cession. Le titulaire ou le délégataire du droit de préemption dispose généralement d'un délai de deux mois à compter de la réception de cette DIA pour se prononcer. S'il décide d'exercer ce droit de préemption, le propriétaire du bien ne peut plus vendre son bien à l'acquéreur de son choix et aux conditions qu'il souhaite. L'acquéreur est alors évincé. Le titulaire du droit de préemption peut ne pas être d'accord avec le prix attendu par le vendeur et formuler une contre-proposition en ce sens. En cas de désaccord sur le prix, il revient au juge de l'expropriation (juge judiciaire) de trancher.

Le droit de préemption urbain (DPU) peut être renforcé par délibération de la commune, pour l'étendre à des cas particuliers d'aliénation, tels que celle « d'un ou plusieurs lots constitués soit par un seul local à usage d'habitation, à usage professionnel ou à usage professionnel et d'habitation, soit par un tel local et ses locaux accessoires, soit par un ou plusieurs locaux accessoires d'un tel local, compris dans un bâtiment effectivement soumis, à la date du projet d'aliénation, au régime de la copropriété, soit à la suite du partage total ou partiel d'une société d'attribution, soit depuis dix années au moins dans les cas où la mise en copropriété ne résulte pas d'un tel partage, la date de publication du règlement de copropriété au fichier immobilier constituant le point de départ de ce délai »48(*).

En l'état actuel du droit, le droit de préemption urbain (DPU) de droit commun et renforcé, défini à l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, est mobilisé pour les finalités décrites à l'article L. 300-1 du même code qui prévoit : « Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser la mutation, le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le recyclage foncier ou le renouvellement urbain, de sauvegarder, de restaurer ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti [...] ».

D'autres droits de préemption peuvent être mobilisés dans des cadres spécifiques, il s'agit de ceux « visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, à préserver la qualité de la ressource en eau et à permettre l'adaptation des territoires au recul du trait de côte, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement »49(*).

Ce droit peut être délégué à divers acteurs : Etat, collectivités territoriales ou leurs groupements, établissements publics y ayant vocation (EPF d'Etat /EPF locaux par exemple) ou des concessionnaires d'opération d'aménagement50(*). Il peut également être délégué à d'autres acteurs du logement (organismes de logement social - OLS) en vue de la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction permettant la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat ou déterminés en application du premier alinéa de l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation51(*). L'article L. 211-2 du code de l'urbanisme a été récemment complété avec l'ajout des organismes de foncier solidaire (OFS) en qualité de délégataires du droit de préemption urbain, pour leur objet principal, dans le cadre de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite 3DS.

L'article 22 de la récente loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement prévoit également un renforcement de cet outil en faveur des actions permettant de lutter contre l'habitat dégradé. Ainsi le DPU peut être délégué aux OLS et aux OFS en vue de la réalisation d'opérations programmées d'amélioration de l'habitat prévues à l'article L. 303-1 du même code, de plans de sauvegarde prévus à l'article L. 615-1 dudit code ou d'opérations de requalification de copropriétés dégradées prévues à l'article L. 741-1 du même code52(*). Et plus largement, le DPU peut être utilisé pour des actions de ces cadres opérationnels53(*), et être également délégué à un concessionnaire d'une opération d'aménagement mentionnée à l'article L. 300-4 ou d'actions mentionnées à l'article L. 300-10.

En l'état du droit, la régulation foncière n'est pas un motif en tant que tel qui peut justifier le recours à une préemption pour les droits prévus au code de l'urbanisme, qui n'est justifiée qu'en présence d'un projet54(*).

Toutefois, cet enjeu n'est pas étranger aux préoccupations d'urbanisme. Ainsi, l'étude du Conseil d'Etat, adoptée par l'Assemblée générale le 6 décembre 2007 et publiée en 2008, sur le droit de préemption (page 13) indique : « La jurisprudence a expressément reconnu que la préemption dans les zones d'aménagement différé pouvait être exercée « pour s'opposer à la spéculation foncière dans les zones où sont annoncées des opérations d'urbanisme [ ... ] dont la réalisation est prévue mais différée dans le temps »55(*) »56(*). En d'autres termes, la lutte contre la spéculation foncière peut justifier la mise en place de certains dispositifs dès lors qu'elle contribue à répondre à un objectif d'intérêt général et devenir par là un moyen pour y parvenir.

L'enjeu de lutte contre la spéculation foncière est intégré aux mécanismes propres au foncier agricole et plus particulièrement au travers des prérogatives des société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER), qui ont pour objet principal l'installation des exploitations agricoles et la maîtrise du marché foncier rural57(*). Les SAFER assurent la transparence du marché foncier rural et contribuent en ce sens à l'élaboration du barème national indicatif de la valeur vénale moyenne des terres agricoles qui est fixé annuellement (par décision du ministère en charge de l'agriculture publiée au JORF). Les SAFER ont par ailleurs été dotées d'un droit de préemption spécifique qui leur permet « d'imposer la mise en oeuvre de la politique de développement durable et d'écarter les volontés individuelles qui voudraient créer des structures qui n'y seraient pas conformes. Le droit de préemption permet aussi de réguler le marché et d'éviter la spéculation ». En vertu de l'article L. 143-3 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), lorsqu'elle décide d'exercer son droit de préemption, la SAFER doit, à peine de nullité, justifier sa décision par référence explicite et motivée à l'un ou à plusieurs des objectifs définis à l'article L. 143-2 du même code, parmi lesquels la « lutte contre la spéculation foncière ».

Sur les établissements publics fonciers (EPF)

Les établissements publics fonciers d'Etat58(*) ou locaux59(*) et les établissements publics fonciers et d'aménagement (EPFA)60(*) présents sur le territoire, peuvent être bénéficiaires de la délégation du droit de préemption urbain. Ils interviennent à l'échelle régionale, interdépartementale ou départementale.

Les EPF ont vocation, dans un périmètre donné et dans le cadre des missions définies par la loi, à acquérir puis à gérer (assurer la sécurité, le gardiennage, etc.) et éventuellement à remettre en état (déconstruction, dépollution, etc.) du foncier et à en assurer le proto-aménagement en amont de la réalisation de projets d'aménagement, avant de le rétrocéder à la collectivité (ou à l'opérateur ou aménageur qu'elle aura mandaté), dans le cadre d'une convention « à prix coûtant », voire avec une minoration du coût des travaux ou du foncier. Il existe actuellement dix EPF d'Etat en métropole et deux établissements publics fonciers et d'aménagement (EPFA) en Guyane et à Mayotte, sous tutelle du ministère en charge de l'urbanisme. Il existe également vingt-cinq EPF locaux contrôlés par les collectivités. Grâce à des extensions récentes de périmètres (EPF de Grand-Est en 2020, EPF de Hauts-de-France en 2021), près de 95% de la population française vit dans un territoire couvert par un établissement public foncier, qu'il soit d'Etat ou local. Le financement des EPF est assuré par une ressource fiscale dédiée, la taxe spéciale d'équipement (TSE), les produits de cessions de terrains et parfois par l'emprunt. A la suite de la réforme de la fiscalité locale, depuis 2021, la part de TSE prélevée sur la taxe d'habitation des résidences principales et la moitié de celle prélevée sur la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et la cotisation foncière des entreprises (CFE) des établissements dits `industriels' ont été supprimées. Cette diminution est intégralement compensée par le budget de l'Etat pour préserver les capacités d'intervention des EPF d'Etat et locaux.

Les EPF contribuent à développer l'offre de logements, notamment sur des secteurs tendus où le rythme de construction ou de réhabilitation est insuffisant pour répondre à la demande, ainsi que sur les territoires où la rétention pèse sur le marché par manque de foncier disponible61(*). Leur action permet enfin une régulation des valeurs foncières de référence, à l'échelle des périmètres du projet, et participe ainsi à la maîtrise de la spéculation foncière. Leurs missions ont été encore récemment renforcées dans le cadre de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte, en matière d'intervention pour les activités économiques et de renaturation par ailleurs62(*).

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le droit de préemption urbain est un dispositif à appréhender au regard du droit de propriété.

Le droit de propriété est garanti par l'article 2 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789. Les atteintes et limitations à ce droit doivent être justifiées par une nécessité publique conformément aux dispositions de l'article 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, soit par un intérêt général suffisant et proportionné à l'objectif d'intérêt général poursuivi (v. par exemple décision n° 2011-177 QPC du 7 octobre 2011 point 2 ; v. aussi décision n° 2019-830 QPC du 12 mars 2020 point 5).

Tout dispositif mis en place avec un risque d'atteinte à ce droit doit poursuive un but d'intérêt général, ce qui est le cas quand, par exemple, il tend à la maîtrise de l'occupation des sols et du développement urbain (v. décision n°2000-436 DC du 7 décembre 2000 point 15 ; v. aussi décision n°2011- 177 QPC précitée point 5) ou encore quand il poursuit un but de protection de l'environnement qui constitue un objectif à valeur constitutionnelle (v. n° 2019- 823 QPC du 31 janvier 2020, point 4). Le Conseil constitutionnel est attentif à garantir une protection du droit de propriété, si ce n'est identique, du moins équivalente à celle consacrée par la Convention européenne des droits de l'homme (CESDH).

Le Conseil constitutionnel s'est prononcé à plusieurs reprises sur la conformité au droit de propriété d'un droit de préemption. A chaque fois, il a examiné si le dispositif prévu par le législateur garantissait que son titulaire utiliserait le bien préempté conformément au motif d'intérêt général qui justifie la restriction apportée au droit de propriété du vendeur du bien préempté. Les rares cas où le Conseil constitutionnel a procédé à des déclarations d'inconstitutionnalité sont ceux où le législateur n'avait pas apporté une garantie suffisante pour que le droit de préemption soit effectivement utilisé en faveur de la finalité d'intérêt général pour laquelle il avait été créé (CC. QPC, 9 janvier 2018, n°2017-683).

Sur la question des garanties accordées en cas de dispositifs attentatoires au droit de propriété, la Cour de cassation a ainsi par exemple refusé de renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité au motif que les dispositions prévoyant un droit de préemption au profit des collectivités publiques instituent des garanties suffisantes (en particulier en matière d'indemnisation) à la protection du droit de propriété (cf. cass civ 3e 20/02/2014 n° 13-40-076 QPC)63(*).

L'intervention publique, en matière de maîtrise foncière publique, doit être observée également au regard de la liberté d'entreprendre et de la liberté contractuelle garanties par la Constitution. La liberté d'entreprendre et la liberté contractuelle découlent de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Le Conseil constitutionnel a énoncé en 2012 que le législateur peut y apporter des limitations « liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi » (v. décision n° 2012-242 QPC du 14 mai 2012).

Au regard des enjeux portés par la mesure du projet loi en matière de droit de préemption, il convient également de rappeler que, dans sa décision du 9 octobre 2014 n° 2014-701 DC, le Conseil constitutionnel a souligné, au point 21, le lien fort qui doit exister entre les missions des SAFER et les motifs pour lesquels elles peuvent exercer leur droit de préemption64(*).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

La conformité du projet à la jurisprudence du Conseil constitutionnel assure que le dispositif est également compatible avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la CEDH garantissant le droit de propriété65(*).Ce droit est également garanti par l' article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Il est notamment utile de rappeler que s'agissant de l'intervention publique et de l'indemnisation des biens, il est jugé que la valeur doit être estimée au moment où l'intéressé perd sa propriété, car une approche différente pourrait laisser place à une marge d'incertitude, voire d'arbitraire (CEDH, 22 décembre 2009, Guiso-Gallisay c. Italie n° 58858/00). La Cour EDH a ainsi eu l'occasion de censurer une législation imposant un plafond indemnitaire qui était la cause d'une disproportion manifeste entre la valeur de marché du bien exproprié et l'indemnité allouée (CEDH, grande chambre, 25 octobre 557 2012, Vistins et Perepjolkins c. Lettonie, n° 71243/01). Aucune mesure ne peut conduire à l'octroi d'une indemnité qui ne serait pas en rapport avec la valeur de marché du bien exproprié (CEDH, 28 novembre 2002, Ex-roi de Grèce et a. c/ Grèce, n° 25701/94). La Cour considère qu'un Etat ne peut alléguer de la difficulté à évaluer un bien pour lequel il n'existe pas de marché pour refuser de prendre en compte ses caractéristiques particulières et encadrer les possibilités d'évaluation de l'indemnité d'expropriation par le juge (CEDH, grande chambre, 19 février 2009, Kozacioglu c. Turquie, n° 2334/03).

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'augmentation voire l'inflation foncière est mesurable grâce à la mobilisation des données de vente, mises à disposition par les services de l'administration fiscale ; entre 2000 et 2022, les prix du foncier constructible ont triplé en zone tendue. Le foncier représente le principal poste de dépense dans une opération de production de logements (pouvant atteindre jusqu'à 50 % du coût d'une opération dans les territoires très tendus). Depuis quelques années, la hausse de son prix pèse fortement sur les bilans d'aménagement et de promotion et constitue un frein à la production de logements, notamment dans les zones tendues et dans les grandes opérations d'aménagement. Les initiatives de vente favorisant les transactions fortement bénéficiaires peuvent porter atteinte aux objectifs de mixité et de production de logements.

Il est aussi observable dans les zones moins denses, qu'une augmentation plus rapide des prix est constatable, de l'ordre d'une multiplication par sept sur la période 2000-2022, fragilisant notamment les opérations de revitalisation.

Pour répondre à ce constat, et ce tout en tenant compte des spécificités territoriales, la mobilisation de l'outil de préemption peut être un des moyens les plus adaptés pour permettre aux collectivités de réguler au cas par cas, et sous réserve de conditions strictes, les prix du foncier sur leur territoire et de pouvoir ainsi plus efficacement lutter contre la « spéculation foncière » en vue de répondre très précisément aux enjeux d'accès au logement.

Compte tenu des évolutions qui sont à apporter, notamment sur le respect du droit de propriété, il convient de prévoir des dispositions de nature législative, en vertu de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant : [...] -du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ; ».

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Dans le cadre de la restitution du Conseil national de la refondation (CNR) "logement" le 5 juin 2023, l'intention d'oeuvrer s'agissant de l'accès au foncier et la lutte contre la spéculation foncière a été annoncée. Le Président de la République a rappelé lors de la conférence de presse du 16 janvier 2024 que « le foncier est trop cher » pour conduire certaines opérations.

Compte tenu des enjeux liés au foncier et plus particulièrement à son coût dans le cadre des actions favorisant l'accès au logement, l'objectif est de renforcer les outils à la main des collectivités territoriales pour mieux maîtriser le foncier en :

- Prévoyant un délai supérieur pour la mobilisation du droit de préemption dans les ZAD ;

- Ajoutant temporairement un nouvel objet au droit de préemption urbain (DPU) pour permettre dans certains cas et sous certaines conditions de réguler le marché foncier dès lors que les prix sont excessifs et susceptibles de nuire à la politique d'accès au logement. L'intention de cette mesure est de sécuriser une pratique du droit de préemption en contestation de prix face à des prix qui seront considérés comme excessifs et pouvoir intervenir indépendamment de la définition d'une action ou opération d'aménagement par le titulaire du droit de préemption. Ce droit de préemption urbain pourra par exemple être utilisé pour dissuader ou éviter des références de prix spéculatives dans le quartier d'une future gare, fragilisant l'atteinte de l'objectif de mixité sociale du secteur, et ce même en l'absence d'un projet public d'aménagement sur ce périmètre. A défaut d'accord amiable, le prix d'acquisition sera fixé, comme dans le droit commun, par le juge de l'expropriation, qui révèlera la valeur vénale du bien.

Cette nouvelle étape doit permettre d'enrichir les dispositifs à la main des collectivités territoriales et des acteurs intervenant à leurs côtés pour répondre aux besoins locaux en matière de logement et plus spécifiquement pour atteindre les objectifs fixés dans ce domaine.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il a notamment été envisagé concernant le renforcement du droit de préemption en faveur de la régulation foncière et immobilière de prévoir :

- Un dispositif pérenne. Toutefois, compte tenu du caractère très spécifique de ce renforcement, il est proposé de s'en tenir dans un premier temps à une première période d'application, pour en évaluer les effets ;

- De ne pas prévoir de cas de cessions. Cependant, il s'agit d'une condition permettant de justifier du recours au droit de préemption en la matière, et ce notamment pour garantir l'accès au logement. Par ailleurs, il a été envisagé de restreindre les cessions aux organismes de logement social et OFS dans un délai de cinq ans. Mais il convenait de préciser l'alternative au-delà de ce délai et le sort du bien en cas de cession n'ayant pu intervenir dans les délais impartis auprès de ces bénéficiaires.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Pour participer aux objectifs portés par le présent projet de loi, il est donc proposé de :

- Faciliter la mobilisation des zones d'aménagement différé (ZAD) en prévoyant un délai de dix ans au lieu de six ans, dans tous les cas et donc en ne le limitant plus aux GOU et OIN ;

- De permettre à titre temporaire (sept ans), de mobiliser le droit de préemption urbain (DPU), outil en principe à la main du bloc communal, pour concourir à la régulation des marchés du foncier et de l'immobilier bâti afin de contribuer aux objectifs d'accès au logement et de mixité sociale, et ce sans que la préemption ne s'appuie sur un projet prédéfini par le titulaire de ce droit, comme l'exige le recours au DPU. Au regard de l'atteinte portée au droit de propriété66(*), à la liberté contractuelle et à la liberté d'entreprendre, constitutionnellement garantis, cette faculté serait notamment conditionnée :

o à la délimitation préalable de secteurs en ce sens, dans des conditions précisées par la loi et précisées par un décret en Conseil d'Etat ;

o au constat d'un prix excessif, à partir de données de référence et compte tenu notamment des conjonctures appréciées par un observatoire local de l'habitat et du foncier lorsqu'il existe ;

o et à une obligation de cession dans un délai de cinq ans pour répondre spécifiquement à certains enjeux en matière de logement et de mixité sociale, et seulement pour des bénéficiaires qualifiés dans ces domaines d'intervention (OLS, OFS). Si la cession dans ce délai n'est pas possible, le titulaire du droit de préemption peut le céder à un autre bénéficiaire, sous réserve que cette cession réponde, au vu de l'utilisation envisagée par celui-ci, aux mêmes objectifs. Au-delà de ce délai de huit ans, le bien est en priorité rétrocédé dans les conditions de droit commun prévues pour le DPU67(*).

Compte tenu du rôle qu'ils assurent déjà auprès des collectivités en matière de stratégie foncière, les établissements publics fonciers (EPF) d'Etat et locaux et les établissements publics fonciers et d'aménagement (EPFA) pourraient se voir déléguer ce DPU ayant pour objet la régulation des marchés du foncier et de l'immobilier bâti ; et mobiliser une partie de leurs ressources -la taxe spéciale d'équipement (TSE)- en ce sens. L'intervention de ces acteurs permet notamment de garantir le modèle économique du dispositif.

Les dispositions du II entreront en vigueur à une date fixée par le décret en Conseil d'Etat prévu à ce paragraphe, et au plus tard le 1er janvier 2026.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La mesure envisagée modifie les articles L. 102-15, L. 212-2, L. 212-2-1 et L. 312-6 du code de l'urbanisme.

Par ailleurs, elle porte une mesure temporaire non codifiée relative à l'exercice du droit de préemption urbain ayant pour objet la régulation des marchés du foncier et de l'immobilier bâti dans certaines conditions.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Les conditions encadrant les dispositifs qui évoluent ou sont mis en place par l'article 3 du projet de loi, visent à veiller au respect des exigences prévues au niveau européen, telles qu'elles sont susmentionnées au 1.3.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La mesure envisagée doit permettre de contribuer à enrayer des tendances inflationnistes sur les prix du foncier, tout particulièrement dans les secteurs les plus tendus, et dans lesquels l'accès à un logement abordable est contraint, rendu plus difficile voire impossible pour certains ménages ne disposant pas de ressources suffisantes. La maitrise au cas par cas de la régulation foncière devrait permettre de rééquilibrer les bilans d'aménagement et de promotion et lever ce frein à la production de logements en zones tendues et dans les grandes opérations d'aménagement.

L'impact du dispositif sera à apprécier à terme par l'analyse des prix de marchés constatés une fois que le droit de préemption utilisé en matière de régulation foncière sera pleinement opérationnel. Une stagnation voire une baisse des prix de ventes des biens immobiliers dans les secteurs tendus devrait être constatée

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Des entreprises peuvent être ponctuellement concernées dans des cas de préemption.

Par ailleurs, la mesure vise à favoriser des actions pouvant mobiliser ensuite l'intervention de diverses entreprises pour la réalisation de logements. En ce sens, elle aura un impact positif sur les entreprises, d'une part, en ce qui concerne l'activité directe générée par les études et les travaux, en particulier pour les acteurs du bâtiment et de la construction et, d'autre part, en ce qui concerne la dynamique économique qui sera créée dans les territoires concernés par ces démarches.

4.2.3. Impacts budgétaires

Cette mesure n'entraîne aucune dépense budgétaire supplémentaire directe.

Cependant, les actions visées pourront nécessiter que l'État et ses établissements publics partenaires, les collectivités territoriales et leurs groupements et le cas échéant d'autres acteurs publics et privés impliqués, prévoient des participations financières pour mettre en oeuvre les outils concernés. Ces participations sont néanmoins difficiles à évaluer, car elles dépendent de chaque opération et le dispositif est très libre pour s'adapter à chaque contexte et à différents niveaux d'engagement des partenaires.

Plus spécifiquement sur le renforcement du droit de préemption en faveur de la régulation foncière et immobilière, le financement des interventions foncières et immobilières - notamment par exercice du droit de préemption qui leur a été délégué - par les EPF est assis sur la collecte de la taxe spéciale d'équipement (TSE) dans les conditions prévues aux articles 1607 bis et 1607 ter du code général des impôts. Ces articles fixent un plafond maximal de 20€/habitant.

Un second plafond, qui s'applique uniquement aux EPF d'Etat/EPFA, est défini chaque année en loi de finances pour chacun des EPF d'État/EPFA. En 2023, le plafond en loi de finances a été fixé à 303,7 M€ bruts soit 276,4 M€ nets de frais d'assiette et de recouvrement.

La création de cette nouvelle possibilité d'utilisation du droit de préemption emporte donc des dépenses supplémentaires pour les EPF. Il est expressément prévu que la TSE peut couvrir, en tout ou en partie, le financement des préemptions ayant pour objet de concourir à la régulation des marchés fonciers et immobiliers. De plus, la finalité d'action de la mesure consiste en l'acquisition de biens dans des zones tendues où, du fait même de la spéculation, les prix du foncier sont plus élevés en moyenne. Il apparait dès lors qu'un réhaussement du plafond en loi de finances sera sans doute nécessaire.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le renforcement du dispositif de ZAD et du DPU permet aux collectivités territoriales et leurs groupements de faciliter ou de poursuivre leurs actions en matière d'amélioration du cadre de vie, d'aménagement de leur territoire et surtout pour répondre aux enjeux liés à l'accès au logement en veillant davantage aux prix du foncier.

Les évolutions apportées contribuent également aux outils mis à disposition pour répondre aux éventuels objectifs locaux en matière d'habitat, qui sont par exemple fixés par un programme local de l'habitat.

Les collectivités territoriales pourront s'appuyer sur les acteurs qui les accompagnent, comme les EPF (lesquels pourront mobiliser les recettes fiscales de la taxe spéciale d'équipement), les agences d'urbanisme, ou encore les services de l'Etat et ceux qui interviennent dans le secteur du logement (comme les OFS), en particulier du logement social (OLS).

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Il n'y a pas d'impact direct sur les services administratifs, si ce n'est quant à leur association dans la mise en oeuvre des dispositifs visés et plus particulièrement sur le contrôle de légalité exercé.

En effet, les modalités de mise en oeuvre des ZAD et du DPU n'évolueront pas considérablement et la mise en place du DPU sur de nouveaux secteurs restera circonscrite à des secteurs à fort enjeu ce qui n'entrainera pas une surcharge de travail pour les services de l'Etat et des collectivités locales. Par ailleurs, l'instruction des déclarations d'intention d'aliéner (DIA) issues de ces nouvelles préemptions pourra être déléguée aux opérateurs impliqués.

Les services de l'Etat, plus particulièrement du ministère en charge de l'urbanisme, pourront évaluer les conditions d'application de cette mesure temporaire.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La mesure bénéficiera au plus grand nombre puisqu'elle permettra une production de logements à des prix plus abordables.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La proposition a un impact directement sur les particuliers et les propriétaires-vendeurs dans les secteurs de préemption « spéculation foncière ». A l'identique d'autres droits de préemption, notamment le droit de préemption urbain exercé au regard des dispositions du L 300-1 du code de l'urbanisme et auquel ce nouveau cadre du DPU se substituera, les droits des propriétaires seront respectés (délais, conditions de fixation du prix, etc.) et l'atteinte à ceux des potentiels acquéreurs sera proportionnée au vu des enjeux poursuivis. L'atteinte au droit de propriété ou à la liberté contractuelle présente un caractère proportionné et se justifie par la poursuite d'un objectif d'intérêt général d'un choc d'offre de logements en réponse à une demande des citoyens et des besoins très forts.

Les garanties de droit commun pour préserver les intérêts des particuliers, qui sont prévues en matière de préemption, seront applicables.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Ces évolutions du droit de préemption s'exerçant dans le périmètre des zones urbaines ou d'urbanisation future contribuent également dans un objectif de renouvellement urbain, de mixité sociale voire de maintien d'une mixité fonctionnelle.

Cette mesure s'inscrit dans l'ensemble des dispositifs mis en place en faveur de la lutte contre l'étalement urbain et la lutte contre l'artificialisation des sols.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R*361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions de I entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française. En vertu du III du présent article, les dispositions du II entrent en vigueur à une date fixée par le décret en Conseil d'Etat prévu à ce paragraphe, et au plus tard le 1er janvier 2026.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure sera applicable de plein droit sur l'ensemble du territoire national, y compris dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution à savoir la Guyane, Mayotte, la Guadeloupe, la Martinique et la Réunion. Cette disposition ne s'applique pas aux autres collectivités ultramarines notamment celles régies par l'article 74 de la Constitution.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article nécessite un décret en Conseil d'Etat.

CHAPITRE II - SIMPLIFIER ET ACCÉLÉRER LES PROCÉDURES

Article 4 - Réduire les délais de recours

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les mesures relatives aux contentieux de l'urbanisme68(*) s'inscrivent dans le cadre de la lutte contre les recours abusifs69(*) dans ce domaine et des objectifs de raccourcissement des délais d'instruction de ces recours70(*).

Le déclenchement du délai de recours contre une autorisation d'urbanisme, qui est de deux mois, est subordonné à l'affichage sur le terrain du permis ou de la déclaration préalable ( article R. 600-2 du code de l'urbanisme).

En droit de l'urbanisme, le recours contre une autorisation d'urbanisme présente la particularité d'être bloquant pour une opération de construction. Ainsi, bien qu'en droit l'autorisation soit exécutoire une fois accordée et le recours ne soit pas suspensif, en réalité, tant que l'autorisation n'est pas purgée de tout recours, les notaires hésitent à finaliser la vente et les banques à débloquer les financements au regard du risque, parfois très faible, d'annulation de l'autorisation et de ses conséquences pour les constructeurs (promoteurs, bailleurs sociaux...) et les acquéreurs des biens à bâtir. En cas de recours, le projet de construction n'est donc pas lancé en général et le constructeur renonce alors à l'acquisition du terrain dans l'attente du jugement du recours. Par ailleurs, les vendeurs de terrains ne sont souvent pas en capacité de patienter jusqu'au jugement et les clients intéressés par ces opérations sont contraints d'abandonner ces projets d'acquisition, le délai de validité de leur offre de prêt ou leurs contraintes de déménagement n'étant pas compatibles avec le délai de jugement du recours. Ces recours renchérissent le coût des opérations de construction et impactent au final la production de logements, objectif national de première importance.

Le contentieux des autorisations d'urbanisme se caractérise aussi par le développement des recours contre les refus, alors que plusieurs facteurs se conjuguent pour réduire l'appétence des maires pour l'acte de produire des logements, notamment l'hostilité croissante des habitants à la densification de leur environnement.

Pour ces raisons, le régime du contentieux de l'urbanisme fait l'objet de demandes récurrentes de réforme de la part des acteurs économiques, dont les promoteurs, et a fait l'objet de nombreux rapports et études dans les années récentes71(*). En outre, si plusieurs mesures législatives ou, pour les plus récentes72(*) règlementaires, ont déjà permis des avancées significatives dans le domaine de la gestion et du traitement des contentieux, certains de ses aspects méritent une nouvelle intervention.

Ainsi, à ce jour, lorsqu'une personne souhaite contester une décision administrative, telle qu'un permis de construire, elle peut demander à l'autorité qui a pris la décision, de la retirer. Il s'agit d'un recours gracieux, qui a par ailleurs pour effet de reporter le délai dans lequel un recours contentieux peut être introduit devant la juridiction administrative, le temps que l'autorité administrative réponde. Le délai de réponse de l'autorité administrative étant de deux mois, le recours contentieux peut être introduit jusqu'à près de six mois après la décision en cause.

Le délai de recours gracieux des tiers démarre à compter du premier jour d'affichage de l'autorisation sur le terrain alors que celui des destinataires démarre à compter de la notification qui leur est faite de la décision.

Par ailleurs, s'agissant des référés-suspension, le code de l'urbanisme (article L. 600-3) dispose que la condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du code de justice administrative pour engager une action en référé suspension contre une autorisation de construire est présumée satisfaite. En effet, compte tenu des effets de l'autorisation d'urbanisme qui est directement exécutoire et des atteintes souvent irréversibles que sa mise en oeuvre porte à l'état des lieux par la réalisation des constructions autorisées, il est nécessaire que le juge administratif puisse intervenir rapidement pour suspendre l'autorisation le cas échéant73(*). Cette disposition ne s'applique pas au référé suspension contre un refus de permis de construire ni contre un refus de permis d'aménager ni contre une décision d'opposition à déclaration préalable alors que la condition d'urgence est nécessaire pour permettre au juge de suspendre le refus d'autorisation.

Ainsi les refus non justifiés ne peuvent être examinés en référé que si la condition d'urgence est démontrée par le pétitionnaire, retardant ainsi l'obtention de l'autorisation et la mise en chantier du projet.

En terme de volume d'affaires, les rapports de l'activité juridictionnelle et consultative des juridictions administratives font état des données suivantes :

ACTIVITE GENERALE JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES - NOUVEAUX CONTENTIEUX OUVERTS

Juridiction

2022

2021

2020

2019

2018

   

TA

241 187

241 384

210 514

231 280

213 029

   

CAA

30 446

34 012

30 229

35 684

33 773

   

CE

9 772

11 313

10 034

10 216

9 563

   
               

ACTIVITE URBANISME ET ENVIRONNEMENT - NOUVEAUX DOSSIERS - EN VOLUME ET EN % DU TOTAL

   
 

2022

2021

2020

2019

2018

   

TA

14 388 (6%)

13 820 (5,7%)

12 661 (6%)

12 330 (5%)

11 585 (5,4%)

 

CAA

1 827 (6%)

2 123 (6,2%)

1 977 (6,5%)

2 274 (6%)

2 308 (6,8%)

   

CE

810 (8,3%)

812 (7,2%)

866 (8,6%)

913 (8,94%)

845 (8,84%)

   
               

Le contentieux des autorisations des sols représente environ les 3/4 de ces affaires.

 
               
               

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le recours gracieux en droit de l'urbanisme n'est pas un recours administratif préalable obligatoire (il n'est pas nécessaire avant l'introduction d'un recours devant les juridictions).

Le droit au recours juridictionnel effectif est de nature constitutionnelle et découle de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 en tant qu'il mentionne la garantie des droits (décision n° 96-373 DC du 9 avril 1996). La bonne administration de la justice constitue également un objectif de valeur constitutionnelle qui découle des articles 12, 15 et 16 de la Déclaration de 1789. En vertu des articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789, le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s'appliquent, à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales.

L'instauration d'une présomption d'urgence va dans le sens d'une facilitation du recours en référé suspension.

Le raccourcissement des délais dans lesquels les recours gracieux peuvent être introduits et dans lesquels ils doivent être traités est sans incidence sur le droit des justiciables, dont le droit d'accès au juge et d'exercice d'un recours juridictionnel effectif, n'est pas modifié. Il en est de même de la suspension du caractère suspensif des recours gracieux ou hiérarchique qui ne fait que placer le requérant concerné dans la situation classique d'un délai de recours contentieux de deux mois.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le droit à un recours juridictionnel effectif est garanti par l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et par l'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

L'instauration d'une présomption d'urgence va dans le sens d'une facilitation du recours en référé suspension.

Le raccourcissement des délais dans lesquels les recours gracieux peuvent être introduits et dans lesquels ils doivent être traités ainsi que la suppression de leur caractère suspensif du délai recours juridictionnel, est sans incidence sur le droit des justiciables, dont le droit d'accès au juge et d'exercice d'un recours juridictionnel effectif n'est pas modifié. Il en est de même de la suspension du caractère suspensif des recours gracieux ou hiérarchique qui ne fait que placer le requérant concerné dans la situation classique d'un délai de recours contentieux de deux mois.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1 NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les procédures régissant l'articulation entre les recours gracieux et les recours contentieux les organise de manière successive. Il en résulte des délais d'introduction qui peuvent permettre de saisir la juridiction jusqu'à près de six mois après que l'autorisation d'urbanisme a été délivrée. Ces délais sont préjudiciables à la réalisation des projets immobiliers, notamment dans le contexte actuel de crise du logement du pays, nécessitant que les autorisations d'urbanisme puissent être mises en oeuvre de manière sécurisée et rapide. Il faut ensuite ajouter à ces délais, ceux du traitement des affaires par les juridictions qui sont, au regard des délais moyens de jugement des affaires, de 48 mois dans l'hypothèse d'un contentieux avec pourvoi en cassation et jugement définitif par la cour administrative d'appel en tant que juridiction de renvoi et de 54 mois dans l'hypothèse d'une seconde cassation74(*).

Ces procédures sont régies par les dispositions législatives du code des relations entre le public et l'administration :

- L'article L. 411- 2 précise le délai dans lequel un recours gracieux peut être introduit et que ce recours interrompt le cours du délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux ;

- L'article L. 411-7 précise quant à lui le délai au terme duquel le silence de l'administration vaut décision implicite de rejet.

L'extension de la présomption d'urgence aux décisions de refus d'une autorisation d'urbanisme nécessite l'introduction de dispositions complémentaires à celles de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme qui organise le recours en référé-suspension pour les autorisations d'urbanisme.

OBJECTIFS POURSUIVIS

S'agissant du recours gracieux, l'objectif est d'une part de raccourcir les délais dans lesquels le recours gracieux peut être introduit et dans lesquels l'autorité administrative peut répondre et, d'autre part, de mettre fin au caractère suspensif de ce recours. Ainsi, le recours contentieux devra impérativement être introduit dans un délai de deux mois après l'affichage de la décision d'urbanisme, alors qu'il peut être introduit jusqu'à près de six mois après cet affichage actuellement. Cette proposition permet également le maintien de l'articulation existante entre les deux types de recours et laisse ainsi la possibilité au recours gracieux de produire ses effets et d'éviter un recours contentieux.

L'extension de la présomption d'urgence aux refus d'autorisation d'urbanisme permettra de limiter l'analyse du juge aux motifs évoqués dans la décision et de rendre directement opérationnelle la décision du juge qui aboutirait le cas échéant à l'obtention d'une autorisation d'urbanisme en se concentrant sur les éléments de la légalité du refus. En effet, il convient de rappeler que les décisions suspendant une décision ont un caractère exécutoire. Il en résulte que tant qu'il n'a pas été mis fin à cette décision du juge (par exemple par l'intervention du jugement au fond), l'administration ne peut reprendre une même décision sans qu'il ait été remédié au vice que le juge des référés avait pris en considération pour prononcer la suspension. En outre, lorsque le juge des référés prononce la suspension d'un refus il peut, par la même décision, enjoindre à l'administration de procéder au réexamen de la demande ayant donné lieu à ce refus. L'administration doit également procéder à ce réexamen sur demande du pétitionnaire. Et, lorsque le juge des référés a reconnu qu'il existait un doute sérieux quant à la légalité de ce refus, l'autorité administrative ne peut, eu égard à la force obligatoire de l'ordonnance de suspension, et sauf circonstances nouvelles, rejeter de nouveau la demande en se fondant sur les motifs en cause.75(*) Cette mesure permet également l'unification des régimes, en réduisant l'écart entre le régime du contentieux du permis de construire et celui du refus. De la même manière que pour le régime contentieux de l'autorisation, la présomption d'urgence qui sera instituée pour le refus d'autorisation ne sera pas irréfragable (Conseil d'Etat, 26 mai 2021, 436902) et pourra donc être contestée le cas échéant par le défendeur.

Ces deux évolutions constituent un signal fort envoyé aux acteurs de la production de logements, dans le sens d'une réduction des délais de recours.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La possibilité pour les personnes physiques mais surtout les personnes morales d'introduire un recours contentieux à l'encontre d'une autorisation d'urbanisme est déjà encadrée par plusieurs articles de loi76(*). A ce stade, il n'a pas été envisagé d'en durcir encore les conditions.

Plusieurs composantes procédurales relatives au contentieux de l'urbanisme, telles que les délais de jugement ou encore le double degré de juridiction, ont récemment fait l'objet de modifications en faveur du raccourcissement des délais de traitement des contentieux. Les acteurs de la construction ont souligné l'efficacité des mesures déjà adoptées. Il n'a donc pas été envisagé d'accroître le sens des mesures déjà prises, sous peine de risquer de porter atteinte au droit au recours des justiciables ou de nuire au fonctionnement des juridictions administratives. Le choix est donc fait de cibler les éléments de procédure n'ayant pas encore fait l'objet d'évolutions.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le projet de loi envisage de compléter ponctuellement les dispositions législatives existantes d'une part en raccourcissant et en articulant de manière plus efficace les délais de recours gracieux et de recours contentieux et, d'autre part, en facilitant le traitement contentieux des refus d'autorisation d'urbanisme.

En ce sens, le dispositif retenu raccourcit le délai dans lequel le recours gracieux peut être introduit et dans lequel l'autorité administrative peut répondre. Il met également fin au caractère suspensif du recours gracieux.

En outre, le dispositif prévoit que l'urgence est présumée dans le cas d'un recours en référé-suspension à l'encontre d'une autorisation d'occupation du sol.

Les dispositions relatives à la présomption d'urgence s'appliqueront aux référés suspension introduits à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi. Celles relatives aux recours administratifs s'appliqueront aux décisions prises à compter du premier jour du deuxième mois suivant l'entrée en vigueur de la loi.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article prévoit la création d'un nouvel article L. 600-14 relatif au recours gracieux, ainsi que d'un article L. 600-3-1 relatif au référé-suspension.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Le raccourcissement des délais de recours gracieux, la suppression du caractère suspensif de ce dernier ainsi que la présomption d'urgence pour les recours en référé-suspension à l'encontre d'une décision de refus d'autorisation d'urbanisme ne sont pas de nature à porter atteinte au droit à un recours effectif garanti par l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et par l'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Cette mesure contribuera à l'accélération de la mise en chantier des constructions. Le gain de temps résultant de la mesure, de quatre mois, permet également un gain économique, de l'ordre de 3% environ du coût total du projet 77(*).

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La mesure aura un impact positif sur l'activité des entreprises dès lors qu'elle a pour objet de limiter les retards de mise en chantier liés aux différents recours à l'encontre des autorisations d'urbanisme d'une part, et de permettre de suspendre les effets des refus d'autorisation d'urbanisme non fondés.

4.2.3. Impacts budgétaires

Cette mesure n'aura pas d'impact budgétaire.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'autorité compétente pour la délivrance des autorisations d'urbanisme est, la plupart du temps, le maire au nom de la commune. La limitation du délai de réponse de l'autorité administrative à un recours gracieux aura donc pour conséquence de raccourcir le délai dans lequel le maire peut décider de donner suite à ce recours. Il convient toutefois de rappeler qu'en matière de recours gracieux, l'absence de réponse de l'autorité compétente n'a pas pour effet de faire naître une décision favorable. En outre, sans que cela ne puisse être précisément chiffré, la plupart des recours gracieux donnent lieu à une décision implicite et non une décision expresse.

Cette mesure ne crée donc pas de charges supplémentaires pour les collectivités.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les impacts sur les services administratifs sont identiques aux impacts sur les collectivités. L'autorité compétente de l'Etat n'étant pas l'autorité compétente de droit commun, les effets ne se produiront que lorsque l'autorisation d'urbanisme est délivrée au nom de l'Etat. Les agents des services chargés d'examiner les recours gracieux devront rendre leur instruction dans un délai inférieur à un mois de manière à permettre à l'autorité compétente de rendre sa décision dans le délai d'un mois à compter de la saisine du requérant.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La mesure aura un impact positif sur la société dès lors qu'elle a pour objet de limiter les retards de mise en chantier liés aux différents recours à l'encontre des autorisations d'urbanisme d'une part, et de permettre de suspendre les effets des refus non fondés d'autorisation d'urbanisme. La production de logements et d'autres bâtiments nécessaires à la vie économique et sociale s'en trouvera ainsi améliorée.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Cette mesure n'aura pas d'impact sur les personnes en situation de handicap.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure aura un impact positif sur les particuliers porteurs de projet ainsi que sur les particuliers souhaitant se porter acquéreurs d'un logement neuf réalisé par un promoteur, dès lors qu'elle a pour objet de limiter les retards de mise en chantier liés aux différents recours à l'encontre des autorisations d'urbanisme d'une part, et de permettre de suspendre les effets des refus non fondés d'autorisation d'urbanisme. La production de logements et d'autres bâtiments nécessaires à la vie économique et sociale s'en trouvera ainsi améliorée.

En revanche, la mesure contraindra les particuliers, auteurs de recours, qui disposeront d'un délai raccourci pour saisir l'autorité administrative compétente.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Cette mesure n'aura pas d'impact environnemental.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions relatives à la présomption d'urgence s'appliqueront aux référés suspension introduits à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi. Celles relatives aux recours administratifs s'appliqueront aux décisions prises à compter du premier jour du deuxième mois suivant l'entrée en vigueur de la loi.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure proposée s'applique à l'ensemble des territoires de la République soumis aux dispositions du code de l'urbanisme. Elle ne s'applique pas aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques française.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

Article 5 - Faciliter la transformation urbaine des zones pavillonnaires et des zones d'activité économique

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Chaque année, 24000 hectares d'espaces naturels, agricoles et forestiers sont urbanisés en moyenne en France. Cette consommation est majoritairement constatée dans les secteurs périurbains et ruraux peu denses, avec des formes urbaines très peu denses (moins de 8 logements par hectare - sources Cerema78(*)). Cet étalement urbain a des incidences écologiques, mais également des incidences socio-économiques, en augmentant les distances de transports contraints et la dépendance à la voiture individuelle.

Le cadre législatif a peu à peu évolué pour intégrer l'enjeu de sobriété foncière. En effet, la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (dite loi SRU) et les lois n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement et n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dites lois Grenelle 1 et 2, ont intégré dans le code de l'urbanisme l'enjeu de modération dans la consommation des espaces. La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et à un urbanisme renouvelé (dite loi ALUR) a réaffirmé l'objectif de réduction de la consommation d'espaces et imposé une justification renforcée des surfaces consommées. La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement de l'aménagement et du numérique (dite loi ELAN) a inscrit l'objectif de lutte contre l'étalement urbain dans les principes généraux de l'urbanisme qui s'imposent aux collectivités comme à tout acteur de l'aménagement.

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets dite « Climat et résilience » a renforcé la traduction de cet enjeu de sobriété foncière dans les documents de planification et d'urbanisme en inscrivant la lutte contre l'artificialisation des sols parmi les objectifs généraux de l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme. Pour atteindre l'objectif national d'absence de toute artificialisation nette des sols (objectif du « zéro artificialisation nette » des sols ou ZAN) d'ici 2050 et mettre en oeuvre la trajectoire de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers, et du rythme de l'artificialisation des sols menant au ZAN, les collectivités doivent favoriser l'aménagement et le développement des espaces déjà urbanisés, optimiser la densité du tissu urbain existant, avant de prévoir l'ouverture à l'urbanisation de nouveaux espaces naturels, agricoles ou forestiers79(*).

En effet, la tache urbaine a été multipliée par 5 de 1955 à 2005 (source : Agence d'urbanisme de l'agglomération de Tours - ATU) dans nombre de territoires. La majorité des tissus urbains constitués sont occupés de façon peu dense, par des fonctions diverses. La transformation des espaces déjà urbanisés, le recyclage du foncier déjà artificialisé ou l'optimisation de la densité des espaces déjà urbanisés ne sont pas toujours favorisés par les règles d'urbanisme ou les documents d'urbanisme, alors même que plus de la majorité des surfaces consommées l'ont été par des formes urbaines peu efficaces pour économiser le foncier, et qui par conséquent peuvent constituer des gisements pertinents pour l'avenir pouvant répondre à 80% des besoins fonciers pour la construction.

Les tissus urbains peu denses tels que les zones pavillonnaires, constituent un gisement important de revitalisation et de potentielle intensification de l'existant. Depuis 30 ans, ces zones qui représentent 56% du parc de logements en France, font l'objet de beaucoup de débats sans pour autant bénéficier d'une action publique coordonnée et ciblée. La division parcellaire de parcelles des lotissements des années 70 est devenue le mode de production foncière majoritaire (en permis de construire de maisons individuelles).

C'est également le cas des zones d'activités économiques (ZAE) qui présentent un fort potentiel d'optimisation foncière. Elles représentent une part importante des surfaces urbanisées et artificialisées du territoire national : selon le CEREMA80(*), il existerait jusqu'à 32 000 ZAE réparties sur le territoire national qui représenteraient environ 450 000 hectares. Intervenir sur les ZAE, en particulier lorsqu'elles sont dégradées voire obsolescentes, peut permettre d'optimiser l'usage du foncier pour optimiser la densité de ces zones avec de nouvelles implantations industrielles ou commerciales, favoriser la mixité fonctionnelle et notamment construire des logements en renouvellement urbain, réaliser des équipements publics nécessaires, installer des unités de production d'énergie renouvelable ou encore renaturer certaines parcelles. Les ZAE concentrent des ressources urbanistiques à réhabiliter, à densifier et à intensifier pour les collectivités territoriales.

Pour encourager la gestion économe de l'espace et la lutte contre l'artificialisation des sols, la loi Climat et résilience, a prévu diverses dispositions pour mieux identifier et, le cas échéant, pouvoir restructurer les ZAE. A cet effet, elle a créé dans le code de l'urbanisme, parmi les dispositions relatives aux opérations d'aménagement, une nouvelle section dédiée à ces zones.

Pour assurer l'entretien, la gestion, voire le recyclage des ZAE existantes, la loi prévoit tout d'abord d'en renforcer la connaissance par la réalisation d'inventaires. Réalisés par les EPCI à fiscalité propre, ces inventaires portent sur l'identification des ZAE, leur occupation, leur état et leur taux de vacance. L'inventaire constitue donc un outil à disposition des collectivités qui leur permet de bénéficier d'une base objective d'informations et d'élaborer les documents d'urbanisme cohérents avec la stratégie régionale de développement économique, et le cas échéant l'adaptation des documents de planification communaux et intercommunaux, à l'aune des objectifs de lutte contre l'étalement urbain et d'absence d'artificialisation nette des sols (ZAN). A ce titre, les inventaires seront par exemple pris en compte pour les analyses menées par les observatoires de l'habitat et du foncier81(*) ou encore pour l'identification de zones d'accélération pour l'implantation d'installations terrestres de production d'énergies renouvelable82(*), afin de valoriser les ZAE présentant un potentiel pour leur développement. Sur le plan opérationnel, ces inventaires doivent constituer une base pour l'élaboration de stratégies d'intervention des collectivités locales leur permettant, le cas échéant, de déclencher des actions ou opérations de traitement et de requalification nécessaires. Elles pourront être engagées en fonction de l'état d'obsolescence de ces ZAE et des priorités de développement local, notamment dans le cadre des diverses démarches de réappropriation de ces gisements fonciers (politique de réindustrialisation, groupes de travaux pour la transformation des zones commerciales ... qui s'ajoutent aux réflexions existantes pour y réaliser des programmes de logements afin de favoriser la mixité fonctionnelle de ces zones). La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte a permis de renforcer encore les moyens d'intervention sur ces zones, en particulier en faveur de l'implantations d'industries.

Outre les évolutions législatives, plusieurs démarches ont été engagées ces dernières années, depuis le « Lab Périrubain83(*) » du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) en 2016, la session nationale de l'Atelier des territoires conduite par le Ministère entre 2016 et 2018 sur le thème « Mieux vivre ensemble dans le périurbain »84(*), le programme du PUCA sur les « campagnes urbaines » en 201985(*), jusqu'aux initiatives récentes portées dans le cadre de la réforme vers le « zéro artificialisation nette des sols » ou à la suite des « assises du commerce » (plan de transformation des zones commerciales86(*)). Plusieurs aides sont déjà mobilisables, recensées sur la plateforme « Aides Territoires »87(*), en particulier dans le cadre du Fonds Vert.

L'enjeu est donc de poursuivre ce renforcement des outils à la main des collectivités territoriales et des acteurs impliqués en matière de transformation urbaine et plus particulièrement dans le cadre du présent projet de loi, d'inciter les acteurs des territoires à envisager les zones pavillonnaires existantes et les ZAE comme des « espaces de projets » à valoriser, à faire évoluer voire à revitaliser. Les collectivités territoriales peuvent rencontrer des difficultés à intervenir et développer un projet urbain cohérent, notamment dans les zones pavillonnaires qui sont composées d'une multitude de parcelles privées, chacune appartenant à de « petits » propriétaires. En outre, leur réalisation nécessite une ingénierie fine, très différente de celle des aménageurs classiques.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La Charte de l'environnement dispose, dans son article 6, que « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social ».

L'utilisation raisonnée voire optimisée de l'espace dans les espaces déjà urbanisés, comme des zones pavillonnaires et des ZAE, dans le but notamment de pallier les difficultés de réalisation de logements et de lutter contre la mono-fonctionnalité de ces secteurs s'inscrit directement dans la poursuite de cet objectif de conciliation entre protection de l'environnement et développement économique et social.

Il s'agit de donner de nouveaux leviers aux collectivités territoriales, sans que cela ait toutefois d'impact sur le régime du droit de propriété (article 2 et 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen - DDHC) et le principe de libre administration des collectivités territoriales (article 72 de la Constitution).

Certains outils peuvent être à appréhender au regard du droit de propriété ou de la liberté contractuelle.

Le droit de propriété est garanti par l'article 2 de la DDCH. Les atteintes et limitations à ce droit doivent être justifiées par une nécessité publique conformément aux dispositions de l'article 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, soit par un intérêt général suffisant et proportionné à l'objectif d'intérêt général poursuivi (v. par exemple décision n° 2011-177 QPC du 7 octobre 201188(*) point 2 ; v. aussi décision n° 2019-830 QPC du 12 mars 202089(*) point 5).

Tout dispositif mis en place avec un risque d'atteinte doit poursuive un but d'intérêt général, ce qui est le cas quand il tend à la maîtrise de l'occupation des sols et du développement urbain (v. décision n°2000-436 DC du 7 décembre 200090(*) point 15 ; v. aussi décision n°2011- 177 QPC précitée point 5) et à faciliter l'évolution, dans le respect des politiques publiques d'urbanisme, des règles propres aux lotissement contenues dans leurs cahiers des charges (v. décision n°2018-740 QPC du 19 octobre 2018 ). C'est également le cas par exemple quand il poursuit aussi un but de protection de l'environnement qui constitue un objectif à valeur constitutionnelle (v. n° 2019- 823 QPC du 31 janvier 202091(*), point 4). Le Conseil constitutionnel est attentif à accorder une protection du droit de propriété, si ce n'est identique, du moins équivalente à celle consacrée par la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).

L'intervention publique, en particulier en matière de maîtrise foncière publique, doit être observée également au regard de la liberté d'entreprendre et de la liberté contractuelle garanties par la Constitution. La liberté d'entreprendre et la liberté contractuelle découlent de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Le Conseil constitutionnel a énoncé en 2012 que le législateur peut y apporter des limitations « liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi » (v. décision n° 2012-242 QPC du 14 mai 201292(*)).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

L'intervention dans les espaces déjà urbanisés visant à les améliorer mais aussi à optimiser leur densité, permet de limiter l'étalement urbain et de lutter contre l'artificialisation des sols et de répondre ainsi aux enjeux poursuivis par la France en matière de stratégie de protection des sols et de restauration de la nature.

Différentes directives et règlements européens vont en ce sens afin que les Etats membres traduisent ces objectifs dans le droit national.

On peut notamment citer :

- Sous réserve des travaux en cours, la proposition de directive relative à la surveillance et la résilience des sols (COM_2023_416), de même que la stratégie de l'UE pour la protection des sols pour répondre aux ambitions du  pacte vert. Ces actions jouent un rôle essentiel dans la protection de la biodiversité, la production d'une alimentation et d'une eau saines et le renforcement de la résilience face aux catastrophes naturelles telles que les incendies de forêt et les inondations ;

- Le règlement 2022/0195 du Parlement européen et du Conseil sur la restauration de la nature. Cette nouvelle législation européenne sur la restauration de la nature, approuvée par les États membres, permettra de restaurer les écosystèmes dégradés dans tous les pays de l'UE, de contribuer à la réalisation des objectifs de l'UE en matière de climat et de biodiversité et d'améliorer la sécurité alimentaire. Pour atteindre les objectifs globaux de l'UE, les États membres doivent restaurer au moins 30% des habitats concernés par la nouvelle législation (forêts, prairies, zones humides, rivières, lacs et fonds coralliens) pour remettre en bon état d'ici 2030 ceux qui sont en mauvais état, puis 60% d'ici 2040 et 90% d'ici 2050.

Par ailleurs, il convient de rappeler que le Conseil constitutionnel est attentif à accorder une protection du droit de propriété, si ce n'est identique, du moins équivalente à celle consacrée par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (CEDH). La conformité du projet à la jurisprudence du Conseil constitutionnel assure ainsi que le dispositif soit également compatible avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la CEDH garantissant le droit de propriété.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

A l'heure de la sobriété foncière et de la politique vers le « zéro artificialisation nette » (ZAN), pour favoriser une utilisation raisonnée et optimisée de l'espace et lutter contre l'étalement urbain tout en répondant aux besoins grandissants d'une offre nouvelle de logements, il est essentiel de réfléchir aux moyens pour soutenir et accélérer les interventions dans le tissu urbain existant dès lors qu'il présente un potentiel de renouvellement et de transformation.

Les nombreux secteurs d'habitat pavillonnaire issus notamment du développement des lotissements depuis les années 70, ainsi que les ZAE constituent des gisements de foncier sur lesquels des réflexions peuvent être engagées, notamment par le biais d'orientations d'aménagement et de dispositions réglementaires visant à requalifier et améliorer l'aménagement de ces secteurs, tout en favorisant leur densification et leur transformation urbaine.

En l'état actuel du droit, le code de l'urbanisme permet déjà de prévoir dans le plan local d'urbanisme (PLU) des orientations d'aménagement et de programmation (OAP) définissant des actions et opérations nécessaires pour permettre le renouvellement urbain et favoriser la densification en application du 1° de l'article L. 151-7 du code de l'urbanisme. De telles OAP peuvent être sectorielles et donc porter sur des quartiers ou des secteurs à mettre en valeur, réhabiliter, restructurer ou aménager. Le périmètre du quartier ou secteur auxquels ces orientations sont applicables est délimité dans le ou les documents graphiques du PLU (cf. article R. 151-10 du code de l'urbanisme).

Cependant, pour cibler spécifiquement les secteurs des espaces urbanisés à dominante d'habitat individuel, ou les zones d'activités économiques et afin de systématiser le recours à cet outil, il apparaît nécessaire de pouvoir les identifier dans une OAP spécifiquement dédiée et de préciser les contours de cette orientation permettant de favoriser la densification ou le renouvellement de ces secteurs. De plus, il est important de relier cette OAP à un nouvel outil d'aménagement engageant, permettant d'intervenir dans ces secteurs pour la réalisation d'opérations d'ensemble qui permettent de faire évoluer le tissu bâti tout en s'assurant de la préservation de la qualité urbaine, environnementale et paysagère de ces secteurs.

Par ailleurs, dans le droit actuel, la définition de nouvelles OAP dans un PLU implique généralement la mise en oeuvre de la procédure de modification de droit commun en application de l'article L. 153-41 du code de l'urbanisme. Cette procédure permet également la modification des dispositions réglementaires du PLU applicables au secteur concerné.

Afin de faciliter et d'accélérer la mise en oeuvre d'opérations de transformation urbaine ou de requalification et de densification de secteurs d'habitat individuel ou d'activités économiques, il serait utile d'avoir recours à la procédure de modification simplifiée mentionnée à l'article L. 153-45 du code de l'urbanisme, dont les délais de procédure sont réduits et les modalités d'organisation simplifiées.

Cependant, le recours à la modification simplifiée du PLU ne peut être envisagé que si le projet n'a pas pour effet de majorer de plus de 20% les possibilités de construction résultant, dans une zone, de l'application de l'ensemble des règles du plan. Ce seuil pourrait dans certains cas freiner l'objectif de densification envisagé. Il convient donc d'élargir le champ d'application de la procédure de modification simplifiée à ce type d'intervention.

Par ailleurs des outils opérationnels existent pour intervenir sur ces espaces, en particulier en matière d'aménagement foncier, comme les zones d'aménagement concerté (ZAC) ou encore les dispositifs contractuels associant l'Etat et les collectivités tels que les opérations de revitalisation de territoire (ORT) ou les projets partenariaux d'aménagement (PPA).

Cependant, pour répondre plus précisément aux enjeux rencontrés dans certaines zones pavillonnaires et ZAE, nécessitant en particulier que la collectivité territoriale puisse mettre en oeuvre une OAP renforcée sur ces espaces avec un opérateur désigné en ce sens, la loi peut ajouter un nouveau cadre opérationnel ensemblier pour le déploiement des outils actuels de l'aménagement, visant à faciliter la transformation urbaine de ces zones. Ce cadre, traduit potentiellement par voie contractuelle, permettra de donner les intentions principales en vue de favoriser l'évolution, la requalification du bâti existant et l'optimisation de l'utilisation de l'espace ou la mixité fonctionnelle. Pour créer un nouveau dispositif dit d'« opération de transformation urbaine », impliquant l'intervention d'une collectivité territoriale, il convient de passer par la loi.

Cet article comporte aussi deux autres modifications d'articles du code de l'urbanisme :

- L'article L. 442-11 du code de l'urbanisme prévoit que l'autorité compétente en matière de document d'urbanisme peut, lorsque l'approbation d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu intervient postérieurement à la délivrance d'un permis d'aménager pour un lotissement ou à la décision de non-opposition à une déclaration préalable, modifier tout ou partie des documents dudit lotissement. Cette modification peut intervenir uniquement pour mettre en concordance le règlement ou le cahier des charges d'un lotissement avec le plan local d'urbanisme ou le document d'urbanisme en tenant lieu. Cette modification fait évoluer l'état du droit pour clarifier la possibilité pour l'autorité compétente de modifier le cahier des charges et l'adapter aux évolutions du document d'urbanisme, y compris ses dispositions de nature contractuelle. Cette précision permettra ainsi de faire obstacle à des interprétations contraires de la jurisprudence judiciaire (v. Cass. 3e civ., 13 oct. 2016, n° 15-23.67493(*) ; Cass. 3e civ., 12 juill. 2018, n° 17-21.08194(*)) et administrative (v. CE, 18 janv. 1974, Min. Aménag. terr. c/ Sté foncière Biarritz-Anglet, n° 8866595(*) ; CE, 12 oct. 1979, SCI Les Boutons d'Or ; CE 22 juin 1984, Comité de défense de la zone d'habitation individuelle de Neuilly-Plaisance96(*) ; CE 4 mars 1996, Cne de la Teste-de-Buch, n° 09847597(*)).

- L'article L. 442-10 du code de l'urbanisme indique actuellement que l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme peut modifier les documents du lotissement après avoir recueilli la majorité qualifiée des colotis, qui consiste soit en la moitié des propriétaires détenant ensemble les deux tiers au moins de la superficie d'un lotissement soit les deux tiers des propriétaires détenant au moins la moitié de cette superficie.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les mesures de l'article 5 s'inscrivent dans l'objectif général visant à répondre à la crise du logement, en fournissant aux acteurs de l'aménagement les outils et leviers qui facilitent le développement de l'offre de nouveaux logements, particulièrement dans les secteurs déjà urbanisés, et en simplifiant les normes qui ralentissent les projets d'aménagement, dans une logique de densification raisonnée.

Mesure Densification pavillonnaire

L'objectif poursuivi par la présente mesure est d'instituer de nouveaux outils réglementaires et opérationnels pour donner aux collectivités des leviers efficaces pour faciliter la transformation urbaine de zones pavillonnaires ou de zones d'activités économiques en vue de favoriser l'évolution, la requalification du bâti existant, l'optimisation de l'espace ou la mixité fonctionnelle.

Loin de stigmatiser ces territoires, il est proposé d'inverser le regard, et de considérer ces espaces (le plus souvent périurbains) comme « un espace de projet » susceptible d'accueillir un développement soutenable et de répondre aux besoins de ses habitants en matière de logement, de déplacements, de services, et de vie collective. Une intervention publique est particulièrement justifiée pour les zones d'activités économiques obsolescentes, les quartiers pavillonnaires marqués par une importante vacance, ou les espaces mal lotis en équipements publics et notamment peu desservis en transport en commun. Ces secteurs peuvent être identifiés dans les observatoires de l'habitat et du foncier98(*).

Avec la mise en place d'un dispositif d'« Opération de transformation urbaine - OTU » il s'agira de traduire opérationnellement une OAP renforcée portant sur des secteurs exclusivement ou quasi-exclusivement urbains pavillonnaires ou des zones d'activités économiques au sens de l'article L .318-8-1 du code de l'urbanisme.

Les instances délibératives des collectivités pourront fixer les objectifs, la durée ainsi que le(s) périmètre(s) de(s) opération(s) ainsi que le programme prévisionnel des actions à réaliser et les conditions de financement de l'opération pour les besoins en équipements publics. Par ailleurs, la concertation menée portera tant sur la définition de l'OAP que sur sa déclinaison opérationnelle facilitant ainsi son appropriation par les acteurs concernés en premier lieu par le projet.

Ce dispositif sera complémentaire voire un point d'entrée, un cadrage, pour mobiliser ceux déjà existants tels que les ZAC ou encore les projets urbains partenariaux (PUP). Il permettra de proposer un ensemble d'actions à mener allant au-delà des « seuls sujets aménagement du territoire », identifiant un opérateur (public ou privé) qui pourra porter l'ensemble du projet dès sa conception et en assurer l'animation. Ce nouvel outil facilitera ainsi la déclinaison opérationnelle des OAP sectorielles déjà existantes.

Mesure liée à la modification des règles de majorité en lotissement

La modification des articles L. 442-10 et L. 442-11 du code de l'urbanisme permet d'accélérer l'évolution des documents du lotissement à l'initiative des colotis ou par l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme notamment pour faciliter les subdivisions de lots permettant ainsi une densification des lotissements.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Mesure Densification pavillonnaire

La première option envisagée consistait à mettre en place un nouveau dispositif de « secteur de renouvellement pavillonnaire » inspiré du dispositif de la zone d'aménagement concerté dont les modalités et effets étaient ajustés pour tenir compte des spécificités des tissus pavillonnaires.

Ces secteurs auraient été créés en suivant le modèle de la procédure de ZAC, voire constitueraient des ZAC en tout ou partie, par délibération d'une collectivité publique ou d'un établissement public y ayant vocation, avec pour objet d'accompagner le renouvellement et la mutation d'un tissu urbain majoritairement constitué d'habitat individuel. La délibération qui approuve le périmètre et le programme d'un secteur de renouvellement pavillonnaire aurait également emporté déclaration de projet au sens de l'article L. 153-54 du code de l'urbanisme.

Une orientation d'aménagement et programmation (OAP) aurait été définie afin d'arrêter les lignes directrices de l'évolution du secteur et fixer les grandes limites de celle-ci.

Il était aussi envisagé, pour chaque terrain faisant l'objet d'une intention de projet ou d'un projet, qu'une « convention de renouvellement pavillonnaire » soit établie entre le pétitionnaire, la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent pour créer le secteur, et l'aménageur, pour fixer les prescriptions détaillées à respecter par le projet et tenant lieu de « PLU à la parcelle », suite à une modification simplifiée.

Cette proposition n'a pas été retenue, car le procédé complexe impliquait deux niveaux de mise en compatibilité du PLU, au niveau du secteur étudié et puis au coup par coup, à la parcelle.

De plus, la mise en oeuvre d'une procédure de déclaration de projet pour mettre en compatibilité le PLU n'était pas envisageable car elle avait pour effet de s'affranchir des deux principes qui justifient le recours à une telle procédure, c'est-à-dire la connaissance d'un projet dont les caractéristiques sont connues, et la reconnaissance de l'intérêt général du projet.

Il a également été envisagé de ne pas modifier le droit existant et de mettre en oeuvre ces opérations de transformation urbaine en utilisant les outils existants à disposition. Pour la transformation et la densification d'un secteur pavillonnaire, il est actuellement possible de définir sur un secteur situé en zone urbaine (U) une OAP sectorielle définissant des « actions et opérations nécessaires pour permettre (...) le renouvellement urbain, favoriser la densification » de ce secteur en application du 1° de l'article L. 151-7 du CU.

Le périmètre du quartier ou secteur auxquels ces orientations sont applicables est délimité dans le ou les documents graphiques du PLU (cf. article R. 151-10 CU).

Cependant, comme cela a déjà été précisé plus haut, cela n'est pas suffisant pour systématiser le recours à un dispositif visant spécifiquement à transformer les secteurs d'habitat individuel et les zones d'activités économiques par une optimisation de l'occupation de l'espace, garantissant la préservation de la qualité urbaine et paysagère du secteur. De plus, les actions ou opérations qui seraient engagées dans le cadre d'une OAP sectorielle ne pourraient pas forcément être réalisées dans le cadre d'une procédure de modification simplifiée du PLU.

Cette option est insuffisante au regard des enjeux actuels et a donc été écartée.

Mesure liée à la modification des règles de majorité en lotissement

Il avait été envisagé de créer une disposition spécifique afin d'assouplir les règles de majorité qualifiée des colotis pour adapter les documents du lotissement pour les seuls cas de subdivision des lots. Néanmoins les effets d'une telle disposition seraient insuffisants au regard de l'objectif de simplification recherché dans la procédure d'évolution des documents du lotissement.

3.2. DISPOSITIF RETENU

L'option retenue repose sur la création de plusieurs dispositifs :

- la création d'une orientation d'aménagement et de programmation (OAP) spécifique dédiée pour favoriser l'évolution, la requalification du bâti existant, l'optimisation de l'utilisation de l'espace ou la mixité fonctionnelle des secteurs constitués exclusivement ou quasi exclusivement d'habitat individuel et des zones d'activités économiques ;

- la création d'un nouvel outil d'aménagement opérationnel dans le code de l'urbanisme, l'« opération de transformation urbaine » (OTU), dont l'objet principal est d'assurer la réalisation de l'OAP susmentionnée.

Ces opérations de transformation urbaine seront créées par délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, de plan local d'urbanisme ou de document en tenant lieu. Elles auront pour objet d'intervenir dans les secteurs urbains exclusivement ou quasi exclusivement composés d'habitat individuel ou dans les zones d'activités économiques pour y favoriser l'évolution ou la requalification du bâti existant et l'optimisation de l'utilisation de l'espace, par des constructions nouvelles par division parcellaire notamment ou par reconstruction.

La délibération fixe les objectifs, la durée et le ou les périmètres de l'opération. Elle précise notamment le programme prévisionnel des actions à réaliser et les conditions de financement de l'opération, en particulier pour les besoins en équipements publics.

Tout ou partie des actions à conduire peut-être confiée à un opérateur y ayant vocation et désigné à cet effet par la délibération créant l'opération. Leur mise en oeuvre peut donner à lieu à une convention avec l'opérateur ainsi désigné.

Dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme, ces opérations permettront, le cas échéant, d'assurer la réalisation des orientations d'aménagement et de programmation spécifiques mentionnées ci-dessus, dédiées à la requalification et à la densification des secteurs d'habitat individuel et des zones d'activités économiques.

L'opération fait l'objet d'une concertation dans les conditions prévues aux articles L. 103-2 à L. 103-6 du code de l'urbanisme.

- la définition de ces OAP dans le plan local d'urbanisme pourra être mise en oeuvre par le moyen d'une procédure de modification simplifiée par dérogation à la procédure de droit commun.

- il est également prévu un abaissement des règles de majorité qualifiée des colotis pour demander ou accepter la modification de l'ensemble des règles contenues dans les documents de lotissement. La mesure envisage de passer de l'accord de la moitié des propriétaires détenant les deux tiers de la superficie du lotissement, ou l'accord des deux tiers des propriétaires détenant la moitié de la superficie à l'accord de la moitié des propriétaires détenant la moitié de la superficie du lotissement. De plus, l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme pourra modifier, après enquête publique, l'ensemble des documents du lotissement (règlement, cahier des charges) pour les mettre en concordance avec l'évolution des règles d'urbanisme applicables sur le lotissement notamment dans le cadre de la mise en place de ces nouvelles OAP et OTU. Cette modification peut concerner le règlement et le cahier des charges des documents du lotissement, afin que ceux-ci ne fassent pas obstacle à la mise en oeuvre des OAP et OTU.

Cette mesure permettra une fluidification de l'évolution des règles du lotissement conduisant à une intensification de la densification dans les secteurs pavillonnaires.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le dispositif prévoit :

- la création d'un nouvel article L. 151-7-3 du code de l'urbanisme lequel a pour objet d'ouvrir la possibilité de définir une OAP spécifique dans les secteurs pavillonnaires et dans les zones d'activité économique ;

- la modification de l'article L. 153-45 du code de l'urbanisme pour ouvrir la possibilité de recourir à la procédure de modification simplifiée pour la définition de cette OAP dans le PLU ;

- le rétablissement d'un chapitre V au Titre Ier du Livre III du code de l'urbanisme intitulé « Opérations de transformation urbaine » avec la création d'un nouvel article L. 315-1 du code de l'urbanisme fixant le régime juridique des OTU ;

- la modification de l'article L. 442-10 du code de l'urbanisme. Cette mesure adapte les règles de majorité qualifiée des colotis pour demander ou accepter l'évolution des documents du lotissement ;

- la modification de l'article L. 442-11 du code de l'urbanisme pour prévoir la possibilité de modifier, le cas échéant, le règlement et le cahier des charges du lotissement pour assurer la réalisation de l'OAP et la mise en oeuvre de l'OTU. Cette mesure permettra ainsi de modifier les documents du lotissement afin qu'ils ne fassent pas obstacle à ces objectifs.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La mesure qui répond aux enjeux de protection des sols est compatible avec les directives et règlements européens dont les objectifs sont précisés dans le cadre conventionnel décrit au paragraphe 1.3.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La mesure aura un impact économique positif pour les collectivités d'une part, dans la mesure où elle a pour effet de réduire l'étalement urbain qui représente généralement un surcoût (construction de réseau, de voiries, d'équipements publics ...), et pour les ménages d'autre part, car elle permet de réduire les coûts de déplacement en cas d'éloignement des commerces et de l'emploi.

Elle aura également un effet positif pour la filière immobilière et permettra de contribuer par le biais d'une densification dense au développement de l'offre de logements.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La mesure qui vise à faciliter la transformation urbaine de zones pavillonnaires ou de zones d'activité économique en vue de favoriser l'évolution, la requalification du bâti existant, l'optimisation de l'espace ou la mixité fonctionnelle aura un impact positif sur les entreprises intervenant dans ce domaine et pour celles de la construction et de l'habitat.

La mesure contribuera notamment à simplifier les procédures pour les porteurs de projets avec donc un gain de temps et de fluidité pour les projets envisagés.

4.2.3. Impacts budgétaires

La mesure n'entraîne aucune dépense budgétaire supplémentaire directe.

Les dépenses pouvant résulter de ces opérations dépendront de la mobilisation des outils mis en place, des situations rencontrées et de l'étendue des actions mises en oeuvre.

Ainsi le développement d'opérations de transformation urbaine peut nécessiter des participations financières complémentaires des acteurs publics impliqués.

Ces participations sont à ce stade difficilement évaluables car elles dépendront de chaque opération.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Mesure Densification pavillonnaire

La mesure aura un impact positif pour les collectivités qui bénéficieront de nouveaux outils opérationnels pour mener à bien des opérations de transformation urbaine dans des zones pavillonnaires ou d'activités économiques. Elles bénéficieront d'une accélération des procédures avec notamment la possibilité de recourir à une modification simplifiée de leur plan local d'urbanisme pour définir une nouvelle OAP.

La mesure contribuera également à aider les collectivités à atteindre leurs objectifs en matière de production de logements dans le cadre d'opérations de densification, sans devoir ouvrir à l'urbanisation des zones naturelles ou agricoles.

Mesure liée à la modification des règles de majorité en lotissement

Cette mesure permettra pour les collectivités d'accélérer le processus de modification des documents du lotissement à l'initiative de l'autorité compétente en vue de relancer la densification de ces secteurs, en appui des évolutions nécessaires du tissu urbain et périurbain vers davantage de densité.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Le dispositif permet un allègement de la procédure d'évolution du plan local d'urbanisme avec le recours à la procédure de modification simplifiée. Cette procédure simplifiée permet une évolution plus rapide du document d'urbanisme après une mise à disposition du public et offre donc un gain de temps aux services administratifs concernés.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Le dispositif aura un impact positif sur la société. Il contribuera de manière convergente à la lutte contre la pénurie de logements en favorisant une densification douce et maîtrisée des tissus urbains existants et à la lutte contre l'étalement urbain et l'artificialisation des sols.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Mesure Densification pavillonnaire

Cette mesure aura un effet positif sur les particuliers dès lors qu'elle participera à améliorer le cadre de vie de zones pavillonnaires ou de zones d'activité économique existantes en favorisant leur requalification et leur mixité fonctionnelle et sociale.

Ce dispositif d'optimisation du foncier existant contribuera également à augmenter le développement de l'offre de logements avec à terme un impact positif sur la baisse des prix de l'immobilier.

Mesure liée à la modification des règles de majorité en lotissement

La modification de la majorité qualifiée des colotis requise pour faire évoluer les documents du lotissement aura un impact limité sur les droits et obligations des colotis. Elle permettra une meilleure prise en compte des souhaits des colotis en fluidifiant le processus décisionnel au sein du lotissement.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La mesure permet d'oeuvrer efficacement en faveur de la lutte contre l'étalement urbain et l'artificialisation des sols.

En outre, la densification des tissus urbains existants est un facteur de limitation des déplacements individuels motorisés, et donc de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi d'économie en matière de réseaux et d'infrastructures de transports.

Cela favorise les déplacements doux et des comportements écoresponsables mais aussi une réduction de la pollution atmosphérique locale (moins de trafic et de congestion du réseau routier) et donc un meilleur cadre de vie. Il est donc attendu un impact positif sur le climat et la qualité de l'air.

La réhabilitation ou la rénovation de bâtiments existants a un effet positif sur l'environnement dans le sens où elle limite la production et l'acheminement de nouveaux matériaux de chantier, et permet donc d'économiser des ressources minérales. De même, la reconstruction de la ville sur elle-même facilite le réemploi des matériaux dans le cadre de démolitions, lorsqu'ils sont réutilisés à proximité pour des espaces publics ou autres aménagements. La mesure permet d'oeuvrer efficacement en faveur de la lutte contre l'étalement urbain et l'artificialisation des sols.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique au territoire métropolitain et aux départements et régions d'outre-mer (DROM).

Départements d'Outre Mer

 

Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion

Application de plein droit.

Mayotte

Application de plein droit

Collectivités d'Outre Mer

 

Saint Martin et Saint Barthélémy

Dispositions non applicables.

Saint Pierre et Miquelon

Dispositions non applicables.

Autres (Polynésie française, Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna, TAAF)

Dispositions non applicables.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

Article 6 - Généraliser le permis d'aménager multisites

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le permis d'aménager multisites est un dispositif introduit à titre expérimental dans les opérations de revitalisation du territoire (ORT), par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement de l'aménagement et du numérique et pour une durée de 5 ans.

Le permis d'aménager multisites déroge au principe de contiguïté des parcelles sur lesquelles doivent en principe se trouver les projets soumis à permis d'aménager. Cette mesure expérimentale permettait ainsi de déposer un permis d'aménager portant sur au moins deux parcelles en discontinuité, à la condition que l'opération d'aménagement garantisse l'unité architecturale et paysagère des sites concernés.

Il s'agissait ici avant tout d'un instrument d'accélération de certaines opérations dont le principe n'était pas interdit, mais rendu plus complexe par la nécessité d'obtention de plusieurs permis d'aménager alors même que le promoteur était dans un « continuum » unique d'aménagement.

Suite à cette expérimentation, la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale a pérennisé le permis multisites dans le cadre des opérations de revitalisation du territoire (ORT) et l'a étendu aux projets partenariaux d'aménagement (PPA). Ce dispositif est depuis codifié, pour les PPA, à l'article L. 312-2-1 du code l'urbanisme, et pour les ORT, à l'article L. 303-2 du code de la construction et de l'habitation.

A ce jour, d'après une enquête menée auprès des communes faisant l'objet d'une ORT, ce sont 25 permis d'aménager qui ont été déposés sur ces territoires attestant de la pertinence de cet outil et de son appropriation progressive par les collectivités locales concernées.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution fixe ce qui relève de la loi : en l'espèce, sont concernés « le régime de la propriété, des droits réels ».

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Sans objet.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le permis d'aménager multisites est un dispositif, initialement expérimental, qui a montré son utilité. Sa pérennisation par la suite, limitée aux PPA et aux ORT, a permis de mettre en évidence ses avantages et ses obstacles.

La principale faculté offerte par ce dispositif est la rationalisation de multiples procédures d'aménagement en une seule, aux conditions :

- qu'il s'agisse d'un demandeur unique pour l'ensemble des projets inclus dans le permis d'aménager ;

- que ces projets constituent un ensemble unique et cohérent ;

- que ces projets garantissent une unité architecturale et paysagère des sites concernés.

Une telle initiative permettra donc, sans doute plus demain qu'aujourd'hui, de corréler plusieurs unités autour d'un projet cohérent en s'assurant de leur bonne insertion architecturale et paysagère. Cet élément était rendu difficile voire impossible aujourd'hui par la délivrance de plusieurs permis d'aménager décorrélés.

Elle répond pleinement aux enjeux d'une opération d'aménagement en transformation ou en renouvellement urbain menée sur un tissus urbain existant qui comprend plusieurs voire beaucoup de parcelles dont seule une partie est concernée par la mutation urbaine, architecturale et paysagère portée dans le cadre du projet d'aménagement.

Par ailleurs, une telle initiative simplifie la procédure administrative obligatoire pour le porteur de projet, tout en donnant au service instructeur une vision plus globale des projets présentés.

Compte tenu de son intérêt pour stimuler la construction de logements neufs, en particulier en tissu urbain au potentiel d'aménagement et de densification, ce dispositif pourrait constituer une partie de la réponse adaptée aux enjeux actuels de la crise de logement, tant dans la simplification procédurale qu'il apporte que dans la sécurisation globale, par un seul titre administratif, qu'il permet pour un projet commun, même si celui-ci concerne plusieurs parcelles non contiguës.

C'est pourquoi il apparait opportun de le généraliser à l'ensemble du territoire.

Il convient de prendre par voie législative des mesures modifiant et adaptant des dispositions existantes relevant de la loi au titre de l'article 34 de la Constitution.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le permis d'aménager multisites se présente aujourd'hui comme un levier puissant pour composer avec le bâti existant et maitriser l'artificialisation des sols. Il permet l'appréhension globale d'un projet d'aménagement ou de réaménagement afin de concevoir des opérations d'ensemble via un véhicule juridique unique.

Sa généralisation facilitera la réalisation d'opérations complexes, en permettant aux porteurs de projet d'équilibrer, notamment d'un point de vue financier, leurs opérations entre des terrains différents non contiguës.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Une option envisagée aurait été de conserver le mécanisme actuel, en cantonnant la possibilité d'un permis d'aménager multisites aux PPA (36 PPA signés à fin 2023) et ORT (1774 communes couvertes et 764 ORT début 2024).

Néanmoins, les difficultés rencontrées, en particulier en matière d'offre de logements, rendent nécessaire la mobilisation de tous les dispositifs de nature à faciliter ou accélérer la production de ces derniers.

La généralisation d'un tel dispositif apparaît donc comme un facteur positif pour stimuler la concrétisation de projets immobiliers, en particulier ceux présentant un volet logement important, se développant sur plusieurs parcelles au sein d'un quartier ou d'un îlot.

3.2. DISPOSITIF RETENU

La mesure retenue est une généralisation, y compris en dehors des PPA et des ORT, du permis d'aménager multisites. Cette possibilité est soumise à plusieurs conditions cumulatives.

Un permis d'aménager portant sur plusieurs unités foncières non contiguës est possible, à condition que la demande soit déposée par un demandeur unique, que le projet constitue un ensemble unique et cohérent et que l'unité architecturale et paysagère des sites soit préservée.

Ces conditions nouvelles paraissent, en contrepartie de la généralisation du dispositif, de nature à garantir la cohérence d'ensemble des projets soumis à ce nouveau permis. Cette cohérence paraît une condition permettant de conserver voire d'augmenter la qualité des ensembles immobiliers autorisés au titre de cette procédure tout en permettant la simplification procédurale recherchée.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La mesure envisagée crée un article L. 442-1-3 au code de l'urbanisme. En conséquence, elle abroge l'article L. 312-2-1 du code de l'urbanisme ainsi que le vingt-troisième alinéa de l'article L. 303-2 du code de la construction et de l'habitation, prévoyant par dérogation la possibilité d'un permis multisites dans un projet partenarial d'aménagement et dans une opération de revitalisation du territoire.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Aucune disposition supra-nationale ne vient en contradiction avec la généralisation de la mesure proposée.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La mesure facilitera l'acceptabilité et donc la réalisation effective des projets d'aménagement concernés.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Sans que cela puisse être quantifié, la mesure accélèrera les possibilités d'intervention des aménageurs publics comme privés sur des tissus urbains complexes en mutation.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans objet.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cette mesure permettra aux collectivités d'avoir une vision plus globale des projets et d'ainsi pouvoir mettre en application leur stratégie foncière de manière cohérente sur l'ensemble de leur territoire.

Elle permettra par ailleurs d'accélérer les opérations de revitalisation dans les territoires, par le portage de projets d'ensemble, et ainsi facilitera la concrétisation de projets immobiliers, notamment ceux composés pour tout ou partie de logements.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Sans objet.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Sans objet.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure concernant les aménageurs professionnels ; l'impact sur les particuliers, hormis indirectement par l'accélération des procédures permettant d'accélérer la production d'une offre nouvelle de logements de qualité, parait résiduel.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique au territoire métropolitain et aux départements et régions d'outre-mer (DROM).

Départements d'Outre Mer

 

Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion

Application de plein droit.

Mayotte

Application de plein droit

Collectivités d'Outre Mer

 

Saint Martin et Saint Barthélémy

Dispositions non applicables.

Saint Pierre et Miquelon

Dispositions non applicables.

Autres (Polynésie française, Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna, TAAF)

Dispositions non applicables.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

CHAPITRE III - RENFORCER LES CAPACITÉS DE PRODUCTION DES BAILLEURS

Article 7 - Permettre aux bailleurs sociaux de produire davantage de logements locatifs intermédiaires

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les logements intermédiaires sont définis à l'article L. 302-16 du code de la construction et de l'habitation (CCH) comme des logements faisant l'objet d'une aide directe ou indirecte accordée par l'Etat, une collectivité locale ou l'un de ses groupements, ou par toute autre personne morale, en contrepartie du respect de plafonds de ressources pour l'attribution de ces logements et de plafonds de loyers en cas de location de ces logements. Ces loyers réglementés sont inférieurs aux loyers pratiqués dans le parc privé. Les plafonds de loyers sont inférieurs en moyenne de 10 à 15 % aux loyers moyens du parc privé99(*).

Les logements intermédiaires sont avant tout destinés à être loués aux classes moyennes n'ayant pas accès au parc social, particulièrement dans les zones tendues, où les loyers du parc privé sont très supérieurs aux loyers des logements du parc social financés en prêt locatif social (PLS100(*)).

Les plafonds de ressources des ménages bénéficiant d'un logement locatif intermédiaire sont ceux applicables au dispositif d'investissement locatif dit "Pinel", issu de l'article 4 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015. Le public cible est plutôt constitué de jeunes ménages aux revenus compris entre les plafonds du PLS et les plafonds du PLUS (ménages ayant un niveau de ressources moyen de 3 200 euros par mois selon CDC Habitat)101(*).

Pour les baux conclus en 2024, les plafonds de ressources et les plafonds de loyer sont les suivants102(*) :

Le besoin en logements intermédiaires a été estimé à 18 000 à 40 000 logements par an sur dix ans103(*), en rapprochant une offre de logements intermédiaire utiles estimée à 140 000 logements sur 10 ans et une demande brute estimée entre 320 000 et 560 000 logements sur dix ans.

Le développement des logements intermédiaires est financé d'une part par la distribution de prêts locatifs intermédiaires (PLI, qui n'ouvrent pas droit à une subvention de l'Etat ni à aucun avantage fiscal), d'autre part par l'octroi d'avantages fiscaux (taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties).

Si la production de logements locatifs intermédiaires a connu une croissance progressive à compter de la création du dispositif en 2014, elle a atteint un seuil situé autour de 15 000 à 17 000 logements produits par an en 2021 et 2022. En 2023, cette production a connu un pic à près de 30 000 unités sous l'effet du plan de rachat massif engagé par CDC Habitat et Action Logement à la demande des pouvoirs publics. Le gouvernement souhaite pérenniser ce niveau de production conforme aux besoins estimés.

Aujourd'hui, la plus grande part des logements intermédiaires est portée par la société CDC Habitat et par les cinq sociétés IN'LI, filiales du groupe Action Logement : selon le rapport 2021 de l'IGF et du CGEDD sur le développement du LLI institutionnel, CDC Habitat et IN'LI, représentent 64 % des logements intermédiaires agréés entre 2014 et 2020, opérations réalisées en propre et structures gérées (les structures gérées sont des fonds d'investissement constitués par CDC Habitat et IN'LI avec des grands investisseurs institutionnels privés) confondues.

Mais les bailleurs sociaux peuvent aussi construire et gérer des logements intermédiaires, soit directement, soit en créant des filiales dédiées au LLI.

Au 1er janvier 2023, près de 140 000 logements intermédiaires, hors filiales LLI, appartiennent au parc des bailleurs sociaux (source : répertoire des logements locatifs des bailleurs sociaux - RPLS).

Les logements intermédiaires gérés par les bailleurs sociaux

Les offices publics de l'habitat (OPH), les sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré (SA d'HLM) et les sociétés anonymes coopératives de production d'habitations à loyer modéré (COOP HLM) peuvent construire, acquérir et gérer des logements intermédiaires dans la limite de 10 % de leur parc de logements locatifs sociaux.

Entre 2014 et 2020, 32 % des logements intermédiaires agréés relèvent de bailleurs sociaux, dont 75 % relevant de SA d'HLM, 9 % d'OPH et 8 % de filiales LLI de bailleurs sociaux104(*). En 2021 et 2022, cette part s'est élevée respectivement à 32% et 43% (6 000 à 7 000 LLI produits par les organismes HLM et leurs filiales annuellement sur cette période).

Les avances en compte courant aux filiales « logements intermédiaires » des bailleurs sociaux

Les organismes d'habitation à loyer modéré (OPH, SA d'HLM et COOP HLM) peuvent créer (dans les conditions prévues aux articles L. 421-1, L. 422-2 et L. 422-3 du CCH) des filiales exclusivement chargées de construire, acquérir et gérer des logements locatifs intermédiaires. La décision de création d'une filiale LLI est transmise au ministre du logement qui peut s'y opposer s'il estime que cette création est de nature à porter atteinte à la capacité de l'organisme mère de remplir ses missions en matière de logement social.

Entre 2014 et 2020, 8% des logements intermédiaires agréés relèvent de filiales LLI de bailleurs sociaux.

En l'état du droit actuel, ces organismes d'HLM ne sont pas autorisés, en tant qu'organismes mères, à consentir des avances en compte courant à leurs filiales LLI (c'est-à-dire des prêts). Pour se développer, celles-ci peuvent donc bénéficier d'avances en compte courant accordées par les associés n'ayant pas le statut de bailleur social ou augmenter leur capital.

Les sociétés de vente HLM

Les sociétés de vente HLM sont des organismes HLM au sens de l'article L. 411-2 du CCH et sont prévues à l'article L.422-4 du même code.

Les sociétés de vente HLM ont pour objet d'acquérir des biens immobiliers et de procéder à leur vente à destination des autres organismes HLM (offices publics de l'habitat, sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré, sociétés anonymes coopératives de production, sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif d'habitations à loyer modéré, fondations d'habitations à loyer modéré, sociétés d'économie mixte agréées en application de l'article L. 481-1 du CCH, organismes qui bénéficient de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 du CCH) mais également au profit des particuliers.

Depuis leur création par la loi ELAN105(*), il n'existe actuellement sur le territoire national qu'une seule société de vente. Ainsi, l'Opérateur National de Vente (ONV), filiale du groupe Action logement, a pour seul objet l'acquisition et l'entretien de biens immobiliers appartenant à des offices publics de l'habitat, à des sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré, à des sociétés anonymes coopératives de production et les sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif d'habitations à loyer modéré ou à des fondations d'habitations à loyer modéré, à des sociétés d'économie mixte agréées en application de l'article L. 481-1 du CCH et à des organismes qui bénéficient de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 du CCH, en vue de la vente de ces biens à l'unité (article L. 422-47 CCH).

L'ONV doit permettre à l'organisme d'habitations à loyer modéré de céder plusieurs logements aux termes d'un même acte de vente et donc d'en percevoir l'intégralité du prix, de telle sorte que le bailleur social puisse réinvestir aussitôt les sommes ainsi perçues dans une opération de construction ou de réhabilitation. Cet outil est ouvert à tous les bailleurs sociaux qui ont la possibilité, sur la base du volontariat, de proposer à la vente des immeubles entiers que l'organisme créé portera, le temps du transfert de propriété, aux locataires et acquéreurs intéressés.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La mesure proposée vise à favoriser la production de logements locatifs intermédiaires en tant que logements accessibles à une partie des ménages rencontrant des difficultés pour se loger dans le parc privé. En ce sens, elle contribue à garantir le respect du droit au logement qui découle des alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution de 1946.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

La mesure proposée est conforme aux principes posés à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (droit au respect de la vie privée et familiale) et aux obligations qui pèsent sur les bailleurs sociaux en tant qu'ils sont chargés d'un service d'intérêt économique général (SIEG) en matière de logement social, défini à l'article L. 411-2 du CCH en application de la décision de la Commission du 20 décembre 2011 relative à l'application de l'article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général. En effet, la mesure proposée maintient une distinction entre les activités relevant du SIEG « logement social » et les activités de construction et de gestion de logements locatifs intermédiaires.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les logements intermédiaires gérés par les bailleurs sociaux

Pour encourager l'investissement dans le logement intermédiaire des bailleurs sociaux, l'Etat s'est notamment engagé, dans le cadre du Pacte pour le logement intermédiaire, signé en mars 2024106(*), à augmenter de 10 % à 20 % le pourcentage maximal de logements intermédiaires susceptibles d'être construits, acquis et gérés directement par les bailleurs sociaux. L'augmentation de ce taux doit permettre aux bailleurs sociaux d'accroître le volume de logements locatifs intermédiaires produit par le secteur HLM et de contribuer ainsi à l'atteinte de l'objectif de production de 30 000 logements locatifs intermédiaires par an d'ici 2026.

Par ailleurs, si le logement locatif intermédiaire n'appartient pas au segment du logement social, il constitue toutefois un produit abordable qui participe directement à l'accès au logement des ménages de la classe moyenne, confrontés à des difficultés croissantes de logement. Dans un contexte de crise du logement et au regard des difficultés en matière de financement des opérations dans les zones tendues, la plus grande rentabilité du segment intermédiaire permet de faciliter l'équilibre financier d'opérations mixtes contenant des logements aux loyers très accessibles par une péréquation économique entre les différents produits au sein d'une même opération.

Cette mesure nécessite une modification des dispositions législatives relatives aux missions des OPH, des SA d'HLM et des COOP d'HLM.

Les avances en compte courant aux filiales « logements intermédiaires » des bailleurs sociaux

Pour simplifier les relations entre les bailleurs sociaux et leurs filiales LLI et favoriser le développement de ces filiales, l'Etat s'est également engagé, dans le cadre du Pacte pour le logement intermédiaire, à étudier la possibilité de permettre aux bailleurs sociaux de consentir des avances en compte courant à leurs filiales LLI, lors de la constitution de la filiale mais aussi durant la vie de la filiale.

Cette mesure nécessite une modification des dispositions législatives relatives aux concours financiers apportés par les bailleurs sociaux à leurs filiales LLI.

Les sociétés de vente HLM

Au regard des dispositions de l'article L. 422-4 du CCH, l'acquisition et la revente des biens immobiliers par les sociétés de vente HLM sont strictement limitées aux biens immobiliers appartenant à des bailleurs sociaux. En revanche, elles n'ont pas la faculté de faire de même avec les filiales HLM dédiées au logement intermédiaire et celles détenues par le Groupe Action Logement dont l'objet est de gérer uniquement des logements locatifs intermédiaires (LLI). Une évolution législative apparaît donc nécessaire pour permettre aux filiales dédiées au LLI de vendre leur patrimoine aux sociétés de vente HLM qui pourront par conséquent étendre leur champ d'intervention à l'ensemble des logements dits abordables (logements sociaux et logements intermédiaires).

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les logements intermédiaires gérés par les bailleurs sociaux

La mesure proposée vise à donner aux bailleurs sociaux des marges supplémentaires de développement de leur parc de logements intermédiaires dans un contexte où l'Etat souhaite encourager l'investissement dans les logements intermédiaires après avoir étendu, par la loi de finances pour 2024, le disposition du logement intermédiaire à de nouveaux bâtiments (acquisition-amélioration de bâtiments anciens à rénover) et à de nouveaux publics (résidences meublées gérées avec des redevances intermédiaires, au bénéfice de jeunes actifs, étudiants, seniors ou encore familles monoparentales).

Les avances en compte courant aux filiales « logements intermédiaires » des bailleurs sociaux

La mesure proposée vise la mise à disposition, par les bailleurs sociaux, de ressources utiles au développement de leurs filiales LLI, afin de financer de manière plus souple le lancement et le développement de l'activité de ces filiales.

Les sociétés de vente HLM

La mesure proposée vise à permettre aux filiales spécialisées dans la construction et la gestion de LLI des organismes HLM et aux filiales du groupe Action Logement exerçant une activité de logement intermédiaire de vendre en bloc des logements intermédiaires, définis aux articles L. 302-16 à L. 302-16-2, à des sociétés de vente prévues à l'article L. 422-4.

Face au besoin accru de logements intermédiaires en faveur des classes moyennes pour lesquelles le Gouvernement entend porter une action politique résolue, l'élargissement du champ d'intervention des filiales dédiées au LLI, en leur permettant de vendre leurs logements à des sociétés de vente HLM, est destiné à accélérer la production de cette catégorie de logements. En effet, les sociétés de vente, spécialisées dans la commercialisation et la vente de logements, apparaissent comme des partenaires permettant aux filiales d'externaliser la fonction de vente les déchargeant ainsi de cette mission et, par conséquent, des coûts de gestion inhérents. Ensuite, les sociétés de vente peuvent faciliter et fluidifier le parcours résidentiel dans la mesure où la vente des immeubles en bloc qui ont été acquis s'effectue ensuite à l'unité et prioritairement aux locataires occupants et à des personnes sous les plafonds éligibles au LLI en demande de logements abordables.

En outre, la faculté offerte à ces filiales de diversifier leurs débouchés commerciaux devrait se traduire par un accroissement de leurs produits exceptionnels (correspondant principalement aux plus-values constatées lors des ventes des logements) et ainsi améliorer significativement leur résultat financier. Cette amélioration attendue de leur capacité financière pourrait amoindrir leurs besoins en fonds propres issus des produits de la Participation de l'Employeur à l'Effort de Construction (PEEC). Ainsi, ces fonds pourraient être alors redistribués prioritairement au profit d'organismes HLM pour produire du logement locatif social.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Les sociétés de vente HLM : créer une société de vente dédiée au logement locatif intermédiaire

Cette option nécessite de modifier la loi. En effet, à droit constant, il n'est pas possible de créer ex-nihilo une société de vente dédiée à l'acquisition et la vente de LLI. Les sociétés de vente HLM sont, au sens de l'article L. 441-2 du CCH, des sociétés HLM, dont l'objet social est défini à l'article L. 422-4 et consiste dans l'acquisition et l'entretien du logement social et accessoirement du LLI appartenant aux OHLM.

Ensuite, la création d'une société ex-nihilo a un caractère disproportionné, en termes de moyens financiers à y consacrer, au regard de l'objectif initial fixé, à savoir permettre l'achat et la vente de LLI qui est déjà en partie assurée par la société de vente HLM « ONV ».

Aucune autre option n'a été envisagée s'agissant des autres dispositions prévues par cet article.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Les logements intermédiaires gérés par les bailleurs sociaux

La part maximale de logements intermédiaires susceptibles d'être construits, acquis et gérés par des bailleurs sociaux est portée de 10 % à 20 % de leur parc de logements sociaux.

Les avances en compte courant aux filiales « logements intermédiaires » des bailleurs sociaux

La mesure proposée consiste à permettre aux bailleurs sociaux de consentir des avances en compte courant à leurs filiales LLI, issues des activités ne relevant pas du service d'intérêt général défini à l'article L. 411-2, respectant les conditions du marché en termes de taux d'intérêt (donc de rémunération de l'avance consentie) et donnant obligatoirement lieu à remboursement (c'est-à-dire ne donnant pas lieu à des conditions spécifiques ou plus favorables) à l'issue d'une période définie dans le contrat d'avance en compte courant (quelques années en général).

Ces activités ne relevant pas du SIEG défini à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation font l'objet d'une comptabilité distincte des activités relevant du SIEG. Plus précisément, s'il n'est pas encore possible de ventiler l'actif du bilan financier des bailleurs sociaux entre les activités relevant du SIEG et les activités hors SIEG, les exigences comptables ont été renforcées ces dernières années pour permettre de distinguer, dans le résultat de l'activité des bailleurs, les charges et les produits se rapportant aux activités relevant du SIEG des charges et produits se rapportant aux activités hors SIEG. Depuis 2021, les bailleurs sociaux ont également l'obligation de renseigner au passif de leur bilan la part de leur résultat issue des activités relevant du SIEG.

Fin 2021, les résultats nets issus des activités hors SIEG (location de commerces et de parkings, activités de diversification...) pour l'ensemble des bailleurs sociaux représentaient environ 700 M€ soit 20% du résultat total des organismes de logement social.

Les sociétés de vente HLM : élargir le champ d'action des sociétés de vente HLM en leur permettant d'acquérir et vendre du logement locatif intermédiaire détenu par des filiales dédiées au LLI

Cette option nécessite de modifier l'article L. 422-4 pour permettre aux filiales dédiées au LLI de vendre leur patrimoine aux sociétés de vente qui procèdent déjà à l'acquisition et la vente de LLI détenus par des organismes définis à l'article L. 411-2 et aux SEM agréées logement social définies à l'article L. 481-1 du CCH. Actuellement, il n'existe qu'une seule société de vente HLM, l'ONV, filiale du groupe Action logement. Agissant à la fois dans l'acquisition et la vente de LLS mais aussi de LLI, une simple extension de compétences apparaît comme l'option la plus efficiente en termes opérationnel - une société déjà existante, et financier - nul besoin de capitaliser ex-nihilo une société de vente dédiée au LLI.

Cette option présente l'avantage d'éviter de créer des sociétés ex-nihilo qui devront être dotées non seulement d'un apport en fonds propres très importants pour pouvoir remplir l'objectif de rachat et vente de LLI mais également d'une montée en compétence des personnels sur le volet « vente et commercialisation ». En effet, structurellement et notamment en raison du niveau d'actifs (nombre de logements) détenus par les sociétés HLM comparativement aux structures dédiées au LLI, le besoin en fonds propres d'une société HLM est substantiellement moins important que pour les sociétés dédiées au LLI qui ont, en outre, moins de facilités d'emprunts sur les marchés financiers.

Enfin, cette option procède d'une logique de mutualisation de moyens permettant à une structure de vente de gérer l'ensemble du spectre du logement abordable (LLS et LLI).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Les articles L. 421-1, L. 422-2, L. 422-3 et L. 422-4 du code de construction et de l'habitation se trouvent modifiés.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Les mesures proposées sont conformes aux règles qui s'imposent aux bailleurs sociaux en tant que chargés d'un service d'intérêt économique général (SIEG) « logement social » prévu à l'article L.411-2 du CCH en application de l'article 106 du TFUE et de la décision de la Commission européenne prévue à cet article, dite décision « Almunia ».

Le logement intermédiaire ne relève pas du SIEG « logement social » (depuis le 1er janvier 2020, les logements intermédiaires directement produits et gérés par les bailleurs sociaux ne relèvent pas du SIEG) : cette activité n'est donc pas financée au moyen de ressources issues du SIEG logement social. Ainsi, les avances en compte courant que pourra consentir un bailleur social à l'une de ses filiales LLI devront mobiliser des fonds issus des activités ne relevant pas du SIEG.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Logements intermédiaires réalisés par les bailleurs sociaux et par leurs filiales

Les mesures visent à permettre un accroissement significatif de la production de logements locatifs intermédiaires par les bailleurs sociaux et leurs filiales.

En mettant de côté l'année 2023 exceptionnelle du fait du plan de rachat engagé par Action Logement et CDC habitat, la production par les bailleurs sociaux et leurs filiales de logements intermédiaires en 2021 et 2022 a été en moyenne de 6500 logements par an. Un accroissement de 50% de cette production, soit 3250 logements de plus par an sur la base d'un coût moyen observé de 220 000 € par logement représenterait un investissement supplémentaire de l'ordre de 715 millions d'euros par an dans le secteur immobilier.

Les sociétés de vente HLM :

5 958 ventes en bloc ont été réalisées par l'ONV depuis sa création le 13 février 2019 jusqu'au 31 décembre 2023. L'article aura pour effet d'augmenter ce volume d'activité en matière de LLI.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les logements intermédiaires gérés par les bailleurs sociaux, les avances en compte courant aux filiales LLI des bailleurs sociaux :

Les mesures proposées visent à favoriser le développement du logement intermédiaire, porté directement ou indirectement par les bailleurs sociaux qui sont en majorité des sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré.

Les sociétés de vente HLM :

Les ventes de LLI par les filiales dédiées au LLI aux sociétés de vente HLM permettront d'écouler un stock de logements et ainsi d'offrir indirectement un débouché économique et commercial aux promoteurs immobiliers par l'intermédiaire d'une augmentation des acquisitions menées par les filiales dédiées au LLI. Aussi, l'activité de promotion immobilière figure comme une composante essentielle du dynamisme de toute une filière (cabinet d'études, entreprises du BTP, etc.). Au regard des conditions de marché macro-économiques marquées par l'augmentation des taux et le renchérissement du coût des matières premières, la faculté pour les filiales LLI de pouvoir écouler un stock de logements auprès des sociétés de vente HLM permet d'assurer une forme de garantie d'écoulement de l'offre émanant de la filière de la promotion immobilière.

4.2.3. Impacts budgétaires

L'augmentation de la part maximale de logements intermédiaires susceptibles d'être gérés directement par les bailleurs sociaux, de même que la possibilité donnée aux bailleurs sociaux de pratiquer des avances en compte courant au bénéfice de leurs filiales LLI sont sans impact budgétaire.

L'extension de compétences des sociétés de vente à l'activité LLI ne requiert pas de crédits budgétaires supplémentaires, la capitalisation des sociétés étant fondée sur des apports en fonds propres issus de la PEEC. En outre, l'ONV a été doté dès sa création d'1 milliards d'euros en fonds propres ou quasi fonds propres ce qui lui permet largement d'assumer cette extension de compétences.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le développement de l'offre de logements locatifs intermédiaires vise à contribuer à la mise en oeuvre des politiques locales de l'habitat et notamment des objectifs de production de logements abordables définis dans les Programmes Locaux de l'Habitat.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Sans objet.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Les mesures proposées visent à favoriser la production de logements intermédiaires au bénéfice des ménages issus des classes moyennes qui ne sont pas éligibles au parc social ou qui ne sont pas prioritaires pour l'accès au logement social mais peinent à se loger dans le parc privé.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La production nouvelle de LLI répond, comme l'ensemble des logements neufs, aux normes en vigueur en matière d'accessibilité et peut donc accueillir des personnes en situation de handicap plus facilement que le parc existant qui requiert en général des travaux d'adaptation importants.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Les études menées par CDC Habitat et In'Li sur le profil des locataires du parc locatif intermédiaire mettent en évidence une sur-représentation des isolés et couples de jeunes (de moins de 30 ans). Le Logement Locatif Intermédiaire, par sa souplesse de gestion (l'absence de présentation préalable des candidatures en commission d'attribution des logements sociaux et l'absence d'obligation de disposer d'un numéro de demandeur de logement social permettent d'organiser une commercialisation locative s'appuyant directement sur les plateformes Internet « grand public » connues des classes moyennes et des jeunes en particulier) et par la typologie des logements produits (majoritairement des biens de une à trois pièces) est particulièrement adapté à l'accueil de jeunes.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les mesures proposées relatives aux logements intermédiaires, gérés par les bailleurs sociaux ou à leurs filiales LLI, visent à accroitre la production de logements intermédiaires pour répondre aux besoins identifiés localement, notamment dans les zones tendues où les loyers du parc privé sont sensiblement supérieurs à ceux du parc social.

Le dispositif proposé relatif aux sociétés de vente HLM a vocation in fine à permettre d'accroître le nombre de ventes de LLI par l'intermédiaire des sociétés de vente. Par conséquent, le dispositif vise à favoriser l'accession à la propriété des particuliers.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article s'appliquera de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion et à Mayotte (collectivités régies par l'article 73 de la Constitution).

Il ne s'appliquera pas aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution (Wallis-et-Futuna et la Polynésie Française), en Nouvelle Calédonie (articles 76 et 77 de la Constitution), dans les Terres australes et antarctiques française (article 72-3 de la Constitution), à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon (article 74 de la Constitution).

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

Article 8 - Permettre aux bailleurs sociaux de mieux financer leurs investissements grâce à une politique des loyers optimisée

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La fixation des loyers dans le parc social conventionné

Depuis 1977107(*), les logements locatifs sociaux financés au moyen d'un prêt locatif aidé d'intégration (PLAI), d'un prêt locatif à usage social (PLUS) ou d'un prêt locatif social (PLS) font l'objet d'une convention conclue entre l'Etat (ou le délégataire des aides à la pierre, le cas échéant, c'est-à-dire l'établissement public de coopération intercommunale ou le département auquel l'Etat a délégué la compétence d'attribution des aides à la pierre) et le bailleur.

Dans le cadre de cette convention, le bailleur s'engage notamment à louer les logements à titre de résidence principale à des ménages dont les ressources ne dépassent pas des plafonds arrêtés pour chaque type de financement accordé et en fonction de la localisation du logement. Le bailleur s'engage également à louer ces logements dans le respect d'un loyer maximal, défini en euros par mètre carré, ou d'une redevance maximale (lorsque les logements sont situés dans un logement-foyer108(*)) définie en fonction de la typologie des logements. Cette convention permet aux locataires ou aux résidents de bénéficier de l'aide personnalisée au logement (APL), sous réserve qu'ils respectent par ailleurs les conditions spécifiques applicables au bénéfice de cette aide (logement occupé à titre de résidence principale, logement décent, respect de plafonds de ressources spécifiques à l'APL).

Pour guider la fixation des loyers et redevances maximaux négociés dans les nouvelles conventions APL prévue à l'article L 352-2 , l'Etat rend chaque année un avis sur les valeurs maximales de zone109(*), propres à chaque type d'opération de construction ou de réhabilitation de logements, à ne pas dépasser. L'avis précise également les modalités de détermination du loyer maximal devant être inscrit dans les nouvelles conventions APL en fonction de ces valeurs maximales de zones mais également des caractéristiques techniques des logements produits (taille des logements, performances environnementales et techniques, qualité d'usage, critères définis localement...). Les valeurs maximales de zones sont révisées annuellement en fonction de la variation de l'indice de référence des loyers (l'IRL) du deuxième trimestre de l'année précédente. Pour 2024, s'agissant des logements autres que logements-foyers, ces valeurs sont comprises entre 5,11 euros par mètre carré pour un logement financé en PLAI situé en zone III et 14, 68 euros par mètre carré pour un logement financé en PLS en zone A bis.

Les loyers et redevances maximaux des conventions APL en cours sont quant à eux révisés annuellement, au 1er janvier, en fonction de l'indice de référence des loyers (IRL) du deuxième trimestre de l'année précédente.

En application de l'article 71 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, les loyers et redevances maximaux des conventions APL peuvent aussi être augmentés par avenant, dans la limite d'un taux fixé par décret, en cas de rénovation lourde dite « seconde vie ». Le projet de décret d'application de cette disposition est en phase de concertation. Les opérations dites de « seconde vie » sont des projets de réhabilitation lourde de bâtiments de logements sociaux existants qui conduisent à des modifications en profondeur des conditions d'habitabilité des logements pouvant se traduire par des restructurations ou regroupements de logements par exemple et avec des objectifs de performance environnementale très élevés.

Les loyers pratiqués inscrits dans les baux signés par les locataires auxquels sont attribués les logements et les redevances pratiquées inscrites dans les contrats d'occupation signés par les résidents des logements-foyers sont ensuite fixés en-deçà de ces loyers et redevances maximaux et révisés annuellement dans la limite de l'IRL. Sur autorisation, ils peuvent éventuellement être augmentés au-delà de l'IRL, dans la limite de 5 % en sus de la variation de l'IRL, dans le cadre d'un plan de redressement de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) destiné aux bailleurs sociaux en difficulté financière ou en cas de réhabilitation. Ces loyers et redevances pratiqués peuvent en revanche être librement augmentés à la relocation des logements, toujours dans la limite des maximas fixés dans la convention APL.

Au 1er janvier 2021, 48 % des loyers pratiqués dans les logements conventionnés étaient fixés à un niveau quasiment égal au montant du loyer maximal de la convention APL et les trois-quarts des logements conventionnés étaient loués à un loyer au moins équivalent à 90 % du montant du loyer maximal de la convention APL110(*). Ce constat est particulièrement marqué pour les logements financés en PLAI (logements aux plafonds de ressources les plus bas et aux plafonds de loyers parmi les plus bas), d'une part, et pour les logements situés en zone tendue, d'autre part.

A la relocation, la part des logements dont le loyer est très proche des plafonds dépasse les 60 % et pour les nouvelles mises en service, le taux de logements dont le loyer est très proche des plafonds dépasse les 80 %111(*).

Dans ces conditions, les marges de manoeuvre laissées aux bailleurs sociaux en matière de modulation des loyers sont très limitées sous les loyers maximaux des conventions APL qu'ils ont signées, toutes les marges possibles étant très souvent exploitées. Or, si, pour les logements relativement récents, les plafonds de la convention APL sont le plus souvent égaux aux plafonds réglementaires de l'avis loyer, pour les logements plus anciens, il existe un nombre plus important de conventions APL qui fixent un loyer initial inférieur au plafond de l'avis loyer de l'époque. Ce loyer initial a pu évoluer ensuite au même rythme que le loyer plafond fixé au niveau national, mais, partant d'un niveau initialement plus faible, il reste plus faible, alors même que les raisons qui avaient justifié la fixation d'un loyer initial faible ont souvent disparu (entre temps, d'autres logements sociaux ont été érigés, avec des loyers supérieurs car mis aux plafonds réglementaires ; des travaux ont été faits pour améliorer la qualité des logements...).

En outre, le secteur du logement social a été marqué par la mise en place successive de plusieurs produits de logements sociaux obéissant à des modalités de financement et de fixation des loyers variables. A titre d'exemple, si des logements HLM-O (antérieurs à 1977), PLA (réalisés dans les années 1980 et 1990 principalement) ou PLUS (postérieurs à 2000) visent les mêmes publics en termes de plafonds de ressources, les loyers maximaux des conventions APL associées aux opérations liées à ces produits peuvent varier sensiblement. Ainsi, en zone tendue, ces logements peuvent-ils avoir des loyers plafonds compris entre 5,2 €/m² et 6,4 €/m² et ce, indépendamment de leur qualité technique ou de leur attractivité.

Les produits locatifs des bailleurs sociaux

Les loyers constituent la ressource financière principale des bailleurs sociaux. En 2021, les produits locatifs constituent 69 % des produits d'exploitation des bailleurs sociaux :

Source : Les organismes de logement social, chiffres clés 2021, ministère du logement, DHUP.

Après une hausse importante en 2020, la médiane de la Capacité d'autofinancement (CAF) des sociétés anonymes (SA) d'HLM et des offices publics de l'habitat (OPH) qui sont des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), soit le flux financier dégagé par l'activité locative, se contracte de 0,6 point de CA locatif sur les exercices 2021 et 2022. Cette baisse est expliquée par l'augmentation sensible des coûts de gestion et de maintenance non compensée par la baisse des intérêts et la hausse des loyers. Pour autant, à près de 40%, cette CAF reste à un haut niveau sur la période de 2017-2022 et demeure supérieure à ce qu'elle était avant l'instauration de la réduction de loyer de solidarité (RLS).

En prenant en compte les produits de cession d'immeubles (la vente HLM), cette capacité d'autofinancement continue de se renforcer entre 2017 et 2021.

Source : DHUP

Depuis 2019, la médiane de la trésorerie des SA d'HLM et des OPH rapportée au logement augmente fortement et atteint un point haut sur la période récente, à 2 837€ par logement.

Source : DHUP

Tant en exploitation qu'en trésorerie, la situation financière des SA d'HLM et OPH apparait donc solide à fin 2022. Pris dans sa globalité, le monde HLM a ainsi réussi à absorber les conséquences de la RLS au sein de son modèle économique. A l'échelle micro-économique de chaque organisme, il convient toutefois de signaler l'existence de disparités assez fortes.

La hausse du livret A initiée en 2022 a eu une conséquence directe sur la capacité financière des bailleurs sociaux. En effet, les prêts destinés au financement des opérations de construction ou de rénovation du parc social, qui représentent jusqu'à 70% du coût des opérations, ont un taux révisable qui varie en fonction de l'évolution du taux du livret A. Ce dernier étant passé en deux ans de 0,5% à 3%, la charge financière des bailleurs sociaux, constituée par les intérêts des emprunts contractés, a augmenté sensiblement et ce, malgré les mécanismes de double révisabilité visant à limiter les conséquences de la variation du taux du livret A. Ces impacts commencent à être mesurés sur les comptes de résultat des organismes HLM pour l'année 2023.

En parallèle, les organismes HLM sont fortement sollicités par les pouvoirs publics pour participer à un effort de production soutenue d'une offre nouvelle de logement social (de 100 000 à 125 000 logements supplémentaires par an) et de rénovation énergétique et décarbonation du parc existant. Ces deux politiques requièrent des investissements massifs que les organismes HLM ne sont pas en mesure de réaliser intégralement dans le contexte économique actuel.

En effet, selon la Banque des territoires (Perspectives 2023 »), 112(*) « les obligations de rénovation énergétique issues de la loi Climat et résilience conduiraient à un fort accroissement du volume d'investissement en début de période de projection, avec un montant d'investissement passant de 17 Md€ en 2022 à 19 Md€ par an jusqu'en 2033, en euros constants, avec un pic enregistré à 20 Md€ en 2028 [...]. Plus globalement, sur l'ensemble de la période de projection, l'investissement des bailleurs sociaux se maintient en volume autour de la valeur moyenne de 24,5 Md€ par an en euros constants ».

Ce besoin d'investissement, conjugué à la situation macroéconomique actuelle, avec une dégradation attendue (et déjà en partie observée lors de la clôture des comptes 2023) des indicateurs d'exploitation pour 2023 et 2024 pourraient fragiliser le secteur à l'horizon 2040.

Enfin, la vente de logements sociaux est également impactée par la hausse des taux d'intérêt immobilier qui désolvabilise une partie des acquéreurs qui ont perdu près de 30% de leurs capacités d'emprunt entre 2022 et 2023 après une hausse de plus de trois points des taux d'intérêt (un point de hausse des taux se traduit par une diminution de la capacité d'emprunt de 8% à 10% environ) et se traduit par une stagnation voire un recul du nombre de logements mis en vente par les bailleurs sociaux qui voient leur principale ressource financière complémentaire aux loyers menacée de baisse.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le droit au logement est garanti par les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. L'existence de logements locatifs sociaux réservés aux ménages les plus modestes, dont les loyers sont plafonnés à un niveau inférieur à celui des loyers pratiqués dans le parc privé participe à garantir le respect de ce droit.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le respect de loyers sensiblement inférieurs aux loyers pratiqués dans le parc privé répond aux exigences du service économique d'intérêt général (SIEG) « logement social », service dont sont chargés les organismes d'habitation à loyer modéré (OHLM) et les sociétés d'économie mixte agréées pour exercer une activité de construction et de gestion de logements sociaux. Ce service est défini à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation en application de l'article 106 du TFUE et de la décision de la Commission européenne prévue à ce dernier article, soit la décision du 20 décembre 2011 relative à l'application de l'article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général, dite décision « Almunia ».

Plus précisément, l'article 4 de la décision susmentionnée du 20 décembre 2011 précise :

« Mandat

La gestion du service d'intérêt économique général est confiée à l'entreprise concernée au moyen d'un ou de plusieurs actes, dont la forme peut être déterminée par chaque État membre.

Ce ou ces actes mentionnent notamment :

a) la nature et la durée des obligations de service public;

b) l'entreprise et, s'il y a lieu, le territoire concerné ;

c) la nature de tout droit exclusif ou spécial octroyé à l'entreprise par l'autorité octroyant l'aide ;

d) la description du mécanisme de compensation et les paramètres de calcul, de contrôle et de révision de la compensation ;

e) les modalités de récupération des éventuelles surcompensations et les moyens d'éviter ces dernières, et

f) une référence à la présente décision. »

Le respect du loyer maximal fixé dans la « convention APL » constitue une des principales obligations de service public imposées par la France aux bailleurs sociaux dans le cadre du SIEG « logement social » 113(*). La première phrase du neuvième alinéa de l'article L. 411-2 du CCH défini ainsi notamment le SIEG « logement social » comme « la construction, l'acquisition, l'amélioration, l'attribution, la gestion et la cession de logements locatifs à loyers plafonnés, lorsqu'elles sont destinées à des personnes dont les revenus sont inférieurs aux plafonds maximum fixés par l'autorité administrative pour l'attribution des logements locatifs conventionnés dans les conditions définies à l'article L. 831-1 et dont l'accès est soumis à des conditions de ressources. »

La durée d'application de la convention APL, fixée en fonction de la durée d'amortissement du prêt consenti par l'Etat au bailleur social, vaut durée du mandat prévu à l'article 4 de la décision « Almunia ». Elle est par construction dérogatoire à la durée maximale du mandat de 10 ans prévue par la même décision, du fait des durées très longues d'amortissement des prêts finançant la construction de logements sociaux (comprise entre 30 ans et 80 ans).

Ainsi, les conventions APL, dans lesquelles sont fixés les montants maximaux des loyers, constituent un des actes par lesquels se manifeste le mandat prévu par la décision « Almunia », pour ce qui est du moins des points a) et b) de l'article 4 précité.

En tout état de cause, en application de l'article 4 de la décision « Almunia », les montants des loyers maximaux applicables aux logements sociaux, ainsi que les autres obligations de service public liées au SIEG, doivent figurer dans des normes opposables à l'Etat, aux bailleurs sociaux et aux tiers que sont les locataires, au risque de non-conventionalité du droit national relativement au respect des critères du SIEG.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Une étude comparative récente, l'Etat du logement en Europe 2023 114(*) , de Housing Europe, fédération européenne du logement public, coopératif et social, permet d'aboutir aux conclusions suivantes :

- la tendance à l'augmentation de coûts de construction est générale en Europe (Eurostat estime ainsi que le coût de la construction d'immeubles résidentiels neufs a augmenté de 20 % entre 2020 et 2022, contre 13 % entre 2011 et 2020),

- la tendance à la baisse de l'offre nouvelle de logements, programmation de logements sociaux y compris, est quasi-générale.

S'agissant des modalités de détermination des loyers applicables aux logements sociaux, celles-ci sont très variables d'un pays européen à l'autre (de même que les critères d'attribution des logements sociaux varient beaucoup selon les pays). Globalement, trois types de critères semblent susceptibles d'être pris en compte pour la fixation des loyers des logements sociaux : les coûts de production (la fixation des loyers contribue alors à l'équilibre financier de l'opération, c'est notamment le cas en Autriche, au Danemark, en République tchèque) ; les revenus des habitants (Irlande, Luxembourg) ; l'utilité ou les caractéristiques propres du logement (Pays-Bas, Espagne, Royaume-Uni)115(*). Des plafonds de loyers sont en plus fixés par l'Etat dans certains pays (France, Espagne, Pays-Bas).

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Une faculté d'augmentation maîtrisée et encadrée des loyers, principale ressource des OLS, contribuerait à maintenir une exploitation performante et à dégager des capacités d'investissement pour le secteur, dans un contexte où les montants d'investissements requis sont en croissance de long terme (voir 1.1. Cadre général).

Cependant cette augmentation est contrainte par les faibles marges de modulation laissées aux bailleurs sous les loyers maximaux des conventions APL (voir 1.1. Cadre général).

Afin de permettre aux bailleurs sociaux de dégager les capacités d'investissement dont ils ont besoin, il convient de leur permettre de déroger aux loyers et redevances maximaux fixés dans les conventions APL.

L'instauration d'une telle faculté exige de modifier la loi, et en particulier l'article L. 353-9-2 du CCH, qui fixe les modalités de révision et d'augmentation des loyers et redevances maximaux des conventions APL, tout en respectant les plafonds nationaux imposés notamment aux logements plus récents, suivant les recommandations formulées dans l'avis de loyers annuel.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif poursuivi par l'article de loi est de donner des marges financières aux bailleurs pour leur permettre d'investir à la hauteur de leurs besoins d'investissement qui concernent à la fois la rénovation du parc existant, notamment énergétique, et la production d'une offre nouvelle en quantité importante.

Pour maintenir le caractère social de l'occupation du parc des bailleurs et limiter la hausse du taux d'effort des locataires, il convient cependant de limiter la faculté d'augmenter les loyers et les redevances en la plafonnant au niveau des loyers maximaux qui auraient été pratiqués pour ces mêmes logements s'ils avaient étés acquis et conventionnés au moment de la relocation avec une mise au plafond initiale et revalorisation systématique à l'IRL, soit à des niveaux correspondant à ceux fixés chaque année, pour chaque type de financement et chaque zone, dans l'avis « loyers », avec application des majorations prévues par le même avis « loyers » (coefficient de structure, qui permet de valoriser la construction de petites typologies ; marges locales, qui permettent la prise en compte de certains éléments qualitatifs, en particulier en matière de rénovation énergétique). 116(*)

Ainsi cette disposition vise prioritairement certains résidences et ensembles anciens, dans lesquels des loyers maximaux peu élevés et très inférieurs aux loyers maximaux négociés actuellement pour l'offre nouvelle ne permettent pas d'engager des investissements importants et néanmoins nécessaires.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Différentes options ont été envisagées et écartées :

1- Suppression du conventionnement APL

Il s'agit d'une réforme relativement lourde administrativement pour tous les bailleurs à court terme, du fait de ses impacts importants sur la gestion locative - même si, à long terme, la simplification induite par l'absence de signature des conventions APL pourrait produire un effet bénéfique, les locataires restant protégés par un plafonnement réglementaire des loyers, comme cela se pratique déjà dans les Outre-mer.

Les plafonds de loyers à respecter par les bailleurs sociaux seraient fixés réglementairement (sans doute par arrêté) et non plus négociés dans le cadre de l'élaboration de la convention APL.

Les loyers pratiqués prévus dans les baux devraient être fixés dans la limite de ces plafonds de loyers réglementaires.

2- Assouplissement de la « nouvelle politique des loyers » mentionnée par l'article L. 445-3 du code de la construction et de l'habitat

La « nouvelle politique des loyers » permet au bailleur social de disposer d'une souplesse dans la fixation de ses loyers. En effet, le bailleur peut augmenter le loyer d'un logement au-delà du plafond fixé par la convention APL (en restant toutefois dans le plafond fixé par l'avis loyer), tout en diminuant, dans les mêmes proportions, le loyer d'un autre logement social.

Néanmoins, la « nouvelle politique des loyers » poursuit avant tout un objectif de mixité sociale accrue par une péréquation des loyers entre différents programmes, et est fondée sur un principe de recettes locatives constantes à l'échelle du bailleur. Elle ne permet donc pas en l'état de dégager des ressources complémentaires pour les bailleurs sociaux. Par ailleurs, il s'agit d'un processus administratif relativement lourd, nécessitant un avenant aux conventions d'utilité sociale et une approche locale. L'option retenue fait le choix de la simplicité et d'une application immédiate par les bailleurs sociaux.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Il est prévu que :

« Lors de la remise en location d'un logement, le bailleur peut fixer un loyer ou une redevance supérieur aux loyers et redevances maximaux fixés par la convention initialement conclue en application de l'article L. 831-1, dans la limite des montants maximaux qui pourraient être inscrits dans une telle convention si le logement concerné était acquis et conventionné à cette date. »

Plafonnement des augmentations

Le dispositif prévoit donc bien de limiter la faculté d'augmenter les loyers et les redevances en la plafonnant au niveau des loyers maximaux qui auraient été pratiqués pour ces mêmes logements s'ils avaient intégré nouvellement le parc social au moment de leur relocation, soit, comme précisé au point 2.2., à des niveaux correspondant à ceux fixés chaque année, pour le type de financement et la zone des logements concernés, dans l'avis « loyers », avec application des majorations prévues par le même avis de loyer (coefficient de structure, qui permet de valoriser la production de petites typologies ; marges locales, qui permettent la prise en compte de certains éléments qualitatifs, en particulier en matière de rénovation énergétique). Les modalités de révision des loyers pratiqués prévus dans les baux en cours n'étant pas modifiées par ailleurs, cette augmentation dérogatoire des loyers et redevances n'affectera effectivement les loyers pratiqués qu'à la relocation des logements.

Vecteur de fixation des loyers et redevances augmentés

Il n'est pas prévu que les conventions APL soient « avenantées » pour prévoir la fixation du nouveau loyer.

Le décret en Conseil d'Etat d'application, et le cas échéant, ses arrêtés d'application, préciseront les valeurs maximales de loyer retenues par zone et par type de produit locatif (PLAI, PLUS, et PLS), ainsi que les modulations possibles de ces valeurs par certains coefficients (coefficient de structure lié à la taille des logements) et par certains taux (marges dorénavant nationales liées à la qualité des logements).

La disposition s'interprète donc comme une faculté d'opting out, permettant au bailleur, en fonction de besoins de financement qu'il définit librement, de s'affranchir des loyers et redevances maximaux fixés dans la convention APL, dans la limite des loyers et redevances maximaux par zone et par produit fixés dans l'avis-loyer pour le neuf et le décret d'application.

Le bailleur peut augmenter les loyers et redevances en une fois ou en plusieurs fois, à la fréquence qu'il désire, mais toujours à la relocation, dans les limites prévues par le nouvel article L. 353-9-2.

Il n'est pas prévu de dispositif d'autorisation ou de contrôle a priori du choix du bailleur de recourir à cette faculté. L'objectif est de donner un maximum de marges de manoeuvre au bailleur qui est le mieux placé pour apprécier l'adéquation de sa politique de loyers à la demande locale et à la qualité de son patrimoine.

Indexation des valeurs augmentées

Les valeurs de loyers et de redevances augmentées évolueront chaque année dans la limite de l'IRL, conformément à la règle fixée à l'article L.353-9-1 du CCH.

Information sur les valeurs augmentées en cas de cession

Afin d'assurer l'information des éventuels preneurs des logements cédés sur les servitudes d'utilité publique qui grèvent la valeur de ces biens, le décret d'application prévoira les modalités de publication de ces valeurs modifiées, afin de rendre applicables les dispositions de l'article L. 353-17 du CCH, qui prévoit que :

« Par dérogation à l'article L. 353-3, les conventions concernant les logements mentionnés à l'article L. 353-14 prennent effet à leur date de signature.

En cas de mutation entre vifs à titre gratuit ou onéreux des biens faisant l'objet de ces conventions, l'acte de cession de ces biens doit faire mention desdites conventions.

La validité de la mutation est subordonnée à l'engagement pris par le nouveau propriétaire de respecter toutes les stipulations des conventions. »

Cumul avec le dispositif « seconde vie »

Le dispositif est en droit également ouvert pour les logements concernés par la faculté d'augmenter les loyers dans le cadre d'une rénovation lourde « seconde vie », prévue à l'article L. 353-9-2 du CCH, en application de l'article 71 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024. Ouvert aux logements de plus de 40 ans, présentant une étiquette énergétique E, F ou G avant travaux et devenant ensuite très performants (en atteignant par exemple la classe A ou B), le dispositif « Seconde vie » ouvre aux bailleurs sociaux le bénéfice d'un taux de TVA à 5,5% sur l'ensemble des travaux et d'une exonération de taxe foncière semblable à celle consentie pour la production neuve.

Les loyers ou redevances maximaux qui auront été augmentés par avenant à la convention APL en application des dispositions de l'article 71 de la loi de finances pour 2024 (c'est-à-dire pour tenir compte de l'amélioration des performances énergétique et environnementale du logement à l'issue de travaux répondant au cahier des charges du dispositif « seconde vie ») pourront conduire à nouveau à des augmentations de loyers , en application de la présente mesure, dans la limite des valeurs maximales. 

Application aux conventions en cours

Le dispositif doit être appliqué aux conventions APL en cours. Le dispositif ne porte pas atteinte à une situation légalement acquise dans la mesure où il ne consiste qu'à offrir la possibilité nouvelle d'une dérogation à la convention APL, sous réserve que les parties prenantes à cette convention en conviennent. En tant que tel, le dispositif n'impose aucune modification des conventions APL en cours.

Effets sur les baux en cours

Les conventions APL restent en vigueur pour toutes leurs dispositions autres que le loyer maximal ou la redevance maximale, en particulier en ce qui concerne leur durée, liée à la durée d'amortissement du prêt consenti par la Caisse des dépôts et consignations.

Les augmentations de loyers et redevances décidées par le bailleur se traduiront dans les loyers pratiqués uniquement au moment de la relocation des logements concernés. Ce point est précisé dans la rédaction de l'article.

Les loyers pratiqués des locataires disposant d'un bail en cours continueront à être régis par les dispositions de l'article L. 353-9-3, qui dispose que :

« Les loyers et redevances pratiqués pour les logements faisant l'objet d'une convention conclue en application de l'article L. 831-1, à l'exception des logements mentionnés à l'article L. 321-8, sont révisés chaque année au 1er janvier en fonction de l'indice de référence des loyers prévu au I de l'article 17-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. La date de l'indice de référence des loyers prise en compte pour cette révision est celle du deuxième trimestre de l'année précédente.

L'autorité administrative peut autoriser, pour une durée qu'elle détermine, un organisme à déroger au premier alinéa du présent article soit dans le cadre d'un plan de redressement approuvé par la Caisse de garantie du logement locatif social, soit pour une partie du patrimoine de l'organisme ayant fait l'objet d'une réhabilitation. Toutefois, d'une année par rapport à l'année précédente, la hausse de loyer est plafonnée à 5 % en sus de la variation de l'indice de référence des loyers mentionné au même premier alinéa. Sous réserve de l'accord des associations représentatives de locataires et des locataires dans les conditions fixées à l'article 42 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, cette hausse peut être supérieure à ce plafond. ».

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La mesure proposée nécessite de compléter les dispositions de l'article L. 353-9-2 du code de la construction et de l'habitation.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Conformité aux règles relatives au mandat du SIEG

La fixation par circulaire des loyers maximaux dérogatoires aux loyers maximaux des conventions APL permet de répondre aux exigences de la décision « Almunia » relative au mandat confié aux bailleur sociaux en matière de fixation de la nature de l'obligation de service public pour ce qui concerne les loyers maximaux du parc social (point a) de l'article 4 précité de la décision « Almunia »).

Contrôle de l'absence de surcompensation du fait de la disposition

Les paramètres de calcul, de contrôle et de révision de la compensation, ainsi que les modalités de récupération des éventuelles surcompensations et les moyens d'éviter ces dernières, pour reprendre les termes de la décision « Almunia », permettront de s'assurer a priori et a posteriori que les prêts, aides et avantages fiscaux consentis pour la construction des logements dont les loyers augmentent selon la volonté du bailleur ne sont pas constitutifs d'une surcompensation des obligations liées au SIEG « logement social », c'est-à-dire que ces avantages n'excèdent pas le strict besoin du bailleur pour l'exercice du SIEG (faute de quoi le « trop perçu » aurait vocation à être remboursé par le bailleur).

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Le rendement de la mesure dépend du nombre de logements dont les loyers actuels ne sont pas aux plafonds de l'avis-loyer, de l'écart de loyers entre le loyer pratiqué actuellement et le loyer de l'avis-loyer, du taux de rotation de ces logements, et du pourcentage de logements libérés sur lesquels le bailleur social souhaitera appliquer la hausse à la relocation.

L'évaluation macroéconomique globale de la mesure est très sensible à certains paramètres qu'il est difficile d'évaluer à ce stade, notamment l'utilisation de la faculté d'augmenter leurs loyers par les bailleurs eux-mêmes, et la rotation annuelle dans le parc social potentiellement concerné par l'application de la mesure, forcément différente de celle constatée dans le patrimoine déjà soumis aux loyers plafonds.

En outre, le gain financier va augmenter avec le temps, puisqu'il va s'appliquer chaque année à une nouvelle cohorte de logements libérés, qui viendra s'ajouter aux logements dont les loyers auront déjà pu être augmentés à la relocation les années précédentes.

Le produit attendu d'une telle mesure peut être estimé à plusieurs centaines de millions d'euros par an à terme, destiné aux bailleurs sociaux (la masse totale des loyers quittancés dans le parc social était d'environ 22 milliards d'euros fin 2022 ; la mesure pourrait ainsi se traduire par un accroissement à terme des recettes locatives des bailleurs de 3% à 5% supérieur au produit qui aurait été perçu sans la mesure proposée par le projet de loi).

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les produits d'exploitation des SA d'HLM, et des coopératives HLM et des SEM qui mettront en oeuvre l'augmentation des loyers prévues par la disposition augmenteront à due proportion.

Cela aura un effet à la hausse sur leur capacité d'autofinancement.

En considérant qu'environ 35% des logements sociaux (soit 2 millions de logements environ) présentent actuellement des loyers inférieurs aux loyers plafonds APL et seraient susceptibles de bénéficier des dispositions envisagées et que le taux de rotation moyen actuel est de l'ordre de 7%, sur la base d'une augmentation moyenne des loyers à la relocation de 15%, ce sont environ 0,4% de produits locatifs complémentaires annuellement qui pourraient être encaissés par les bailleurs sociaux soit 92 M€ en 2025 environ et à un horizon de 15 ans, environ 1,2 milliards d'euros (hors prise en compte de l'indexation des loyers).

4.2.3. Impacts budgétaires

L'estimation suivante permet d'évaluer l'augmentation potentielle des aides personnelles au logement, à nombre de ménages allocataires constant et limitée au locatif ordinaire (hors logements-foyers, qui représentaient 240 000 ménages en aide personnalisée en 2023).

En locatif ordinaire, pour le calcul de l'APL, le loyer réel (hors charges) dont s'acquitte le ménage allocataire est pris en compte, dans la limite d'un loyer plafond (Lp), fonction de la zone (1, 2 ou 3) du logement et de la composition familiale. Autrement dit, si le loyer réel est supérieur au Lp, on prend en compte la valeur du loyer plafond pour le calcul de l'aide. Les loyers plafonds sont spécifiques aux APL, et définis dans l'arrêté du 27 septembre 2019 relatif au calcul des aides personnelles au logement et de la prime de déménagement. Par exemple depuis le 01/01/2024, le Lp pour une personne seule sans personne à charge, en zone 1, est de 319,30 €. Les charges sont quant à elles prises en compte de manière forfaitaire et définies au sein du même arrêté.

A situation donnée (ressources, composition familiale, etc.) et constante, le montant de l'aide va ainsi augmenter avec le loyer (hors charges) (globalement à due concurrence), jusqu'à atteindre une aide maximale, à partir du loyer plafond. Un mécanisme de dégressivité de l'aide, non étudié ici car marginal pour l'aide personnalisée au logement, est prévu pour des loyers trop élevés (article D. 823-16 du CCH).

Ainsi, pour des ménages déjà au Lp, une augmentation du loyer réel n'aurait aucun impact sur le montant de l'APL (hors effet éventuel, mais a priori limité, de dégressivité de l'aide). Pour les ménages inférieurs au Lp, l'augmentation de loyer serait globalement compensée par une augmentation de l'APL (dans la limite du Lp).

En juin 2023, près de 38 % (soit environ 900 000 ménages) des ménages bénéficiaires d'une aide personnalisée au logement présentaient un loyer inférieur au Lp (dont probablement une part plus importante sur les logements anciens à bas loyers particulièrement concernés par la mesure). Un majorant du coût potentiel peut être approximé en étudiant l'impact sur le montant de prestation versé, dans le cas où l'ensemble des logements seraient portés au Lp (en prenant l'hypothèse que les relocations se font pour des compositions familiales similaires). En première approximation, cet impact serait au maximum de l'ordre de 50 % de la hausse du produit locatif induite par la mesure.

En prenant pour hypothèse que la part de ménages bénéficiant des APL reste à peu près constante (un peu plus de 40% des locataires), et que les ménages APL-isés actuels des logements appelés à être reloués à des loyers plus élevés seront remplacés par des ménages également bénéficiaires des APL présentant un profil socio-économique (taille du ménage et revenus) voisin, le coût unitaire (complément d'APL) résultant des simulations menées sur des cas types s'élèverait en moyenne à 65 € par mois et par ménage et représenterait à terme 60 M€ au total par mois. Avec un taux de rotation de 7% en moyenne dans le parc social, ce coût ne sera atteint que dans une quinzaine d'année. Il pourrait être de 4,2 millions d'euros en 2025 par mois soit environ 50 M€ sur l'année et de 8,4 millions d'euros par mois en 2026 soit environ 100 M€ sur l'année.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les collectivités délégataires des aides à la pierre pourront échanger avec les bailleurs quant aux politiques de loyers, mais le bailleur bénéficiera d'une marge de manoeuvre unilatérale qu'il pourra activer s'il le souhaite. Toutefois, la plupart des nouveaux logements sociaux étant au plafond de l'avis-loyer, ces marges sont pour la plupart du temps déjà activées, sous le contrôle des collectivités qui, le plus souvent, acceptent cette mise au plafond nécessaire pour l'équilibre financier.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Sans objet.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La mesure n'aura aucun impact sur les locataires en place, la faculté offerte aux bailleurs ne s'exerçant qu'à la relocation du bien.

La mesure conduira à corriger une inéquité du système actuel, qui fait que l'occupant d'un logement social paye un loyer très supérieur à celui d'un logement social ancien. De plus, si ce nouveau loyer demeure en dessous du loyer plafond Lp du barème de l'APL, l'augmentation de loyer est globalement compensée par une augmentation de l'APL. De même, pour les loyers supérieurs, toute la partie de l'augmentation inférieure au Lp sera globalement couverte par l'APL pour les ménages éligibles. Les ménages les plus modestes seront donc toujours solvabilisés par les APL.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure n'a pas d'impact sur les locataires en place. Les modalités de révision des loyers pratiqués prévus dans les baux en cours n'étant pas modifiées, cette augmentation dérogatoire des loyers et redevances maximaux n'affectera les loyers pratiqués qu'à la relocation des logements. Ainsi, le nouveau locataire d'un logement ancien paye le même loyer que le nouveau locataire d'un logement neuf. Si ce nouveau loyer demeure en dessous du loyer plafond Lp du barème de l'APL, l'augmentation de loyer est globalement compensée par une augmentation de l'APL. De même, pour les loyers supérieurs, toute la partie de l'augmentation inférieure au Lp est globalement couverte par l'APL pour les ménages bénéficiaires de l'APL.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été menée.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions entreront en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

Elles s'appliquent aux conventions APL en cours.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article s'appliquera de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion et à Mayotte (collectivités régies par l'article 73 de la Constitution).

Il ne s'appliquera pas aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution (Wallis-et-Futuna et la Polynésie Française), en Nouvelle Calédonie (articles 76 et 77 de la Constitution), dans les Terres australes et antarctiques française (article 72-3 de la Constitution), à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon (article 74 de la Constitution).

5.2.3. Textes d'application

Il n'est pas prévu de décret d'application de cet article. L'avis loyer annuel précisera les modalités de détermination des loyers maximaux dérogatoires.

Article 9 - Diversifier les ressources des bailleurs

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Clarifier le cadre législatif applicable aux Sociétés civiles de construction vente (SCCV) et leur permettre de recevoir des avances en compte courant de la part des organismes actionnaires

La loi ALUR du 25 mars 2014 a permis aux bailleurs sociaux et promoteurs privés de se rapprocher dans le cadre d'une structure commune afin de réaliser des opérations immobilières en co-promotion mêlant logements en accession libre et logements sociaux. Ce dispositif expérimental, d'une durée limitée de six ans, permettait aux organismes HLM de constituer des Sociétés civiles de construction vente (SCCV) avec des promoteurs privés. Depuis, ce dispositif a été pérennisé par la loi ELAN du 23 novembre 2018.

Alors que les possibilités de partenariats entre les bailleurs sociaux et des partenaires publics ou privés étaient limitées par le Code de la construction et de l'habitation (CCH), le législateur a souhaité « favoriser la construction de logements sociaux dans des programmes privés qui se verront ainsi instiller une mixité sociale », en offrant la possibilité aux OPH, SA HLM, et sociétés coopératives, en vertu respectivement des articles L. 421-1, L. 422-2 et L. 422-3 du CCH, « d'acquérir dans le cadre de l'article L. 261-1, à due concurrence de leurs apports, des logements mentionnés à l'article L. 411-2 auprès d'une société civile immobilière dans laquelle elles détiennent des parts et dont l'unique objet est la construction d'immeubles d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation en vue de leur vente, à la condition que cette société réalise au moins 25 % des logements mentionnés à l'article L. 411-2 et soit constituée pour une durée n'excédant pas dix ans ».

Les conditions de constitution de ces sociétés sont les suivantes :

- acquisition en vente en état futur d'achèvement (VEFA) de logements sociaux auprès de la SCCV par le bailleur social à due concurrence de ses apports ;

- réalisation d'au moins 25% de logements sociaux par la SCCV, en prenant en compte le nombre de logements, et non pas la surface ;

- possibilité de réaliser des logements et de l'immobilier professionnel, mais impossibilité de réaliser de l'immobilier commercial ;

- impossibilité, pour le bailleur social, de réaliser des avances en compte courant à la SCCV. Cette impossibilité est contradictoire avec les principes généraux des SCCV qui prévoient que chaque associé participe aux besoins en financement de la société à due proportion du capital qu'il détient au sein de la société, cette participation prenant en général la forme d'avances en comptes courants d'associés.

Permettre aux sociétés anonymes (SA) de vente HLM de dissocier la nue-propriété et l'usufruit pour pouvoir acquérir du patrimoine en zone tendue

L'usufruit locatif social (ULS) consiste à démembrer la propriété en distinguant la nue-propriété (droit de disposer du bien) de l'usufruit (le droit d'utiliser la chose et d'en récolter les fruits). Ainsi, la nue-propriété est conservée par des investisseurs privés qui financent l'acquisition des terrains et la construction sans prêt aidé de l'État ; l'usufruit est ensuite acquis par un bailleur social qui met le bien en location, en perçoit les loyers et assure l'entretien de l'immeuble.

Concrètement, l'investisseur fait l'acquisition de la nue-propriété d'un bien immobilier neuf et n'en supporte en moyenne que 60 % du prix, car il ne dispose pas, dans l'immédiat, de l'usufruit. L'usufruit est acquis par un bailleur social qui supporte donc le coût d'acquisition de l'usage temporaire de l'ensemble immobilier à hauteur en moyenne de 40 % de son prix. Ce droit d'usufruit est consenti pour une durée minimale de 15 ans conformément à l'article L.253-1 du CCH. Le bailleur social utilise le bien en le mettant à disposition de locataires sous plafond de ressources contre le versement d'un loyer. Cet usufruit est temporaire, la durée étant fixée dans le bail. À terme, l'acquéreur de la nue-propriété récupère la pleine propriété du logement.

L'investisseur en nue-propriété achète un bien à moindre coût dans la mesure où la propriété de l'immeuble sans l'usufruit en diminue sa valeur, de 30 à 50 % et le bailleur social acquiert l'usufruit à une valeur inférieure à la pleine propriété. Ce type de montage apparaît particulièrement adapté pour les opérations de construction de logements en zone tendue où le coût du foncier représente un frein à l'équilibre financier des opérations de construction. Alors même que les principaux besoins en logements sont en zone tendue, les bailleurs sociaux éprouvent des difficultés à proposer des opérations équilibrées financièrement ce qui contrarie fortement les objectifs ambitieux de construction de logements sociaux (85 000 agréments pour un objectif de 125 000 logements par an). Les opérations d'usufruit locatif social présentent en outre l'intérêt de ne pas mobiliser de fonds propres de la part du bailleur social pour le financement de l'opération et de présenter un profil économique plus intéressant qu'une opération en pleine propriété en dégageant des excédents de trésorerie plus rapidement.

Organismes HLM au sens de l'article L.411-2 du CCH, les sociétés de vente HLM sont prévues à l'article L.422-4 du même code. Depuis leur création par la loi ELAN, il n'existe actuellement sur le territoire national qu'une seule société de vente. Ainsi, l'Opérateur National de Vente (ONV), filiale du groupe Action logement, a pour seul objet l'acquisition et l'entretien de biens immobiliers appartenant à des offices publics de l'habitat, à des sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré, à des sociétés anonymes coopératives de production et à des sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif d'habitations à loyer modéré ou à des fondations d'habitations à loyer modéré, à des sociétés d'économie mixte agréées en application de l'article L. 481-1 du CCH et à des organismes qui bénéficient de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 du CCH, en vue de la vente de ces biens. L'ONV doit permettre à l'organisme d'habitations à loyer modéré de céder plusieurs logements aux termes d'un même acte de vente et donc d'en percevoir l'intégralité du prix, de telle sorte que le bailleur social puisse réinvestir aussitôt les sommes ainsi perçues dans une opération de construction ou de réhabilitation. Cet outil est ouvert à tous les bailleurs sociaux qui ont la possibilité, sur la base du volontariat, de proposer à la vente des immeubles entiers que l'organisme créé portera, le temps du transfert de propriété, aux locataires et acquéreurs intéressés.

Dans le droit en vigueur, les sociétés de vente HLM sont dans l'impossibilité de s'insérer dans le dispositif d'ULS, l'interdiction expresse leur en étant faite par la loi (article L.422-4 du CCH).

Clarifier le régime de la VEFA inversée

La vente en état futur d'achèvement (VEFA) dite « inversée » (inversée par rapport à l'achat en VEFA coutumière des bailleurs sociaux) est un mécanisme qui permet à un organisme HLM de vendre des logements non-sociaux d'un programme majoritairement composé de logements sociaux à « une personne privée ».

Il s'agit de permettre la réalisation de programmes mixtes dans lesquels le bailleur social garde la maîtrise d'ouvrage, à la différence de l'achat en VEFA par un bailleur social.

Dans le droit en vigueur (article L. 433-2 du CCH) issu de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, la part maximale de logements du programme pouvant être vendus à « une personne privée » est de 30%.

Supprimer l'autorisation du représentant de l'Etat pour les OHLM souhaitant prendre des parts ou actions dans des SA HLM + prévoir la possibilité d'accorder des avances en compte courant à ces sociétés

Les organismes d'habitations à loyer modéré peuvent souscrire des parts ou des actions dans des sociétés de projet d'aménagement117(*) ou pouvant conclure une convention de projet urbain partenarial. Cette souscription de parts ou d'actions est soumise à l'accord préalable du représentant de l'Etat dans le département de réalisation de l'opération envisagée (articles L. 421-2, L. 422-2 et L. 422-3 du CCH). Dans le cadre de consultations publiques organisées par des collectivités locales en vue de désigner un concessionnaire d'aménagement, cette condition d'accord préalable peut fragiliser la candidature déposée par un organisme HLM avec un opérateur privé avec lequel il a prévu de s'associer au sein d'une société de projet.

Dans le droit en vigueur, il n'est pas possible pour les sociétés d'HLM d'accorder des avances en compte courant à ces sociétés d'aménagement (L. 423-15 du CCH).

Supprimer l'autorisation des ministres du logement et de l'économie pour les avances en compte courant et les prêts participatifs entre OHLM

Le CCH prévoit un régime de déclaration aux ministres chargés du logement et de l'économie avec droit d'opposition sous quinze jours de ces ministres : a) pour les avances en compte courant consenties par un OHLM à un autre OHLM ou à un membre de son groupe et b) pour les prêts participatifs consentis par un OHLM aux mêmes organismes (premier alinéa de l'article L. 423-15 du CCH).

Le CCH prévoit également pour ces avances en compte courant et ces prêts participatifs une obligation d'information spécifique de la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et de la société de garantie des organismes d'habitations à loyer modéré contre les risques d'opérations immobilières (second alinéa de l'article L. 423-15 du CCH).

Le nombre de demandes reçues par les ministères du logement et de l'économie est le suivant:

- En 2024 : 3 dossiers d'avance et un avenant à une convention d'avance ;

- En 2023 : 17 dossiers d'avance et 2 prêts ;

- En 2022 : 15 dossiers d'avance et 2 prêts ;

- En 2021 : 21 dossiers d'avance et 1 prêt.

Les dispositions modifiées par le présent article n'ont pas donné lieu à contentieux. Elles n'ont pas non plus donné lieu à sanction de la part de l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) qui effectue le contrôle a posteriori du respect par les bailleurs sociaux de la législation et de la réglementation qui s'appliquent à leurs activités (articles L. 342-1 et suivants du CCH).

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Sans objet.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Les bailleurs sociaux sont chargés d'un service d'intérêt économique général (SIEG).

Ce service est défini à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation en application de l'article 106 du TFUE et de la décision de la Commission européenne prévue à ce dernier article, soit la décision du 20 décembre 2011 relative à l'application de l'article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général, dite décision « Almunia »118(*).

Plus précisément, l'article 4 de la décision susmentionnée du 20 décembre 2011 précise :

« Mandat

La gestion du service d'intérêt économique général est confiée à l'entreprise concernée au moyen d'un ou de plusieurs actes, dont la forme peut être déterminée par chaque État membre.

Ce ou ces actes mentionnent notamment :

a) la nature et la durée des obligations de service public;

b) l'entreprise et, s'il y a lieu, le territoire concerné ;

c) la nature de tout droit exclusif ou spécial octroyé à l'entreprise par l'autorité octroyant l'aide ;

d) la description du mécanisme de compensation et les paramètres de calcul, de contrôle et de révision de la compensation ;

e) les modalités de récupération des éventuelles surcompensations et les moyens d'éviter ces dernières, et

f) une référence à la présente décision. »

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Sur les 12 mois de la période allant de décembre 2022 à novembre 2023, 372 500 logements ont été autorisés à la construction, soit 25% de moins que sur les 12 mois précédents.

Sur cette même période, un peu moins de 295 000 logements ont été mis en chantier, soit le niveau le plus bas mesuré depuis 2001.

Concernant spécifiquement le logement social, le nombre d'agréments délivrés en métropole hors ANRU en 2023 s'est établi à environ 82 000 (en baisse de 15% par rapport à 2022), soit un niveau inférieur à celui de l'année 2020 marquée par la Covid.

Dans ce contexte, les bailleurs sociaux jouent évidemment un rôle central dans la consolidation de l'offre de logements sociaux, mais leur participation à de nombreux projets « mixtes » avec des promoteurs privés (sociétés civiles de construction et de vente, sociétés d'aménagement, vente en VEFA de parties de programmes mixtes à des personnes privée) conforte également le rôle contra-cyclique qu'ils peuvent jouer, directement et indirectement, dans le rétablissement de la trajectoire globale de l'offre de logements.

Si l'intérêt des promoteurs privés pour la co-promotion est évidente, en particulier dans le contexte actuel, celle-ci offre également aux bailleurs sociaux des opportunités intéressantes en matière de localisation du foncier à bâtir, dans le cadre de projets mixtes, et de maintien de leurs compétences en matière de maîtrise d'ouvrage (programmation immobilière, conception des ouvrages...). Elle permet en outre, par la distribution des résultats de l'opération de promotion au bailleur social à due proportion de sa participation au capital de la société de co-promotion, de bénéficier d'une partie de la marge de promotion dégagée par le projet.

Ainsi, afin de contribuer à répondre à cette crise historique de l'offre de logements, il apparaît souhaitable :

- de permettre aux OHLM de s'associer, dans un cadre juridique adapté et sécurisé, avec les promoteurs privés afin de produire des opérations mixtes comportant des logements sociaux, des logements locatifs intermédiaires et des logements « libres », dans l'intérêt respectif des différents partenaires en matière de partage des risques et dans le respect des règles relatives au service d'intérêt économique général (SIEG) « logement social » ;

- de permettre une allocation optimale du capital, en fonction des investissements programmés, entre les OHLM entre eux et entre les OHLM et les sociétés dans lesquelles ils peuvent prendre part, en libéralisant le régime des avances en compte courant entre les OHLM et leurs partenaires et le régime de la cession de la nue-propriété des logements entre les OHLM qui produisent les logements et ceux qui ont vocation à les vendre ;

- de supprimer les procédures d'autorisation superflues en matière de participation à certaines sociétés et en matière d'avances en compte courant, afin de réduire au maximum les délais de mise en oeuvre des projets.

Les règles concernées sont toutes fixées par la loi ; leur modification réclame donc de passer par la loi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Cet article a pour objet de diversifier les ressources des bailleurs sociaux et de simplifier leurs prises d'initiative afin d'augmenter leurs ressources et leur capacité d'investissement dans la production et la rénovation.

Plus précisément, les objectifs poursuivis par le projet d'article sont :

a) la clarification et la sécurisation juridiques de la participation par les bailleurs sociaux aux sociétés civiles de construction et de vente de logements (SCCV) et du recours par les mêmes à la vente en état futur d'achèvement à des personnes privées, dite « VEFA inversée » ;

En effet, la pratique des organismes HLM en matière de constitution de SCCV tend à mettre en évidence certaines ambiguïtés, qui fragilisent le dispositif et incite à clarifier certaines dispositions du CCH notamment concernant l'objet de ces SCCV, le niveau maximal des apports des OHLM, le critère d'appréciation du seuil de logements locatifs sociaux à réaliser, la capacité à réaliser des avances en compte courant pourtant indispensable au financement des SCCV, et le recours à la vente en l'état futur d'achèvement.

De même pour la VEFA « inversée », des interrogations sur la capacité légale, dans le droit en vigueur, à vendre à des particuliers au détail, au-delà de la vente à des institutionnels en bloc, se sont exprimées dans le cadre d'échanges entre les services du ministère chargé du logement et les fédérations représentant le secteur HLM.

b) la diversification des ressources de financement des bailleurs (possibilité pour les bailleurs sociaux de vendre la nue-propriété de logements sociaux à l'Opérateur national de vente en conservant l'usufruit attaché à ces logements, possibilité d'apport par avances en compte courant aux SCCV et aux sociétés d'aménagement dans lesquelles elles ont des participations, possibilité d'augmenter la part maximale de logements du programme pouvant être vendus à des personnes privées en VEFA inversée) ;

c) la simplification des procédures relatives, d'une part, aux avances en compte courant et aux prêts participatifs accordés par les OHLM à d'autres OHLM et, d'autre part, à la participation des OHLM aux sociétés d'aménagement, par la suppression des autorisations les encadrant. L'objet de cet article est non de tirer les conséquences d'éventuelles sanctions administratives ou judiciaires, mais de clarifier le cadre juridique en vigueur afin de permettre à l'avenir un meilleur financement de l'offre de logements abordables.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Le statu quo, avec la persistance des réticences des bailleurs à recourir à la co-promotion pour cause d'insécurité juridique et de lourdeurs bureaucratiques.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le statu quo mentionné comme option envisagée n'entraînerait pas d'impossibilité légale pour les bailleurs sociaux de recourir à la co-promotion, puisque les modifications retenues dans cet article ne créent aucun véhicule nouveau, à l'exception de l'acquisition en nue-propriété par une SA de vente HLM, qui ne constitue pas un véhicule pour la co-promotion à proprement parler.

Les modifications prévues à cet article se contentent d'améliorer les véhicules existants, et, sans ces améliorations, aucun recours accru à la co-promotion ne pourrait être attendu, et le cas échéant politiquement exigé, de la part des bailleurs sociaux, soit, dans le détail :

Clarifier le cadre législatif applicable aux SCCV et leur permettre de recevoir des avances en compte courant de la part des organismes actionnaires

L'article de loi clarifie le régime en vigueur, en prévoyant que :

- les opérations peuvent dorénavant comporter des locaux à usage commerciaux, de manière annexe et accessoire (commerces « de pied d'immeubles ») ;

- les OHLM peuvent acquérir des logements locatifs intermédiaires, en sus des logements sociaux prévus à l'article L.411-2 du CCH, auprès des SCCV, en recourant à la VEFA ;

- l'acquisition en VEFA s'effectue par dérogation au régime de la VEFA prévu à l'article L.433-2 du CCH, ce qui doit permettre aux OHLM de conserver leur compétence en matière de maîtrise d'ouvrage, dans la mesure où ils pourront offrir des prestations de service à la SCCV en matière de conception et de programmation, y compris lorsque la SCCV, du fait de son contrôle éventuel par l'OHLM, est réputée être pouvoir adjudicateur au sens du code de la commande publique ;

- de manière plus générale, les OHLM pourront offrir des prestations de services à une SCCV dans les conditions du marché. En effet, les SCCV sont en général des « coquilles vides » qui ne disposent pas de personnel en propre et qui, pour réaliser leur projet, s'appuient sur des missions confiées à leurs actionnaires dans le cadre du pacte d'associés ;

- le calcul de la part minimale de logements sociaux de l'opération s'effectue en prenant en compte la surface de plancher et non plus le nombre de logements ;

- la participation des OHLM au capital de la société se fait dans la limite de la part de logements sociaux et intermédiaires, calculée en surface de plancher, qu'ils comptent acquérir auprès de la SCCV ;

- des avances en compte courant au profit de la SCCV, peuvent être réalisées par les OHLM, dès lors qu'ils détiennent au moins 5% des parts de la SCCV, sans effet d'éviction sur la construction de logements sociaux, dans la mesure où ces avances ne seront pas issues des fonds liés au service économique d'intérêt général (SIEG) « logement social » et s'effectueront aux conditions du marché.

Permettre aux SA de vente HLM de dissocier la nue-propriété et l'usufruit pour pouvoir acquérir du patrimoine en zone tendue :

La mesure proposée vise à permettre aux sociétés de vente HLM de pouvoir dissocier la nue-propriété de l'usufruit dans le processus d'acquisition et de vente, notamment pour favoriser l'acquisition de patrimoine en zone tendue. Ainsi, les sociétés de vente HLM pourront recourir au dispositif de l'usufruit locatif dans l'ancien, et en particulier l'usufruit locatif social, régi par les dispositions des articles L.253-1 à L.253-8 du CCH.

La mesure constitue ainsi une alternative au mode d'intervention principal des sociétés de vente HLM consistant à acquérir en pleine propriété des logements précédemment détenus par des organismes HLM. Elle permet de décaler la mise en vente à l'unité des logements à l'achèvement de l'usufruit tout en valorisant pour l'organisme HLM la nue-propriété du bien. L'organisme HLM continuera à percevoir les loyers des logements pendant la durée de l'usufruit. La trésorerie dégagée par la cession de la nue-propriété pourra être réinvestie par le bailleur social dans de nouveaux investissements en production ou en rénovation.

Incidemment, il est proposé une actualisation de la rédaction concernant le recours aux montages en usufruit locatif social pour la production nouvelle prévu pour les autres OHLM, la disposition prévoyant une expérimentation en matière de démembrement de la propriété « pendant une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, au sein d'immeubles bâtis occupés ou non, dans les communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants telle que définie à l'article 232 du code général des impôts ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du dernier alinéa du II de l'article L. 302-5 du présent code », n'ayant plus lieu d'être.

Selon les dispositions de l'article, les bailleurs sociaux conserveront la nue-propriété ou réserveront à leur profit l'usufruit au sein d'immeubles à usage principal d'habitation qu'ils réalisent dans les conditions prévues à l'article L. 261-3 en vue de la vente de l'usufruit ou de la nue-propriété à des personnes physiques ou morales et ils pourront également acquérir ou la nue-propriété ou l'usufruit d'immeubles réalisés et vendus à eux dans les conditions de l'article L.261-3, soit en vente en état futur d'achèvement (VEFA).

La nouvelle rédaction clarifie et pérennise ainsi les possibilités pour les organismes HLM, autres que les sociétés de vente HLM, de recourir au dispositif d'usufruit locatif social pour faciliter l'équilibre de certaines opérations de logement social. Ce mécanisme de démembrement ouvre en effet la possibilité aux bailleurs de diminuer leur apport en fonds propres sur une opération. Ainsi, en se fondant sur les valeurs de marché et les caractéristiques de ce dispositif, l'ULS reviendrait en moyenne à 66 000 € pour un bailleur (soit 30%, à moduler selon la durée) au lieu de 220 000 € pour un logement en pleine propriété soit un investissement divisé par 3 qui lui permet d'affecter environ 150 000 € à la production nouvelle par ailleurs.

Clarifier le régime de la VEFA inversée :

L'article comprend les deux mesures suivantes :

- La première permet aux OHLM, au sein d'un programme mixte, de vendre en VEFA dite « inversée », des logements à des acquéreurs à l'unité et non plus seulement en bloc. Ainsi les OHLM pourront-ils vendre ces logements à des ménages accédants, au même titre que des promoteurs privés ;

- La seconde disposition élève à 50%, au lieu de 30% actuellement, la part maximale de logements du programme pouvant être vendus à des personnes privées, en cohérence avec l'obligation que la majorité au moins des logements du programme soit des logements sociaux.

Supprimer l'autorisation du représentant de l'Etat pour les OHLM souhaitant prendre des parts ou actions dans des SA HLM + prévoir la possibilité d'accorder des avances en compte courant à ces sociétés :

Dans un souci de simplification de la procédure, il est proposé de supprimer l'accord préalable du représentant de l'Etat dans le département à la participation des OHLM au capital de sociétés d'aménagement.

Il est également prévu de permettre aux organismes de logements sociaux de consentir des avances en comptes courants à ces sociétés d'aménagement, sans effet d'éviction sur la construction de logements sociaux, dans la mesure où ces avances ne seront pas issues des fonds liés au service économique d'intérêt général (SIEG) « logement social » et s'effectueront dans les conditions du marché.

Suppression de l'autorisation des ministres du logement et de l'économie pour les avances en compte courant et prêts participatifs entre OHLM :

L'article prévoit de supprimer ces régimes de déclaration avec droit d'opposition des ministres chargés du logement et de l'économie sous un délai de deux semaines.

Ces régimes de déclaration mis en place en 2011 n'ont en effet pas conduit à révéler de difficultés ou d'abus dans l'application de ces facultés laissées aux OHLM.

Les OHLM pourront donc y recourir sans contrôle a priori, le contrôle a posteriori de droit commun de l'ANCOLS étant maintenu (articles L. 342-1 et suivants du CCH).

Il est également prévu de supprimer l'obligation d'information spécifique de la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et de la société de garantie des organismes d'habitations à loyer modéré contre les risques d'opérations immobilières, l'information sur les avances et les prêts participatifs étant assurée à travers les états réglementaires que les organismes de logements sociaux doivent produire.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article modifie les articles :

- L. 421-1 CCH (OPH : SCCV) ;

- L. 421-2 CCH (OPH : sociétés d'aménagement) ;

- L. 421-4 CCH (OPH : usufruit locatif) ;

- L. 422-2 CCH (SA d'HLM : SCCV, sociétés d'aménagement, usufruit locatif) ;

- L. 422-3 CCH (coopératives HLM : SCCV, sociétés d'aménagement, usufruit locatif) ;

- L. 422-4 CCH (usufruit locatif des SA de vente HLM) ;

- L. 423-15 CCH (avances en comptes courant entre OHLM) ;

- L. 423-16 CCH (prêts participatifs entre OHLM) ;

- L. 433-2 CCH (VEFA « inversée »).

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Le périmètre du SIEG « logement social » n'est pas modifié par le présent article :

a) Les avances en compte courant aux SCCV et aux sociétés d'aménagement s'effectueront avec des disponibilités issues de la comptabilité « hors SIEG » ;

Ces activités ne relevant pas du SIEG défini à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation font l'objet d'une comptabilité distincte des activités relevant du SIEG. Plus précisément, s'il n'est pas encore possible de ventiler l'actif du bilan financier des bailleurs sociaux entre les activités relevant du SIEG et les activités hors SIEG, les exigences comptables ont été renforcées ces dernières années pour permettre de distinguer, dans le résultat de l'activité des bailleurs, les charges et les produits se rapportant aux activités relevant du SIEG des charges et produits se rapportant aux activités hors SIEG. Depuis 2021, les bailleurs sociaux ont également l'obligation de renseigner au passif de leur bilan la part de leur résultat issue des activités relevant du SIEG. Fin 2021, les résultats issus des activités hors SIEG des bailleurs sociaux représentaient environ 700 M€.

b) Le dispositif concernant la VEFA « inversée » prévu à l'article L.433-2 CCH dispose que : « L'organisme d'habitations à loyer modéré met en place une comptabilité permettant de distinguer les opérations relevant du service d'intérêt général défini à l'article L. 411-2 et celles qui n'en relèvent pas. » ; or l'augmentation de la part de logements « libres » ou « intermédiaires » dans les opérations en VEFA inversée, comme la vente au détail de ces logements à des particuliers, prévues par le présent article, concerne la comptabilité « hors SIEG ».

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Permettre aux SA de vente HLM de dissocier la nue-propriété et l'usufruit pour pouvoir acquérir du patrimoine en zone tendue :

Selon une étude 119(*), le nombre de constructions de logements en ULS est en hausse depuis une vingtaine d'années. Le nombre de logements en ULS a été multiplié par environ quatre entre 2000-2009 et 2010-2018 pour dépasser le millier de logements annuels. En 2020, près de 2 000 logements ont été proposés en ULS et ce sont 3 000 qui sont estimés pour 2023.

Dans une période de crise de la filière de production immobilière, ce type de dispositif est voué à stimuler l'offre de logements, en particulier dans le cadre clarifié par l'article.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Clarifier le cadre législatif applicable aux SCCV et leur permettre de recevoir des avances en compte courant de la part des organismes actionnaires :

La possibilité pour les OHLM de consentir des avances en compte courant aux SCCV permet de développer l'offre de logements sociaux et intermédiaires construits grâce à ce véhicule. En effet, les SCCV, pour se financer, s'appuient sur des concours apportés par leurs actionnaires et sur des prêts bancaires (crédit promoteur). Le statut des SCCV prévoit que les financements octroyés par les actionnaires doivent être apportés par chaque actionnaire à due proportion de sa participation au capital de la société. Il est donc nécessaire que les OHLM puissent consentir des avances en compte courant à ces sociétés pour leur permettre de réaliser leur objet social.

Toutefois, les OHLM devront réguler les avances consenties en fonction du bénéfice attendu de la société de leur part, et des risques d'exploitation anticipables.

Permettre aux SA de vente HLM de dissocier la nue-propriété et l'usufruit pour pouvoir acquérir du patrimoine en zone tendue :

La disposition permet aux bailleurs sociaux de dégager des fonds propres par la cession de la nue-propriété de leurs logements à la société de vente HLM et de réaffecter ces ressources sur d'autres opérations.

Prévoir la possibilité d'accorder des avances en compte courant aux sociétés d'aménagement :

La possibilité pour les OHLM de consentir des avances en compte courant aux sociétés de projet d'aménagement permet de développer les projets d'aménagement grâce à ce véhicule.

Toutefois, les OHLM devront réguler les avances consenties en fonction du bénéfice attendu de la société de leur part, et des risques d'exploitation anticipables.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans objet.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Sans objet.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'article porte les deux mesures de simplification suivantes :

- Les ministères du logement et de l'économie n'auront plus à instruire les demandes d'avances en compte courant et de prêts participatifs entre OHLM (en 2023, 17 demandes d'avance en compte courant ont été transmises au ministère du logement et deux dossiers de prêts) ;

- Le représentant de l'Etat dans les départements ne devra plus donner son accord sur les participations des OHLM dans les sociétés d'aménagement.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Ces mesures visent à diversifier les sources de financement des bailleurs, leur offrant ainsi des marges de manoeuvre de nature à faciliter la réalisation de leurs activités de construction et de gestion de logements sociaux, au bénéfice des demandeurs et des locataires de logements sociaux.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La clarification des possibilités d'intervention des organismes HLM en usufruit locatif social vise in fine à accroître le nombre de logements produit en ULS et, par conséquent, à favoriser l'accession à la propriété des particuliers. Actuellement, on compte environ 3 000 ULS produits chaque année (étude Astérès, septembre 2023, « L'Usufruit locatif social « employeur » : une piste pour surmonter les difficultés de logement »120(*)) ce qui représente environ 3% de la production de LLS.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Il n'est pas prévu de disposition d'entrée en vigueur différée ou de mesures transitoires pour cet article. Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article s'appliquera de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion et à Mayotte (collectivités régies par l'article 73 de la Constitution).

Il ne s'appliquera pas aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution (Wallis-et-Futuna et la Polynésie Française), en Nouvelle Calédonie (articles 76 et 77 de la Constitution), dans les Terres australes et antarctiques française (article 72-3 de la Constitution), à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon (article 74 de la Constitution).

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

CHAPITRE IV - FACILITER L'ACCÈS AU LOGEMENT

Article 10 - Faciliter l'accès au logement social des travailleurs

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le logement des salariés est un enjeu prioritaire pour la cohésion sociale dans les territoires. Faciliter l'accès à un logement à proximité du lieu de travail contribue, d'une part, à améliorer la qualité de vie et la ponctualité du salarié, d'autre part, à favoriser l'attractivité des entreprises et en particulier sur les territoires en tension sur les recrutements.

Les entreprises du secteur privé de plus de 50 salariés (le seuil de cotisation est passé progressivement de 10 à 50 salariés) contribuent à l'effort de construction (Article L313-19-1 du CCH) en y consacrant 0,45% de leur masse salariale. Action logement services collecte cette participation obligatoire avec laquelle il attribue des concours financiers à des opérations de construction ou de rénovation de logements sociaux. En contrepartie de ces aides, Action Logement services obtient des droits de réservations au bénéfice des salariés et demandeurs d'emploi. Loger les salariés constitue donc la mission principale d'Action Logement services, acteur essentiel en capacité de faire le lien entre les entreprises, les salariés, et les bailleurs sociaux afin de permettre aux salariés du secteur privé d'être logés selon leurs besoins.

Action Logement services a, à hauteur d'un quart des attributions annuelles de logements sociaux, l'obligation de participer à la mise en oeuvre du droit au logement au même titre que les autres réservataires en logeant des personnes ayant été reconnues prioritaires au titre du droit au logement - DALO (Art L. 441-2-3 du CCH) ou à défaut, faisant partie du public prioritaire visé à l'article L. 441-1. Pour atteindre cet objectif et fixer les modalités de mise en oeuvre de cette obligation, un accord est passé avec le représentant de l'Etat dans le département ou, en Ile-de-France, dans la région. En 2020, sur 36 départements prioritaires pour la mise en place de ces accords du fait de la présence de plus de 50 ménages reconnus DALO (qui incluent l'ensemble des départements de la Région Ile-de-France), 18 protocoles ont été signés avec Action logement services.

Les logements concernés sont les logements construits, améliorés ou acquis avec le concours financier de l'État ou ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement et appartenant aux organismes d'habitation à loyer modéré ou gérés par des organismes d'habitation à loyer modéré. Sont concernés les logements mis en service dans de nouveaux programmes et les logements remis à la location dans des programmes existants.

Sont exclus :

- Les logements situés dans des structures d'hébergement, des logements-foyers, des logements meublés ou des résidences hôtelières à vocation sociale ;

- Les logements faisant l'objet de droits de réservation détenus par des entreprises, des ministères et d'autres administrations ou établissements publics, et gérés par Action Logement ;

- Les logements non conventionnés quel que soit le bailleur.

La délégation partielle du contingent préfectoral (25%) à Action Logement s'inscrit dans le cadre des orientations définies par les conférences intercommunales du logement (CIL, prévues au L.441-1-5), instances de gouvernance partenariale, stratégique et opérationnelle en matière de politique d'attribution. Ces orientations, portées par les Etablissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernés sur leur territoire par la réforme des attributions et l'ensemble des réservataires, dont Action Logement, seront à mettre en cohérence avec les attributions qui lui seront déléguées dans le cadre du présent dispositif.

L'Etat mène une politique d'accès au logement social de ses agents en mobilisant deux leviers. En premier lieu, dans tous les logements conventionnés des bailleurs sociaux, l'Etat dispose d'un contingent de réservation de 5% des logements destiné au logement de ses agents dans le cadre d'une politique interministérielle. Par ailleurs, certains ministères ont mis en place une politique spécifique d'accès au logement social en réservant, directement ou par l'intermédiaire d'un organisme associé, des logements au profit de leurs fonctionnaires et agents civils. Pour ces réservations, l'article L.442-7 du Code de la Construction et de l'Habitation permet de lier le bail à l'emploi, exception dans le logement social. Cette disposition, qualifiée de « clause de précarité », est aujourd'hui utilisée principalement par le ministère des Armées pour favoriser la rotation dans les logements qu'il a réservés dans le parc social. Elle prévoit que le locataire d'un logement ainsi réservé doit libérer ce dernier dans un délai de 6 mois suivant sa cessation de services, ou sa mutation.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Il résulte de la lecture des articles 10 et 11 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946 que la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle. Le Conseil d'Etat (décision n° 94-359 du 19 janvier 1995) a précisé qu'il incombe « tant au législateur qu'au Gouvernement de déterminer, conformément à leurs compétences respectives, les modalités de mise en oeuvre de cet objectif à valeur constitutionnelle ; que le législateur peut à cette fin modifier, compléter ou abroger des dispositions législatives antérieurement promulguées à la seule condition de ne pas priver de garanties légales des principes à valeur constitutionnelle qu'elles avaient pour objet de mettre en oeuvre ». Le fait de prévoir au niveau législatif la délégation du contingent préfectoral à Action logement services permet de reconnaître et de garantir la valeur constitutionnelle du principe du droit au logement.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

La convention européenne des droits de l'homme prévoit en son article 14 l'interdiction de toutes discriminations fondées notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion. Dès lors que les dispositions proposées dans le présent article sont en accord avec l'objectif de loger les personnes qui ont été reconnues prioritaires et à reloger en urgence au titre du DALO (article L. 441-2-3 du CCH) ou, le cas échéant faisant partie des publics prioritaires au sens de l'article L. 441-1 du CCH, ces dispositions sont en accord avec le droit européen.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Loger les salariés relève de la mission principale d'Action logement services, qui est l'acteur le plus à même pour faire le lien entre les entreprises, les salariés et les bailleurs sociaux. Par ailleurs, la crise actuelle du logement touche également le public cible des entreprises cotisant à Action Logement. Les sondages menés régulièrement auprès des entreprises montrent que la difficulté d'accès au logement constitue l'un des principaux freins à l'embauche, particulièrement dans les marchés tendus.

Par ailleurs, un certain nombre de salariés sont aussi des ménages prioritaires au sens de la loi (soit au titre du L.441-1, soit à celui du L.441-2-3), plus de la moitié des ménages reconnus prioritaires au titre du DALO ayant un emploi. Parce qu'un des objectifs de la loi Egalité Citoyenneté de 2017 était de mettre en place une meilleure mobilisation des contingents des différents réservataires au bénéfice des attributions de logements sociaux à des ménages prioritaires tout en favorisant la mixité sociale, cette même loi a imposé à Action logement qu'au moins 25 % des attributions annuelles sur son contingent concernent ces ménages.

L'ANCOLS a établi dans une note préparée en février 2024121(*) qu'Action Logement avait beaucoup progressé dans la proportion des ménages reconnus DALO logés sur contingent, même si les résultats désormais satisfaisants en Ile-de-France masquent des disparités régionales122(*).

Dans le même temps, le contingent préfectoral permet également de loger de nombreux salariés, lorsqu'ils entrent dans une des catégories reconnues prioritaires par la loi.

Aujourd'hui, le Préfet peut d'ores et déjà déléguer son contingent. L'article R. 441-5 du CCH permet ainsi aux réservataires, dont fait partie l'Etat, de déléguer leurs droits de réservation au bailleur social qui est alors chargé de présenter des candidats sur les logements réservés. D'autre part, dans le cadre des conventions de délégation des aides à la pierre entre l'Etat et les intercommunalités, l'Etat peut déléguer tout ou partie de son contingent à l'intercommunalité en contrepartie de la délégation à cette dernière de la garantie du Droit au Logement Opposable (article L. 301-5-1).  

Les articles 2 et 10 du projet de loi prévoient d'étendre ces possibilités d'une part, aux maires, pour les premières attributions de logements nouvellement mis en service (article 2) et auprès d'Action Logement d'autre part (article 10). La délégation auprès d'Action Logement services pourra intervenir en complément de l'accord signé entre le Préfet et Action Logement prévu à l'article L. 313-26-2 qui formalise les modalités de mise en oeuvre des objectifs d'attributions de logements des personnes reconnues DALO et prioritaires sur le contingent dont dispose Action Logement services. L'article 10 du projet de loi prévoit la possibilité de compléter cet accord par une délégation de tout ou partie du contingent préfectoral à Action Logement services, qui prendra la forme d'une convention, afin d'élargir les opportunités d'attribution au bénéfice des ménages salariés pouvant par ailleurs relever de la reconnaissance « DALO » ou entrant dans la liste des ménages prioritaires identifiés au L. 441-1.

Ainsi, la nécessité de légiférer s'impose du fait que les mesures envisagées qui permettront au préfet de déléguer tout ou partie de son contingent à Action logement, complètent les dispositions législatives existantes. Cette nécessité se justifie dans un premier temps par l'existence du lien entre cette possibilité de délégation et l'accord passé entre Action logement et l'Etat cité à l'article L. 313-26-2 sans lequel la délégation du contingent préfectoral ne sera pas possible.

Légiférer sur cette délégation permet en outre de répondre à un enjeu de cohérence juridique avec le dispositif de délégation du contingent préfectoral au bénéfice d'un EPCI déjà prévu à l'article L. 301-5-1 du CCH.

S'agissant du logement des fonctionnaires et agents de l'Etat, la rédaction actuelle de l'article L. 442-7 du CCH présente des éléments d'obsolescence, avec des références et des renvois à des dispositions réglementaires devenus inopérants. Il en résulte une ambiguïté quant à la possibilité d'appliquer la clause de fonction au bail des agents bénéficiant d'une attribution sur un logement réservé par un Ministère aujourd'hui. Si en avril 1989, une réponse du Ministre de l'Equipement à une question parlementaire a précisé que toute forme de financement complémentaire, subventions comme prêts, pouvait justifier l'application de la clause de fonction, l'implication juridique de ladite clause qui remet en question le droit au maintien dans les lieux des ménages concernés, a conduit la quasi-totalité des ministères à renoncer à y recourir. Seul le Ministère des Armées mobilise régulièrement cette clause.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure proposée consiste à permettre au préfet de déléguer par convention à Action logement services tout ou partie de son contingent, à l'exception de la part réservée aux agents publics, pour loger les salariés qui relèvent des catégories de ménages prioritaires au sens de la loi, tout en poursuivant l'objectif de loger sur cette part déléguée les salariés reconnus au titre du droit au logement ou prioritaires dans le respect de la proportion définie par la loi. L'intégralité du contingent préfectoral, hors fonctionnaires, soit 25% des attributions, est dévolue à un public prioritaire au sens des articles L. 441-1 et L. 441-2-3-1 (relevant du DALO). Les attributions déléguées doivent ainsi respecter intégralement cet objectif qui vient s'ajouter à l'obligation pesant sur Action Logement de consacrer 25% des attributions sur son contingent de réservation à des ménages prioritaires.

La deuxième partie de l'article vise à toiletter l'article relatif à la clause de fonction pouvant être intégrée par les ministères dans les baux de logements sociaux qu'ils ont réservés de manière à en simplifier l'utilisation. Il s'agit ainsi de répondre à une attente exprimée par de nombreux employeurs publics visant à développer une politique de réservation de logements sociaux comme facteur d'attractivité pour le recrutement dans les zones tendues et comme politique de rapprochement du lieu de travail, notamment pour les professionnels de première ligne dont la crise COVID a mis en évidence l'importance pour la continuité du fonctionnement de la Nation. La clause de fonction évitera dans la durée tout dévoiement de ces réservations par un maintien dans les lieux injustifié de ménages ayant démissionné de la fonction publique par exemple.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Pour déléguer le contingent préfectoral à Action Logement, la seule option est de légiférer afin de compléter les dispositions relatives à la délégation du contingent préfectoral au bénéfice d'un EPCI prévu à l'article L. 301-5-1 du CCH.

3.2. DISPOSITIF RETENU

La voie législative est retenue, afin d'inscrire clairement dans la loi le cadre légal de la faculté de délégation de la gestion du contingent préfectoral.

Afin que le contingent préfectoral puisse être délégué partiellement ou en totalité à Action Logement Services, il est nécessaire de signer au préalable, un accord avec le représentant de l'Etat dans le département, conformément aux dispositions de l'article L. 313-26-2.

Pour ce qui concerne la clarification de l'article L. 442-7 du CCH, par nature seule la loi peut y procéder en supprimant toute référence à des décrets qui n'ont jamais été pris depuis 1983, date d'adoption de l'article de loi.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Les articles L. 313-26-2 et L. 442-7 du code de la construction et de l'habitation sont modifiés.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Sans objet.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Les mesures n'ont pas d'impact macroéconomique mais ont un impact sur les entreprises (cf. 4.2.2) et sur le logement des agents de l'Etat.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les mesures auront un impact bénéfique sur le logement des salariés des entreprises cotisantes à Action Logement, puisqu'elles maximiseront les possibilités de logement pour leurs salariés, en particulier ceux reconnus prioritaires. Elles aideront également les entreprises à recruter plus facilement pour se développer par exemple dans les territoires de réindustrialisation ou, plus largement, dans les bassins d'emplois accueillant l'arrivée d'entreprises de premier plan prévoyant la création locale de nombreux emplois.

4.2.3. Impacts budgétaires

Les mesures n'ont pas d'impact budgétaire, ni économique direct ou indirect.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La facilitation du développement et de l'implantation d'entreprises procurera des recettes complémentaires pour les collectivités territoriales. Elle contribuera à mieux coordonner les actions de développement économique et d'accès au logement, de plus en plus souvent liées.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les services déconcentrés de l'Etat dans les départements devront piloter cette nouvelle mesure et veiller à ce que les accords d'attributions au bénéfice des ménages prioritaires Etat/Action Logement soient bien signés au préalable, condition obligatoire pour déléguer la gestion du contingent préfectoral. Le suivi des attributions doit ainsi respecter les objectifs de la présente mesure dans le respect des orientations définies en matière de logement définies par les EPCI sur leur territoire. Le fait de déléguer la gestion du contingent préfectoral va en parallèle rééquilibrer la charge de travail des agents des services déconcentrés.

La clarification de l'article L. 442-7 permettra aux employeurs publics de développer une politique propre pour le logement de leurs agents en toute sécurité juridique. L'objectif est de renforcer l'attractivité de certains métiers de la fonction publique, en particulier les métiers dits « de première ligne » en favorisant le développement de politiques de recrutement permettant aux ministères d'attribuer des logements à proximité du lieu d'emploi à certains de leurs agents. En cas de démission, ces derniers devront libérer le logement qu'ils auront ainsi obtenu, permettant ainsi à l'employeur de réattribuer le logement à un nouvel agent ayant besoin d'un logement à proximité du lieu d'emploi.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La présente proposition aura un impact positif pour les salariés des entreprises concernés dans la mesure où ils seront plus facilement logés dans le parc social avec un meilleur rapprochement de leur lieu d'emploi.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les ménages labellisés DALO et les publics prioritaires salariés pourront bénéficier plus fréquemment de logements orientés par les bailleurs vers Action Logement Services dans le cadre de la gestion en flux des logements, ce qui élargit ainsi le panel des propositions faites aux ménages en améliorant ainsi le niveau d'acceptation de ces propositions d'attribution.

Les dispositions relatives aux logements réservés par les ministères encouragent ces derniers à mettre en oeuvre des réservations. De plus, le lien emploi / lieu de résidence en sera amélioré.

Enfin, les possibilités d'accès au logement des professionnels « clés », identifiés par les territoires et le développement de l'attractivité de la fonction publique en seront également renforcés.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

La délégation partielle ou totale du contingent préfectoral pourra être mise en oeuvre dès la signature des accords prévus à l'article L. 313-26-2 signés entre le Préfet et Action Logement Service.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique sur l'ensemble des territoires où Action logement services détient des droits de réservation. Les dispositions sont applicables sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à la Réunion. En revanche, elles ne sont pas applicables dans les collectivités d'outre-mer qui sont compétentes en matière de logement.

5.2.3. Textes d'application

Les modalités de mise en oeuvre de la disposition pourront faire l'objet de précision par circulaire.

Article 11 - Rendre plus efficace le réexamen de la situation des locataires dans le parc social

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Au 1er janvier 2023, 15,9 % des résidences principales en France sont des logements locatifs sociaux, soit 5,3 millions de logements sociaux123(*).

La loi Elan de 2018 a élargi les missions des commissions d'attribution de logements sociaux, créées dans chaque organisme de logement social, désormais dénommées « commissions d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements » (Caleol), Dans les zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l'offre et la demande (zones tendues : A bis, A et B1), le bailleur social examine les conditions d'occupation des logements tous les trois ans à compter de la date de signature du contrat de location en application de l'article L. 442-5-2 du CCH ainsi que l'adaptation du logement aux ressources du ménage.

Le bailleur transmet à la Caleol les dossiers des locataires qui se trouvent dans l'une des situations suivantes : suroccupation, sous-occupation, dépassement du plafond de ressources, besoin d'un logement adapté au handicap ou logement quitté par l'occupant présentant un handicap lorsque ce logement est adapté. Le cas échéant, la Caleol émet un avis sur les offres de relogement à proposer aux locataires et peut conseiller l'accession sociale dans le cadre du parcours résidentiel. Cet avis est notifié aux locataires concernés.

L'objectif de cette mesure est d'accroître la fluidité et la mobilité en recherchant la meilleure allocation possible entre les logements et leurs occupants. Il s'agit de mieux répondre aux besoins des locataires et les accompagner dans leur parcours résidentiel, dans et hors du parc social: par exemple vers le locatif intermédiaire ou l'accession sociale à la propriété.

L'attribution d'un logement social à un ménage est conditionnée au respect de plafonds de ressources qui varient selon le type de prêt accordé pour le financement du logement (en France métropolitaine : prêt locatif aidé ou PLAI, prêt locatif à usage social ou PLUS, prêt locatif social ou PLS ; prêts équivalents dans les départements et régions d'outre-mer), la composition du ménage et la localisation du logement. Les ressources des ménages sont appréciées lors de la demande de logement social, en référence à leur revenu fiscal de référence de l'année n-2. Elles sont ensuite déclarées annuellement par les locataires à leur bailleur.

Dans l'objectif d'encourager la mobilité au sein du parc social et de mieux apparier les logements à l'évolution de la situation des ménages, les commissions d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements (CALEOL) examinent également les conditions d'occupation des logements du bailleur HLM tout au long de la vie du bail.

À la suite de cet examen, le bailleur communique à la CALEOL la liste des locataires se trouvant soit :

- En sur-occupation du logement (un logement est sur-occupé quand il lui manque au moins une pièce par rapport à la norme d' « occupation normale », fondée sur le nombre de pièces nécessaires au ménage, décompté de la manière suivante :

o une pièce de séjour pour le ménage ;

o une pièce pour le couple ou le parent isolé ;

o une pièce pour deux enfants s'ils sont de même sexe ou ont moins de 7 ans ;

o sinon, une pièce par enfant.),

- En sous-occupation du logement au sens de l'article L. 621-2 du CCH (soit lorsque le nombre de pièces habitables est supérieur par rapport à la norme d' « occupation normale » définie ci-dessus) ;

- Logement quitté par l'occupant présentant un handicap (défini à l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles), lorsqu'il s'agit d'un logement adapté ;

- Reconnaissance d'un handicap ou d'une perte d'autonomie nécessitant l'attribution d'un logement adapté,

- Dépassement du plafond de ressources du locataire.

Sur cette base, la CALEOL examine les dossiers présentés, émet un avis sur ces situations et propose le cas échéant un logement adapté à la situation du ménage.

Cet examen complète le bilan annuel, prévu à l'article L.441-1 et réalisé par les bailleurs au niveau départemental afin de suivre leur politique d'attribution. Afin de rationaliser le nombre de bilans à la charge des bailleurs, ce dernier intègrera le rapport annuel prévu au présent article et relatif à l'examen régulier des situations des ménages (réalisé dans le cadre des CALEOL).

Par ailleurs, l'Ancols (Agence nationale de contrôle du logement social) joue un rôle essentiel pour la bonne régulation du secteur du logement social. Ses missions, définies aux articles L. 342-1 et L. 342-2 du Code de la construction et de l'habitation, sont en matière de contrôle de :

- contrôler les organismes de logement social ;

- proposer et gérer les suites à donner aux manquements constatés auprès de ces organismes ;

- produire des statistiques et des études améliorant la connaissance du secteur ;

- contrôler la gestion des entités du groupe Action Logement ainsi que la mise en oeuvre du principe d'équité dans la distribution des aides aux organismes de logement social (OLS).

Au titre de ces contrôles, si l'Ancols constate une irrégularité chez un bailleur, elle peut proposer une sanction, définie à l'article L. 342-14 du Code de la construction et de l'habitation, adressée au ministre chargé du Logement notamment en cas de non-respect des règles d'attribution.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle depuis une décision du conseil constitutionnel du 19 janvier 1995. L'existence de logements locatifs sociaux, réservés aux ménages les plus modestes, participe à garantir le respect de ce droit.

A l'égard du droit au maintien dans les lieux, le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution dans sa décision DC 2009-578 une remise en cause de ce droit dès lors que des garanties légales existent (extrait de la décision, : Considérant 15 :  « Considérant, en second lieu, qu'en vertu des dispositions critiquées, les bénéficiaires occupant un logement social qui n'est plus adapté à leurs besoins ne perdent leur droit au maintien dans les lieux que s'ils ont refusé trois offres de relogement dans une zone géographique voisine et pour un loyer inférieur à celui du logement d'origine ; que, pour ces personnes, la loi ajoute une aide à la mobilité définie par décret ; que, s'agissant des locataires dont les ressources excèdent le double du plafond légal pendant au moins deux années consécutives, le droit au maintien dans les lieux n'est supprimé qu'à l'issue d'un délai de trois ans après l'expiration de ce premier délai et à la condition que, dans ce délai de trois ans, les ressources des locataires ne soient pas devenues inférieures aux plafonds de ressources pour l'attribution de ce logement ; que la perte du droit au maintien dans les lieux pour cause de sous occupation du logement ou de dépassement des plafonds de ressources ne s'applique pas aux locataires présentant un handicap ou ayant à leur charge une personne handicapée ; qu'enfin, dans tous les cas, les locataires âgés de plus de soixante-cinq ans conservent le bénéfice du droit au maintien dans les lieux »).

Le présent article s'inscrit dans le cadre de cette décision du Conseil Constitutionnel et ne remet donc pas en cause ces garanties légales :

- il diminue uniquement de 150 à 120% le seuil de dépassement des plafonds de ressources du prêt locatif social (PLS) à partir duquel la perte du droit au maintien dans les lieux s'applique ;

- il élargit la perte du droit au maintien dans les lieux aux cas de locataires se trouvant par ailleurs propriétaires d'un logement susceptible de générer des revenus suffisants pour accéder à un logement du parc privé ;

- les garanties accordées aux personnes handicapées ou âgées continuent de s'appliquer.

L'article prévoit une sanction que l'ANCOLS (Agence nationale de contrôle du logement social) peut proposer au ministre en charge du logement en cas de non-respect du bailleur de ses obligations de libération du logement en cas de dépassement du plafond de ressources au-delà du seuil autorisé par le présent article de 120 % ou d'absence d'examen périodique de la situation de l'occupant.

Le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de se prononcer sur le principe de sanction par les autorités non judiciaires. Elles sont légales dès lors qu'elles respectent le principe de proportionnalité et de nécessité (décision n° 89-260 DC du 30 décembre 1987, décision n° 2004-504 DC du 12 août 2004).

La sanction proposée est de 1000 € par logement et est du même montant que celles déjà instituées par l'article L. 411-10 du code de la construction et de l'habitation qui prévoit une sanction de 1 000 € par logement en cas d'absence de transmission à l'Etat des données relatives au parc de logements sociaux (RPLS).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Les articles 31 de la charte sociale européenne (droit au logement) et 25 de la déclaration universelle des droits de l'Homme (droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour le logement) ne sont pas affectés par le fait de rendre plus efficace le réexamen de la situation des locataires du parc social qui dépassent les plafonds de ressources. Cette mesure doit permettre d'augmenter la mobilité dans le parc social, fluidifier les parcours résidentiels afin de pouvoir proposer un logement social aux 1,8 millions de demandeurs (hors demandes de mutation de locataires déjà présents dans le parc social124(*)).

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Dans un contexte de tension au sein du parc social marqué par un faible taux de rotation (4,5 % en 2023 en zone A et à 6,2 % en zone B1125(*)) et une hausse des demandes de logement social (passée de 2,1 millions de demandeurs en 2019 à 2,6 millions en 2023), on constate une baisse des attributions (de 450 000 à 390 000 en 2023126(*)) due en partie à l'absence de mobilité résidentielle.

Aujourd'hui, une part importante des locataires effectue l'essentiel de leur parcours résidentiel dans le parc social. En effet, plus d'un tiers des demandes de logement social (845 000 sur 2,6 millions) sont des demandes de mutation au sein du parc social127(*). A noter que le délai d'ancienneté de la demande était de 22 mois en moyenne en 2023128(*).

Dans un contexte de crise du logement, il apparaît nécessaire de favoriser une véritable fluidité dans le parc HLM, qui permet de traiter des situations d'inadéquation du logement à la situation du locataire (sur-occupation, sous-occupation, dépassement du plafond, besoin d'un logement adapté à la perte d'autonomie etc.).

La législation actuelle remet en cause le droit au maintien dans les lieux dans deux situations : la sous-occupation et le dépassement de plus de 50% des plafonds de ressources. La Loi ELAN prévoit un réexamen des dossiers des locataires, tous les trois ans, dans les zones tendues présentant un déséquilibre important entre l'offre et la demande de logements.

A ce jour, c'est donc dans une moindre mesure qu'il est tenu compte de la situation patrimoniale et familiale des demandeurs de logements qui évolue dans le temps (par exemple, suite à une séparation, une décohabitation, une perte d'autonomie, une succession etc.).

A titre d'exemple, certains locataires de logements sociaux ont pu, au fil des années, devenir propriétaires d'un bien à usage d'habitation. Le présent article poursuit donc, notamment, l'objectif d'introduire dans le droit une spécificité pour certains locataires qui sont par ailleurs propriétaires de biens immobiliers à usage d'habitation qui pourraient soit satisfaire leurs besoins, soit leur procurer des revenus locatifs qui les feraient sortir des critères d'attribution d'un logement social. Cet objectif aligne la règle de gestion applicable aux locataires en place sur celle applicable à l'entrée, lors de l'attribution du logement.

Par ailleurs, si, compte tenu des évolutions de situation familiale ou professionnelle des locataires de logement social, il est indispensable de vérifier de manière périodique l'évolution patrimoniale et familiale de toute personne bénéficiant d'un logement social, il convient également de contraindre les bailleurs sociaux à suivre ces évolutions pour ainsi encourager la mobilité au sein du parc social.

C'est la raison pour laquelle cet article complète les sanctions que l'Ancols peut proposer au ministre du Logement de prendre au cas où un bailleur se soustrairait à ses nouvelles obligations. La sanction est proportionnée et ne peut excéder 1000 €.

Enfin, cet article prévoit de compléter le rapport relatif aux désignations effectuées par les bailleurs en application du 21ème alinéa de l'article L. 441-1 avec un volet relatif aux nouvelles obligations sur la situation des locataires du parc social prévues par le présent article.

Les mesures envisagées modifient ou suppriment des dispositions législatives existantes, il est donc nécessaire de recourir à la loi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le Gouvernement souhaite encourager la mobilité dans le parc social, notamment en complétant les cas de perte du droit au maintien dans les lieux. Il s'agit ainsi de créer les conditions d'une augmentation de la mobilité, mais aussi, d'une meilleure adéquation du logement et du ménage, en conformité avec les critères d'attribution des logements.

Pour ce faire, cet article introduit la prise en compte du patrimoine des occupants du parc social dans les éléments que le bailleur devra prendre en considération lors de l'évaluation de l'occupation sociale du parc. Afin de s'assurer de la mise en oeuvre de cette mesure, cet article prévoit également une sanction prononcée par l'Ancols à l'encontre du bailleur en cas d'absence d'évaluation de la situation de ces occupants ou de refus par le bailleur de mettre fin au bail si le ménage répond aux conditions de l'article L. 442-3-3.

Enfin, les bailleurs devront compléter le rapport prévu à l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation relatif aux désignations de candidats qu'ils ont effectués, à l'échelle du département, d'un volet sur l'examen de l'occupation du parc prévu au présent article. Ce rapport devra être adressé, chaque année, aux préfets de département et aux présidents des EPCI de la réforme (environ 420 EPCI).

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Le droit au maintien dans les lieux, les cas d'examen des locataires du parc social ainsi que les sanctions que l'Ancols peut proposer au ministre du Logement sont de nature législative. Il n'était donc pas possible d'envisager de passer par la voie réglementaire pour proposer ces évolutions.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le présent article vient compléter les possibilités déjà offertes par les articles L. 442-3-1 (obligation pour le bailleur de proposer un nouveau logement au locataire en sous occupation), L. 442-3-2 (obligation pour le bailleur de proposer un autre logement lorsque les locataires occupent un logement adapté au handicap alors qu'ils ne sont pas handicapés et perte au droit au maintien dans les lieux après trois propositions), L. 442-3-3 (obligation pour le bailleur de mettre fin aux locations à des ménages dont les revenus dépassent 150% des plafonds PLS), L. 442-3-1 et L. 482-3-1 (perte au droit au maintien dans les lieux pour les locataires qui ne répondent pas à l'enquête SLS), par le biais des dispositions suivantes :

- Extension aux SEM de l'obligation d'examen périodique des situations des locataires en CALEOL129(*)

- Obligation pour les organismes d'habitation à loyer modéré et nouvellement les sociétés d'économie mixte (environ 5,3 millions de logements) de transmettre annuellement le rapport sur l'examen des situations des ménages prévus en CALEOL au préfet et au président d'EPCI ;

- Introduction de deux nouvelles sanctions prononçables par l'ANCOLS : sanction de 1 000€ en cas de non-respect de l'évaluation périodique de la situation des habitants et des obligations qui en découlent en application de l'article L. 442-5-2 et une sanction couvrant au plus 18 mois de loyer en cas de refus de mettre fin à un bail dans le cas des dispositions prévues à l'article L. 442-3-2 ;

- Inclusion dans l'examen de l'occupation des logements du fait d'être propriétaire d'un logement adapté aux besoins du ou des demandeurs de logement social (sont ici visées notamment les personnes possédant une résidence secondaire ainsi que des propriétés de logements mises à la location qui produisent des revenus locatifs réguliers) ou qui peut générer des revenus complémentaires leur permettant de résider dans le parc privé ;

- En cohérence avec l'abaissement du seuil de déclenchement du supplément de loyer de solidarité (article 12 du projet de loi), réduction du dépassement au-delà duquel les locataires seront déchus de leur droit d'occupation du logement de 150 à 120 % des plafonds de ressources applicables aux logements financés en PLS. Environ 103 000 ménages locataires du parc social ont des ressources supérieures aux plafonds PLS et sont potentiellement concernés par cette modification de seuil. In fine, ce sont environ 30 000 ménages qui devraient être réellement impactés par cette disposition en tenant compte des locataires ayant plus de 65 ans ainsi que de ceux logés en quartier prioritaire de la politique de la ville qui ne sont pas concernés par cette disposition.

- Rendre obligatoire l'intégration d'un volet relatif à l'occupation du parc social dans le bilan départemental prévu au 21ème alinéa de l'article L. 441-1 concernant les désignations réalisées par les bailleurs sociaux au sein de leur parc.

Les dispositions des articles L. 442-3-3, L. 442-3-6 et L. 482-3 du code de la construction et de l'habitation, dans leur rédaction résultant des 2° et 3° du I du présent article, sont applicables aux contrats en cours à compter du 1er janvier suivant la date de publication de la présente loi.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Cet article modifie les articles L. 342-14, L. 442-3-3 et L. 482-3, L. 481-2 et L. 442-5-2 du code de la construction et de l'habitation. Il insère également un nouvel article L. 442-3-6.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Le présent article est compatible avec les articles 31 de la charte sociale européenne (droit au logement) et 25 de la déclaration universelle des droits de l'Homme (droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour le logement). Ces garanties conventionnelles ne sont pas affectées par le fait de rendre plus efficace le réexamen de la situation des locataires du parc social qui dépassent les plafonds de ressources.

Par ailleurs, le logement n'est pas une compétence de l'Union Européenne.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

L'augmentation de la mobilité dans le parc social doit permettre de loger une plus grande part de ménages en attente d'un logement. En effet, l'augmentation sur une année d'un point de mobilité représente près de 47 000 attributions de logements sociaux130(*) supplémentaires sur l'année soit près de la moitié des logements nouvellement agréés en 2023. Cette plus grande fluidité dans le parc social doit permettre de faire diminuer la pression sur le parc social, sans coût supplémentaire pour les finances publiques de l'Etat et des collectivités territoriales.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

L'application de ces nouvelles mesures concernera les différents parcs des bailleurs répartis comme suit : environ 655 000 logements relevant des SEM, 2,1 millions relevant des OPH et 2,4 millions pour les ESH.

4.2.3. Impacts budgétaires

Les mesures n'ont pas d'impact budgétaire, ni économique direct. Certes, l'Ancols pourra proposer une sanction au ministre du Logement à l'encontre des bailleurs qui ne respectent pas les obligations découlant du présent article mais il est difficile d'estimer à ce stade le niveau de sanctions pécuniaires qui sera appliqué. Au titre du rapport 2022 de l'Ancols, sur 61 dossiers examinés, 1% des manquements ont fait l'objet d'un projet de proposition de sanction au ministre chargé du logement. Les sanctions sont introduites dans la loi pour inciter les bailleurs sociaux à mettre en oeuvre des mesures aujourd'hui insuffisamment déployées.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure visant à l'intégration d'un volet relatif à l'occupation du parc social dans le bilan départemental prévu au 21ème alinéa de l'article L. 441-1 à destination du conseil d'administration du bailleur et adressé aux présidents des EPCI de la réforme aura un impact positif sur l'information de l'occupation du parc, notamment pour les EPCI qui sont les chefs de file de la réforme des attributions.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La transmission au préfet du rapport susmentionné permettra à ses services de suivre cette mesure sans coût supplémentaire pour les services administratifs. Les nouvelles sanctions à mettre en oeuvre par l'Ancols n'entraineront pas d'impact significatif pour l'Agence car elles entrent dans le cadre des mesures de contrôle déjà existantes.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Cet article vise une occupation des logements sociaux plus conforme à leur vocation sociale et plus lisible. Il doit ainsi permettre d'améliorer l'accès au logement des personnes à faibles ressources en augmentant la rotation dans le parc social.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La situation des locataires du parc social en situation de handicap est préservée puisque le fait d'être propriétaire d'un logement n'entrainera pas de perte de maintien dans les lieux. De plus, la recherche d'une plus grande et meilleure mobilité (notamment par l'allocation possible entre les logements et leurs occupants) permettra de loger plus de personnes en perte d'autonomie liée à l'âge ou au handicap dans des logements adaptés au sein du parc social.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Une meilleure rotation des logements sociaux sera autant profitable aux femmes qu'aux hommes. L'augmentation de la rotation que doit engendrer cet article devrait permettre de loger plus efficacement les femmes victimes de violence grâce à la libération de nouveaux logements.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Les entrants sont globalement plus jeunes (47,9% des emménagés de moins de 2 ans ont moins de 25 ans selon l'enquête OPS 2022) que les ménages qui vont devoir quitter leur logement social pour cause de revenus dépassant les seuils. La mesure est donc favorable à la jeunesse, mais dans une proportion difficile à évaluer.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Certaines mesures vont impacter directement les locataires notamment lors de la demande par les bailleurs de fournir leur déclaration de patrimoine dans le but de mieux connaître l'ensemble de leur ressources financières et/ou patrimoniales.

Ces mesures devraient diminuer le nombre de demandeurs de logements sociaux en libérant une plus grande part des logements locatifs sociaux via une augmentation du taux de rotation. Elles devraient aussi permettre d'encourager les parcours résidentiels ascendants vers de nouvelles typologies de logements après avis de la CALEOL (par exemple vers le logement locatif intermédiaire, l'accession sociale à la propriété, le bail réel solidaire ou encore vers le parc privé classique).

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

Les dispositions des articles L. 442-3-3, L. 442-3-6 et L. 482-3 du code de la construction et de l'habitation, dans leur rédaction résultant des 2° et 3° du I du présent article, sont applicables aux contrats en cours à compter du 1er janvier suivant la date de publication de la présente loi.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions sont applicables sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à la Réunion.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

Article 12 - Inciter à la mobilité par les compléments de loyers

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Au 1er janvier 2023, 15,9 % des résidences principales en France sont des logements locatifs sociaux, soit 5,3 millions de logements sociaux131(*).

En application de l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH) l'attribution d'un logement social à un ménage est conditionnée au respect de plafonds de ressources. Ces plafonds varient selon le type de prêt accordé pour le financement du logement (en métropole : prêt locatif aidé ou PLAI, prêt locatif à usage social ou PLUS, prêt locatif social ou PLS ; prêts équivalents dans les départements et régions d'outre-mer), la composition du ménage et la localisation du logement. Les ressources des ménages sont appréciées lors de l'instruction de la demande de logement social, en référence à leur revenu fiscal de référence (arrêté du 22 décembre 2020 relatif au nouveau formulaire de demande de logement locatif social et aux pièces justificatives fournies pour l'instruction de la demande de logement locatif social). Elles sont ensuite déclarées annuellement par les locataires à leur bailleur (articles L. 441-9 et L. 442-5 CCH).

Au cours du bail, les revenus des locataires peuvent évoluer et éventuellement dépasser les plafonds d'attribution des logements. Aussi, lorsque les ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d'au moins 20 % les plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution des logements, les locataires sont assujettis au paiement d'un supplément de loyer de solidarité (SLS) (parfois appelé « surloyer ») en sus du loyer principal et des charges locatives (article L. 441-3 CCH). Plus précisément, pour un logement attribué sous condition de ressources PLAI ou PLUS, le seuil de déclenchement du SLS est actuellement fixé à 120 % du plafond de ressources PLUS (article R. 441-23 CCH) ; pour un logement attribué sous condition de ressources PLS, le seuil de déclenchement est fixé à 120 % du plafond de ressources PLS (article R 441-23 CCH)

Les habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale (ou zones « France ruralité redynamisation ») sont exemptés du SLS (article L. 441-3 CCH). Dans le cadre de l'élaboration des programmes locaux de l'habitat (PLH), peuvent également être identifiés des zones ou des quartiers dans lesquels le SLS ne s'applique pas). En 2022, tous motifs confondus, 38,8% des logements sociaux soumis à l'enquête annuelle sur les ressources des locataires étaient exemptés de SLS132(*). En particulier, l'exemption dans le cadre des PLH concerne environ 170 000 logements (sachant que seule une petite partie des locataires de ces logements devrait en fait s'acquitter du SLS si cette exemption n'existait pas ; pour un taux moyen de ménages assujettis au SLS de 3%, cela représente potentiellement 5 100 locataires environ qui bénéficient de cette exemption).

Le SLS a été mis en place dès 1958, sous la forme d'une « indemnité » due par les locataires concernés133(*).

Un des objectifs assignés au SLS, en réduisant l'écart entre les loyers du parc social et les loyers du parc privé, est d'inciter au départ de leur logement les locataires disposant des ressources les plus élevées. D'après l'agence nationale de contrôle des organismes de logement social (ANCOLS), les loyers médians au mètre carré du parc social sont en effet deux fois moins élevés que ceux du parc privé134(*).

Les recettes issues du SLS sont, en application d'un arrêté, conservées à hauteur de 15 % par les bailleurs et reversées à hauteur de 85 % à la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Cette somme, réinjectée au budget de la CGLLS, permet ainsi de financer la solidarité inter-bailleurs, le financement de l'investissement, les plans d'aide, et, globalement, le soutien au secteur par la solidarité des bailleurs dont les locataires sont les moins défavorisés (ceux qui vont percevoir la CGLLS), vers ceux dont les locataires sont les plus paupérisés.

En 2023, 80 000 logements ont donné lieu au versement d'un SLS (soit 3 % des logements entrant dans le champ d'application du SLS)135(*). Le produit annuel total du SLS est estimé à 133 millions d'euros, avec un montant moyen mensuel de SLS de 136 euros par mois et par ménage assujetti (montant relativement stable depuis 2018), soit un montant global de SLS conservé par les bailleurs estimé à 20 millions d'euros.

Source : enquête SLS 2023 ; ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, DHUP.

Dans une enquête publiée en 2021136(*), l'ANCOLS concluait ainsi que :

« (...) le SLS ne concerne qu'un nombre restreint de locataires du parc social et ces ménages ont en majorité un profil peu mobile : ménages âgés, seuls ou en couple sans enfant à charge, ancrés en fin de trajectoire résidentielle et résidant en région parisienne. Cela explique que le SLS ne soit pas un facteur déclencheur de mobilité pour une part importante des ménages s'en acquittant (seuls 18 % des ménages interrogés ont quitté le logement pour lequel ils étaient soumis au SLS).

Notons, en outre, que plus d'un ménage interrogé sur trois déclarent avoir rencontré des difficultés dans les démarches entreprises pour trouver un autre logement, principalement du fait des prix élevés constatés sur le marché immobilier privé et des caractéristiques des logements visités. »

Notons enfin qu'à ce jour, le SLS dû à partir du 1er janvier de l'année N+1 est calculé par le bailleur durant l'année N. Le bailleur réalise une enquête ressources auprès des locataires pour savoir si certains de ses locataires sont redevables d'un surloyer. Un questionnaire leur est distribué au cours du 2ème semestre de l'année en cours (année N). À partir des informations fournies, le bailleur calcule le montant du surloyer dû à partir du 1er janvier de l'année N+1.

Il convient de faciliter l'instauration de ces SLS, notamment en simplifiant les enquêtes de revenus par l'automatisation de la transmission des données par l'administration fiscale.

En ce sens, un échange d'informations doit être mis en place de façon automatique (via, par exemple, la mise en place d'une « API », interface de programmation applicative, ou application programming interface) entre l'administration fiscale et le groupement d'intérêt public système national d'enregistrement (GIP SNE). Les organismes HLM et les sociétés d'économie mixte agréées auront ainsi accès à l'ensemble des informations nécessaires pour caractériser la situation d'un locataire d'un de ces organismes ou sociétés dans le cadre des enquêtes SLS (avis d'imposition, etc.) et la situation d'un demandeur de logement social en vue de l'instruction de sa demande de logement social.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le droit au logement est garanti par les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. L'existence de logements locatifs sociaux, réservés aux ménages les plus modestes, participe à garantir le respect de ce droit.

Le fait d'exiger des locataires de logements sociaux le paiement d'un supplément de loyer, lorsque leurs ressources dépassent les plafonds applicables pour l'attribution des logements, ne remet pas en question ce droit et le dispositif du SLS, en tant que tel, n'a fait l'objet d'aucune décision du Conseil constitutionnel. Le SLS vise à maintenir l'égalité de traitement au sein du parc social en assurant une progressivité des montants des surloyers, tout en permettant de prendre en compte le taux d'effort des ménages au regard de leurs revenus.

De même, la mise en place d'un échange, entre l'administration fiscale et le GIP SNE, des informations nécessaires pour caractériser la situation d'un demandeur de logement social en vue de l'instruction de sa demande de logement social et la situation d'un locataire dans le cadre des enquêtes mentionnées aux articles L. 441-9 et L. 442-5, en vue, notamment, de fiabiliser le contenu des données réceptionnées et de faciliter la réalisation de ces analyses et enquêtes, ne remet pas non plus en question le droit au logement garanti par les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

La politique du logement n'est pas une compétence de l'Union européenne. Chaque pays de l'Union européenne peut par conséquent librement définir la politique qui lui est propre.

Il est toutefois précisé que l'Union reconnait un droit « à une aide au logement », mentionné à l'article 34, § 3, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, en vue d'assurer une « existence digne à tous ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes ».

Par ailleurs, conformément à l'article 36 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Union « reconnaît et respecte l'accès aux services d'intérêt économique général tel qu'il est prévu par les législations et pratiques nationales, afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l'Union ».

Les bailleurs sociaux sont chargés d'un service d'intérêt économique général (SIEG) en matière de logement, défini à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, en application de la décision de la Commission du 20 décembre 2011 relative à l'application de l'article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général, dite « décision Almunia »137(*).

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Fin 2023, l'Union sociale pour l'habitat (USH) recense 2,6 millions de ménages en demande d'un logement social, soit une hausse de 7.5% par rapport à 2022 et 26% par rapport à 2016. Dans le même temps, ces dernières années ont été marquées par une diminution du taux de rotation dans le parc social : en 2022, il est de 5 % en zone A, 7,2 % en zone B1, 7,8 % en zone B2 et 8,7 % en zone C, contre respectivement 6,4 %, 9,4 %, 10,7 % et 11,7 % en 2020138(*).

La mobilité des locataires dont les ressources sont sensiblement supérieures aux plafonds de ressources applicables à l'attribution des logements, au profit des ménages les plus modestes, constitue donc un enjeu majeur d'efficacité de la politique du logement social.

Pour augmenter les recettes issues du SLS sans remettre en cause la mixité sociale, la baisse du seuil de déclenchement du SLS permet de l'appliquer à un plus grand nombre de locataires du parc social. Cette mesure consistant à redéfinir le périmètre du public cible du SLS est de nature législative car elle nécessite une modification des dispositions de l'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation (CCH), conformément aux dispositions de l'article 34 de la Constitution relatives au régime de la propriété.

Afin de les intéresser à la bonne perception du surloyer et de leur fournir des ressources propres supplémentaires, nécessaires en particulier à la rénovation de leur parc, il est également nécessaire d'augmenter et de sanctuariser la part des recettes du SLS susceptible d'être conservée par les bailleurs sociaux en abaissant le taux maximal de taxation du SLS au profit de la CGLLS, ce taux, fixé par arrêté ministériel, pouvant atteindre aujourd'hui 100% (il est actuellement de 85%).

Enfin, il est prévu de remplacer l'exemption de SLS susceptible d'être appliquée à certaines zones ou certains quartiers identifiés dans le cadre de l'élaboration des programmes locaux de l'habitat par une exemption systématique des logements situés en résidences à enjeu prioritaire de mixité sociale, identifiées par la convention intercommunale d'attribution ou, pour Paris, par la convention d'attribution, en application des dispositions de l'article L. 441-1-6 du CCH. Cette mesure nécessite également une modification des dispositions de l'article L. 441-3 du CCH.

Dans le cadre de l'enquête SLS, ainsi que de l'enquête OPS, plusieurs pièces justificatives sont à joindre au formulaire d'enquête : photocopie intégrale de l'avis d'imposition (ou de non-imposition), mais aussi tout document justifiant un changement de situation. Les enquêtes SLS et OPS représentent ainsi un travail conséquent et couteux (récupération des documents, traitement, etc. auprès de nombreux locataires) et il existe un risque de fraude de la part des locataires. Cet article vise également à créer le cadre juridique qui permettra aux bailleurs - après des développements informatiques et le branchement d'outils dédiés - de pouvoir disposer d'un accès à certaines des données qu'ils doivent sinon collecter « à la main » lors des enquêtes réglementaires.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'abaissement du seuil de déclenchement du SLS vise à assujettir au paiement de ce surloyer l'ensemble des locataires dont les ressources dépassent les plafonds de ressources applicables pour l'attribution des logements et ce, dès le premier euro de dépassement alors que ce seuil est de 20% actuellement. Plus précisément, dans le cadre de l'article R. 441-23 actuellement en vigueur, pour les locataires de logements financés en PLAI ou en PLUS, le seuil de déclenchement est abaissé à 100 % des plafonds de ressources applicables à l'attribution de logements financés en PLUS et pour les locataires de logements financés en PLS, le seuil de déclenchement du SLS est abaissé à 100 % des plafonds de ressources applicables à l'attribution de ces logements.

L'abaissement du seuil de déclenchement du SLS assujettira à ce surloyer environ 211 000 ménages soit 131 000 ménages supplémentaires par rapport aux ménages assujettis au SLS en 2023.

Le rendement financier de la disposition sera très dépendant de la fixation des paramètres réglementaires qui déterminent les modalités de calcul du SLS. L'objectif est que le montant du SLS soit incitatif et cohérent avec les loyers des logements intermédiaires et des logements du parc privé. Dans ces conditions, le produit attendu peut être estimé à plusieurs dizaines de millions d'euros.

La suppression de la possibilité de prévoir des territoires d'exemption de SLS dans les PLH pourrait générer un montant de SLS supplémentaire, sous réserve du moindre rendement lié à l'exemption nouvelle en quartier à enjeu prioritaire de mixité sociale, difficile à évaluer à ce stade, notamment parce qu'il est prévu de laisser de la latitude aux collectivités dans la définition des résidences à enjeu prioritaire de mixité sociale.

Par ailleurs, la transmission des informations par l'administration fiscale au GIP SNE et la mise à disposition de ces dernières par le GIP SNE aux offices publics de l'habitat, aux sociétés anonymes HLM, aux sociétés anonymes coopératives HLM, aux sociétés de coordination et aux sociétés d'économie mixtes agréées devra permettre :

- De mettre fin aux confusions et erreurs, voire fraudes, les données étant certifiées à la source ;

- D'obtenir des données récentes et à jour ;

- De faciliter le travail des organismes visés qui n'auront plus besoin de récupérer l'ensemble des pièces justificatives auprès de leurs différents locataires et de mettre fin aux risques de retard des locataires dans la transmission des données (qui se traduisent par l'application d'un surloyer maximal et qui peuvent déboucher sur la résiliation du bail) ;

- Par voie de conséquence de dégager des personnels et des ressources affectés actuellement à cette mission et donc des marges pour les réinvestir dans la production

Il est à noter qu'il s'agit de données que les bailleurs et services de l'Etat demandent déjà aux demandeurs afin de mettre à jour leur dossier comme la réglementation le prévoit à l'article L. 441-2-1 du CCH qui précise que le SNE enregistre la demande et toutes modifications de cette dernière qui peut advenir dans le temps.

Par ailleurs, l'article vise à élargir les accès aux données nominatives du système national d'enregistrement (SNE) à de nouveaux destinataires. En effet, l'article L. 441-2-9 limite les accès aux données nominatives du SNE aux seuls services et personnes morales mentionnés aux premier et troisième alinéas de l'article L. 441-2-1. Or, l'ANCOLS, dans le cadre de ses missions de contrôle et d'évaluation, ainsi que les services, établissements publics ou personnes morales relevant de l'Etat dans leurs différentes missions d'évaluation des politiques publiques (au niveau national) et d'identification des ménages (au niveau déconcentré), ont également besoin d'accéder aux données nominatives du SNE. Par conséquent, il est nécessaire de modifier les dispositions en vigueur afin que l'ANCOLS et les services précités, dont ceux de l'Etat (services déconcentrés DDEETS en particulier) puissent également disposer d'un accès aux données nominatives du SNE.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Le seuil de déclenchement du SLS est actuellement fixé par la loi. S'agissant d'un seuil technique, partie intégrante du barème, la délégalisation de ce seuil et le renvoi de sa fixation à un décret était une option cohérente afin de permettre sa fixation, qui aurait préservé d'éventuelles évolutions ultérieures. Les modalités de détermination de ce seuil contribuent cependant à définir le public assujetti au SLS, au sein de l'ensemble des ménages locataires du parc social. La définition et la circonscription de ce public intéressent le législateur.

Par ailleurs, sur le fond, la disposition permet d'augmenter l'assiette des locataires assujettis. Pour améliorer les effets du SLS, notamment sur la mobilité des ménages, il aurait été possible de rendre les effets du SLS plus forts, sans changer l'assiette des assujettis. Il reste loisible au Gouvernement de décider à l'avenir une réforme du barème du SLS de ce type, qui pourra se faire par la voie règlementaire.

De la même manière, le dispositif actuel de répartition des recettes entre la CGLLS et les bailleurs (85%-15%) est déterminé par un arrêté. Une révision de cet arrêté permettrait de faire évoluer cette répartition sans avoir à légiférer. La disposition législative vise à encadrer la capacité de modulation de la répartition laissée au pouvoir réglementaire, en donnant aux bailleurs des garanties minimales en matière de conservation pour leur compte du produit du SLS, garanties actuellement absentes.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Les mesures proposées visent à assujettir au SLS davantage de locataires dont les ressources dépassent les plafonds applicables à l'attribution de ces logements et à réduire l'assiette maximale de calcul de la cotisation due à la CGLLS par les bailleurs sociaux au titre du SLS (50 % au plus des recettes du SLS au lieu de 100 %).

Elle vise également à remplacer l'exemption possible dans le cadre des PLH par une exemption d'office dans les résidences à enjeu prioritaire de mixité sociale, dont les critères de définition seront fixés dans un décret qui entrera en vigueur prochainement.

Ces mesures ne modifient pas les modalités de calcul prévues au barème de calcul du SLS (calculé en effectuant le produit de la surface habitable du logement par un coefficient de dépassement du plafond de ressources d'attribution d'un logement locatif social et par un supplément de loyer de référence (SLR) correspondant au montant en euros au m² de surface habitable fixé selon la zone géographique de localisation du logement).

Pour faciliter l'organisation et le traitement des données et éviter la multiplication des branchements sur les bases fiscales, il est proposé de faire transiter la récupération des données nécessaires aux enquêtes obligatoires par le GIP SNE. Les modalités de mise en place de cet échange seront précisées par un décret en Conseil d'État.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article modifie les articles L. 441-2-1, L. 441-2-9, L. 441-9, L. 441-3, L. 442-5 et L. 452-4 du CCH et abroge l'article L. 441-3-1 du CCH.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Sans objet.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

L'abaissement du seuil de déclenchement du SLS combiné à la réduction de la part du produit du SLS taxé au profit de la CGLLS devrait augmenter les recettes du SLS conservées annuellement par les bailleurs et ainsi contribuer au renforcement des moyens financiers du secteur HLM, en particulier en vue de financer la rénovation énergétique du parc social.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les bailleurs sociaux et les SEM agréées bénéficieront de l'élargissement du public cible du SLS et de l'assiette de calcul de la cotisation principale due à la CGLLS.

4.2.3. Impacts budgétaires

Le SLS n'étant pas considéré comme étant partie du loyer, il n'entraîne pas d'augmentation du montant de l'aide personnalisée au logement, qui solvabilise les locataires pour le paiement de leur loyer.

De surcroît, les locataires bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement (APL) ne sont pas assujettis au SLS. Ils ne sont d'ailleurs pas soumis à l'enquête annuelle réalisée par les bailleurs pour connaitre leur niveau de ressources.

Les mesures proposées n'auront donc pas d'impact sur la solvabilisation par l'APL des loyers des locataires de logements sociaux et l'augmentation du rendement du SLS n'aura pas d'effet sur le budget de l'Etat (programme 109).

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Il ne sera plus possible, dans le cadre des programmes locaux de l'habitat (PLH) adoptés ou prorogés postérieurement à la présente loi, de prévoir des exemptions de SLS et les exemptions des PLH échus ou à prolonger ne seront plus applicables. En 2022, 3,7 % des ménages locataires de logements sociaux soumis à l'enquête annuelle sur les ressources ont été exemptés de SLS parce que les logements étaient situés dans un territoire couvert par un PLH prévoyant l'exemption.

Cependant, l'objectif de maintien de la mixité sociale sera assuré par l'exemption du SLS en faveur des résidences à enjeu de mixité sociale. Cette évolution incitera ainsi les EPCI à s'engager dans la définition de ces résidences.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'administration fiscale devra transmettre des informations au GIP SNE selon des modalités à définir par décret en Conseil d'Etat. Des interfaces d'échanges vont devoir faire l'objet de développements assurant toutes les conditions de sécurité et de capacité voulues.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Ces mesures permettent de favoriser la mobilité du parc social des locataires assujettis au SLS et, ainsi, de libérer des logements pour les demandeurs de logement social les plus précaires.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les mesures proposées élargissent le périmètre du public locataire de logements sociaux assujetti au SLS (les ménages locataires dont les revenus sont compris entre 100 % et 120 % des plafonds de ressources applicables seront assujettis au SLS).

Elles permettent ainsi de favoriser la mobilité du parc social des locataires assujettis au SLS et, ainsi, de libérer des logements pour les demandeurs de logement social les plus précaires.

Par ailleurs, les mesures proposées permettent l'accès aux données personnelles des locataires qui n'auront pas besoin de transmettre une seconde fois leur justificatif de revenus.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite

A titre de précision, il n'est pas nécessaire de saisir la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) avant publication de l'article 12 du projet de loi.

 En effet, la CNIL doit être obligatoirement consultée pour avis préalablement à la mise en oeuvre (articles 8, 63 et 44 de la loi du 6 janvier 1978) :

- des traitements mentionnés aux articles 31 et 32 de la loi Informatique et libertés ;

- des traitements susceptibles d'engendrer un risque élevé pour les droits et libertés des personnes physiques après « Analyse d'Impact relative à la Protection des Données » (« AIPD ») ;

- des traitements nécessaires à la recherche publique.

Or, les propositions de rédaction du présent article ne sont pas concernées par ces hypothèses.

Le projet de décret en Conseil d'Etat prévu par l'article fera l'objet d'une consultation de la CNIL.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions relatives à l'abaissement du seuil de déclenchement du SLS et à l'élargissement de la part des recettes du SLS conservées par les bailleurs sociaux entreront en vigueur le 1er janvier de l'année civile suivant l'année de publication de la présente loi au Journal officiel de la République française. Cette entrée en vigueur différée est cohérente avec les modalités de collecte annuelle, par les bailleurs, des informations relatives aux ressources de leurs locataires et avec la période de référence applicable aux ressources comparées aux plafonds en vigueur pour l'attribution des logements (revenu fiscal de référence de l'année civile N-2). Elle est également cohérente avec les modalités de taxation du SLS au profit de la CGLLS : la cotisation est due pour l'année civile entière par les bailleurs sociaux exerçant l'activité assujettie à la cotisation le 1er janvier de l'année civile précédant l'année de contribution.

Les dispositions relatives à la suppression de la possibilité de prévoir des exemptions de SLS dans les programmes locaux de l'habitat s'appliqueront aux programmes adoptés ou prorogés à compter de la publication de la présente loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article s'appliquera de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion et à Mayotte (collectivités régies par l'article 73 de la Constitution).

Il ne s'appliquera pas aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution (Wallis-et-Futuna et la Polynésie Française), en Nouvelle Calédonie (articles 76 et 77 de la Constitution), dans les Terres australes et antarctiques française (article 72-3 de la Constitution), à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon (article 74 de la Constitution).

5.2.3. Textes d'application

La mesure d'abaissement du seuil de déclenchement du SLS nécessite un décret en Conseil d'Etat modifiant l'article R. 441-20 du CCH.

Par ailleurs, un décret en Conseil d'Etat doit préciser les modalités de mise en place, par le GIP SNE, de l'échange des données fiscales avec l'administration fiscale.

Article 13 - Ouvrir le bail mobilité au logement social

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Dans leur rapport commun de janvier 2016 sur le logement locatif privé, l'inspection générale des finances (IGF) et le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) estimaient que le cadre législatif de la location meublée était insuffisant pour permettre la prise en compte de baux inférieurs à un an. Ce même rapport constatait que la demande en logement meublé était en forte croissance, ce type de location étant particulièrement orienté vers les étudiants et les salariés en mobilité temporaire.

A la suite de ce rapport, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) a instauré un bail mobilité dans le parc locatif privé.

L'instauration de ce dispositif avait pour objectif de répondre aux difficultés d'accès à la location des étudiants et des actifs à la recherche d'une solution de location de courte durée. Il s'avère en effet que de plus en plus d'étudiants sont à la recherche de locations de quelques mois en raison du succès des cursus universitaires en alternance qui comprennent des périodes de stage et des périodes d'études dans des zones géographiques parfois distinctes. Quant aux salariés en mobilité temporaire, ils sont également de plus en plus nombreux du fait de l'évolution du marché de l'emploi et la location d'un meublé pour une courte durée est une réponse adaptée à leur situation.

A titre d'exemple, le nombre de nouveaux contrats d'apprentissage dans le secteur privé a été multiplié par 2,8 entre 2017 et 2022139(*) et, en corollaire, le besoin en logements meublés adaptés croit également.

Il peut également être précisé que la rémunération perçue par un apprenti, déterminée en fonction de son âge et de sa progression dans le ou les cycles de formation faisant l'objet du contrat (entre 27 % et 100 % du Smic suivant l'âge et le niveau d'études, ou le salaire minimum conventionnel si plus favorable pour un jeune en contrat d'apprentissage et entre 55 % et 100 % du Smic suivant l'âge et le niveau d'études, ou 85 % de la rémunération minimale prévue par la convention collective ou l'accord de branche si plus favorable pour un jeune en contrat de professionnalisation140(*) ) se situe dans la plupart des cas sous les plafonds de ressources qui doivent être respectés pour l'accès au logement social. Il y a donc un intérêt à essayer de permettre à ces jeunes d'accéder temporairement au parc social dans le cadre de leur apprentissage (à titre d'exemple, le plafond de ressources pour l'accès à un logement financé via un PLAI pour une personne seule en dehors de l'Ile-de-France est de 1 037 euros/mois et de 1194 euros/mois en Ile-de-France141(*)).

Le besoin de logements meublés dans le cadre de baux de courte durée est également avéré pour des salariés en mobilité dont la rémunération se situe sous les plafonds de ressources pour l'accès au logement social.

En outre, la location meublée répond parfaitement aux besoins en logement temporaire des salariés saisonniers et le bail mobilité simplifie les rapports entre locataires et propriétaires (pas de dépôt de garantie, pas de révision du loyer en cours de bail, forfaitisation des charges).

Par ailleurs, si la création du bail mobilité dans le parc privé avait pour objectif d'apporter une solution adaptée à ces publics, l'impact de cette disposition a été contrecarré par l'essor des meublés saisonniers avec le très fort développement des plateformes de mise en relation entre particuliers pour la location de meublés de tourisme (près de 20 % des nuitées saisonnières réalisées en France aujourd'hui le sont dans des meublés de tourisme mis à la location par un particulier142(*)). Cet engouement des propriétaires du parc privé pour les meublés saisonniers a pour conséquence que la demande en logement meublé pour des périodes de quelques mois des étudiants et des actifs n'est toujours pas satisfaite, les propriétaires privés privilégiant en général des locations touristiques au bail mobilité en raison d'une plus forte rentabilité.

Il est proposé d'élargir au parc social le dispositif du bail mobilité actuellement réservé au parc privé.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le droit au logement est garanti par les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Ouvrir le bail mobilité au logement social permet de faciliter l'accès au logement pour les jeunes en formation et les salariés en mobilité professionnelle et contribue au respect du droit au logement.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le droit au logement est garanti par l'article 25 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Ouvrir le bail mobilité au logement social permet de faciliter l'accès au logement pour les jeunes en formation et les salariés en mobilité professionnelle et contribue au respect du droit au logement.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La définition des droits et obligations respectifs des bailleurs et des locataires relève de la loi.

Le titre Ier ter de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 porte sur les rapports entre bailleurs et locataires dans les logements meublés loués dans le cadre d'un bail mobilité. L'instauration du bail mobilité dans le parc social nécessite d'adapter certaines des dispositions contenues dans ce titre de la loi n° 89-462. L'article 40 de cette même loi précise pour les différentes catégories de logements sociaux quelles sont les dispositions de la loi qui ne leur sont pas applicables. Il convient également d'apporter des modifications à cet article pour préciser quelles sont les dispositions figurant au titre Ier ter de la loi qui ne sont pas applicables dans le parc social.

Enfin, il convient d'ajouter au code de la construction et de l'habitation (CCH) un cas de dérogation au principe selon lequel il est interdit de louer en meublé un logement social. Ce principe est précisé à l'article L. 442-8.

Il convient également de préciser au livre IV du CCH quelles sont les règles spécifiques aux logements sociaux des bailleurs sociaux qui s'appliquent au bail mobilité et quelles sont celles de ces règles qui ne s'appliquent pas à ce type de bail.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le bail mobilité dans le parc social a pour objectif de répondre aux besoins des étudiants et des actifs à la recherche d'une solution de location de courte durée de quelques mois.

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) a instauré ce dispositif dans le parc locatif privé mais les propriétaires de meublés privilégient d'autres dispositifs et la demande de ces publics n'est toujours pas satisfaite. C'est pourquoi il est proposé d'ouvrir le bail mobilité au parc social.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il pouvait être envisagé de ne pas légiférer et de continuer à recourir aux dispositifs en vigueur dans le parc social répondant à un besoin de mobilité professionnelle de courte durée.

Néanmoins, les dispositifs en vigueur ne présentent pas tous les avantages du bail mobilité :

- la faculté de location/sous-location au profit des salariés en mobilité professionnelle prévue à l'article L.442-8-1 du CCH réclame l'intermédiation par un organisme déclaré, qui est parfois difficile à mettre en place faute d'organismes présents sur certains territoires ou disposant de la surface financière suffisante pour assumer les risques locatifs liés à cette intermédiation ;

- la disposition dite article 109 ELAN (article 353-22 du CCH) permettant une location de courte durée, meublée ou pas, cible les jeunes de moins de 30 ans tandis que la mobilité professionnelle de courte durée permise par le bail mobilité est également ouverte aux personnes de plus de 30 ans. Le contrat de location, d'une durée maximale d'un an, est renouvelable tant que le jeune continue de remplir les conditions d'accès au logement, notamment en terme d'âge. L'accès à un logement social dans le cadre de ce dispositif s'inscrit dans le droit commun des conditions d'accès au parc social (dépôt d'une demande de logement social, examen de la demande par la commission d'attribution des logements et d'examen de l'occupation sociale des logements).

3.2. DISPOSITIF RETENU

La mesure consiste à étendre au parc social l'application des dispositions de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 relatives au bail mobilité. Le bail mobilité ne porte que sur des logements meublés et peut être conclu pour une durée minimale d'un mois et maximale de dix mois.

Certaines adaptations sont toutefois indispensables pour tenir compte de la nécessaire application de plafonds de ressources et de plafonds de loyers aux logements sociaux:

- Ainsi, la fixation du loyer dans le parc social se fait-elle dans la limite du loyer maximal réglementairement applicable au logement (qu'il s'agisse d'un logement conventionné à l'aide personnalisée au logement ou non conventionné). Le loyer n'est pas fixé en référence au loyer appliqué au précédent locataire du logement.

- A l'issue du bail mobilité, il n'est pas possible pour le locataire de conclure un bail meublé afin de rester dans le logement afin de ne pas créer une filière d'accès au logement social de « longue durée » parallèle aux procédures d'attribution de logements sociaux de droit commun.

- Il est prévu que les règles spécifiques au parc social (plafonds de ressources et loyers maximaux) s'appliqueront aux locataires en bail mobilité, à l'exception de la procédure d'attribution de logement social (demande de logement social, attribution après passage en CALEOL) et de révision de la valeur des loyers dans la limite de l'IRL, non adaptée à des baux de courte, voire très courte durée.

La location meublée dans le cadre d'un contrat de courte durée demeure en effet dérogatoire au principe de l'accueil durable dans le parc, dans des logements loués nus, de locataires qui ont déposé une demande de logement et se sont vu attribuer un logement correspondant à leurs besoins après examen de ceux-ci par la CALEOL.

Les locataires occupant un logement social dans le cadre d'un bail mobilité ne bénéficieront pas du droit au maintien dans les lieux. En revanche, sous réserve de remplir les conditions requises, ils percevront les aides personnalisées au logement au même titre que les autres locataires du parc social.

Le bail mobilité pourra être proposé dans les logements sociaux conventionnés ou non conventionnés appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré (OHLM), ainsi que dans les logements sociaux conventionnés des bailleurs autres qu'OHLM (notamment les sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux (SEM) et les collectivités territoriales).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Sont modifiés dans l'ordre juridique interne :

- La loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 (modifications apportées aux articles 25-12 et 40) ;

- Le code de la construction et de l'habitation (création de deux articles : L 353-23 et L. 442-8-5).

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La location de logements sociaux sous la forme d'un bail mobilité fait partie du service d'intérêt économique général (SIEG) « logement social » prévu à l'article L.411-2 du CCH en application de l'article 106 du TFUE et de la décision de la Commission européenne prévue à cet article, dite décision « Almunia ».

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

En répondant au besoin en logements temporaires des jeunes en formation et des salariés en mobilité géographique, le dispositif aura un impact bénéfique sur le taux de chômage de la population, tout particulièrement chez les jeunes (pour mémoire, le taux de chômage des jeunes est nettement supérieur à celui du reste de la population. En 2023, il atteint 17,2 % en moyenne sur l'année chez les 15-24 ans, contre 6,7 % chez les 25-49 ans et 5,1 % chez les 50 ans ou plus).

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La disposition favorisera l'embauche pour les entreprises de saisonniers et d'apprentis. Elle évitera les mobilités qui ne se font pas en raison d'une incapacité à se loger.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans objet.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'extension du bail mobilité au parc social pourrait aider à satisfaire les besoins de logement de travailleurs saisonniers dans certains territoires, concourant ainsi à l'attractivité de ces territoires et au dynamisme de leur activité économique. Compte tenu des surcoûts de gestion générés par la gestion de logements en bail mobilité (équipement des logements, rotation plus importante...), le recours par les bailleurs sociaux au bail mobilité s'inscrira en général dans des partenariats étroits entre les bailleurs et les collectivités en vue de répondre à des besoins identifiés dans les territoires dans les Programmes Locaux de l'Habitat par exemple.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Sans objet.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La mise en place du bail mobilité dans le parc social a vocation à répondre aux difficultés d'accès au logement rencontrées par les personnes en formation professionnelle, en études supérieures, en contrat d'apprentissage, en stage, en engagement volontaire dans le cadre d'un service civique, en mutation professionnelle ou en mission temporaire au regard de la courte durée de location souhaitée.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Le dispositif a notamment vocation à répondre aux besoins des étudiants et des jeunes actifs et à faciliter notamment leur insertion sur le marché de l'emploi. En effet, le logement est le principal poste de dépense en cas de mobilité143(*). C'est pourquoi l'instauration du bail mobilité dans le parc social permet de lever un des freins à la mobilité des jeunes et d'augmenter leur chance de trouver une formation adaptée à leur situation et leur permet de candidater à des offres d'emploi dans un secteur géographique ne correspondant pas à leur lieu de vie habituel. Le caractère abordable des tarifs de location, strictement encadrés par la législation relative au logement social, constituera un atout supplémentaire pour des publics disposant de ressources modestes dans des marchés où les locations meublées privées peuvent être très chères.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Comme le bail mobilité concerne exclusivement la location de logements meublés, le locataire devra s'acquitter du paiement du forfait meubles144(*) en sus du loyer fixé dans la convention APL pour la location du logement. Dans le parc social, ce forfait meubles est toutefois strictement plafonné par un arrêté ministériel en application de l'article L. 442-8-3-1. Compte-tenu des réévaluations annuelles, ce forfait s'établit pour 2024 à 29,07 euros pour un studio ou TI bis avec un supplément de 8,48 euros par pièce supplémentaire.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis favorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

En application du principe d'identité législative, la mesure est applicable de plein droit dans les logements non conventionnés à l'aide personnalisée au logement appartenant aux OHLM situés dans les départements et régions d'outre-mer régis par l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion et Mayotte).

Dans les autres collectivités d'Outre-Mer, en application du principe de spécialité législative, la mesure n'est pas applicable.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

Article 14 - Encourager la vente directe aux locataires dans le parc social

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La mise en oeuvre du processus de vente de logements sociaux a connu des évolutions significatives depuis son introduction légale en 1965145(*). Elle obéit à plusieurs logiques :

- développer l'accession à la propriété : la vente des logements sociaux a initialement été conçue comme un outil d'accession sociale à la propriété des locataires en permettant à des habitants qui ne pourraient pas accéder au marché traditionnel d'accéder à la propriété ;

- favoriser la mixité sociale en diversifiant les statuts d'occupation des logements à l'échelle d'un quartier, en fixant dans les quartiers sensibles la population la plus solvable pour limiter leur paupérisation ;

- permettre au bailleur d'optimiser son patrimoine en lui permettant de redéfinir un positionnement géographique ou qualitatif de son patrimoine ;

- développer des capacités de financement nouvelles pour le bailleur qui cède du patrimoine.

Les stratégies immobilières des organismes ont pris le pas, dans une période récente, sur le simple mode originel d'accession sociale à la propriété des locataires. En effet, les organismes doivent engager des investissements massifs en matière de production nouvelle et de rénovation énergétique du parc existant. Les besoins en fonds propres qui découlent de ces ambitions ont été augmentés par le renchérissement des coûts de production et de rénovation des logements (hausse du coût des matériaux et des taux d'intérêt). Les organismes HLM se voient ainsi dans la nécessité de mobiliser un niveau de fonds propres bien plus élevé que par le passé. L'autofinancement dégagé par l'exploitation de leur patrimoine est largement insuffisant pour répondre à ce besoin. De ce fait, la vente de logements sociaux est devenue un levier majeur pour dégager des fonds propres chez les bailleurs sociaux et ainsi financer leurs investissements.

Pour autant, bien qu'ayant fait l'objet de plusieurs lois146(*) et de deux conventions d'objectifs entre l'État et l'union des organismes d'HLM, la vente des logements sociaux n'a pas atteint les objectifs qui lui étaient assignés explicitement. Ces objectifs étaient de céder 1% du parc chaque année, soit 50 000 logements aujourd'hui. Bien qu'il ait plus que doublé depuis 2007, le nombre annuel de logements sociaux vendus à l'unité plafonne autour de 12 000 à 13 000.

En 2014, le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) a fait une évaluation de la politique des ventes, émettant un certain nombre de recommandations pour permettre une plus grande efficacité de la politique de vente des logements sociaux147(*).

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) a permis de définir un nouveau cadre législatif pour permettre à la fois un développement quantitatif des ventes et assurer la pérennité du modèle français du logement social. De plus, la loi ELAN a contribué à renforcer les dispositifs de foncier solidaire (OFS) et de bail réel solidaire (BRS).

Les OFS sont des structures détenant perpétuellement la propriété de terrains sur lesquels sont bâtis des logements qui sont cédés à des « accédants à la propriété » sous forme de baux réels solidaires (BRS) de très longue durée consentis à des conditions financières sensiblement inférieures aux prix auxquels seraient vendus ces logements en pleine propriété sur le marché libre. La loi ELAN a élargi leur champ, initialement limité aux structures non lucratives, à des structures à lucrativité limitée. Peuvent ainsi être agréées comme OFS les organismes d'habitation à loyer modéré, les entreprises sociales pour l'habitat (ESH), les coopératives HLM et les sociétés d'économie mixtes (SEM) agréées habitat.

Les ménages acquéreurs d'un BRS détiennent les droits réels attachés au bâti pour une durée de 18 à 99 ans et versent à l'OFS une redevance foncière mensuelle au titre de la location du sol. La loi ELAN a également permis l'intégration des logements sous BRS au décompte des logements sociaux prévus par l'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi « SRU », codifié aux articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation (CCH).

Depuis 2020, une mission statistique sur les ventes d'HLM a été confiée à l'ANCOLS afin de mieux suivre les ventes réalisées dans le cadre des dernières évolutions législatives. Cette mission repose sur les données du répertoire des logements locatifs des bailleurs sociaux (RPLS) et permet un chiffrage précis du nombre de logements sociaux vendus tout en identifiant les catégories d'acquéreurs de ces logements (voir infra).

Source : ANCOLS à partir de RPLS, données définitives 2021.

Le contexte particulier de pandémie de COVID en 2020 et 2021 ne permet pas encore de constater pleinement l'impact attendu de la loi ELAN sur la vente d'HLM. L'année 2020 est caractérisée par une forte baisse de la vente entre organismes de logement social (-9800 ventes par rapport à 2019). Toutefois, une reprise de la vente par sorties du parc social est sensible dès 2021. En tout état de cause, une dynamique positive en matière d'autorisation de mise en ventes a été constatée à la suite de l'entrée en vigueur de la loi ELAN, dynamique que les dispositions du présent article ont pour ambition d'amplifier.

Face à ce constat, il est en effet envisagé de prendre plusieurs dispositions dans la continuité de celles prises par la loi ELAN, dans un souci de simplification du processus de vente des logements sociaux, et qui vont en particulier permettre d'encourager davantage la vente aux locataires du parc social. En application des dispositions du II de l'article L. 443-11 du CCH, les logements occupés des bailleurs sociaux ne peuvent en effet être vendus qu'à leurs locataires dès lors que ceux-ci l'occupent depuis au moins deux ans.

Par ailleurs, l'article 106 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et la simplification de l'action publique locale, dite loi « 3DS », a permis aux organismes HLM agréés OFS de pouvoir conclure des BRS sur leur patrimoine locatif social existant (vente HLM dans le régime du BRS). Il est également envisagé de simplifier certaines de ces dispositions introduites par la loi 3DS relatives à la vente HLM en BRS afin d'harmoniser ces procédures d'autorisation de vendre avec les règles de droit commun de la vente HLM.

Plus précisément, l'article L. 443-7 du CCH a été complété par la loi 3DS afin de prévoir que, lorsque la vente par un organisme HLM agréé pour être organisme de foncier solidaire (OFS) d'un logement situé dans une commune déficitaire au sens de la loi SRU s'opère au moyen d'un bail réel solidaire, l'avis préalable du préfet et du maire de la commune d'implantation est requis. Toutefois, cette vente doit également faire l'objet d'une autorisation de vendre au titre de l'article L. 443-7 du CCH, soit par le biais de son inscription dans le plan de mise en vente de la convention d'utilité sociale (CUS, contrat passé entre un organisme HLM et l'État, qui définit la politique patrimoniale de l'organisme HLM, ses engagements et ses objectifs), soit par le biais d'une demande d'autorisation dite « au fil de l'eau ».

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Sans objet, le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé sur la vente de logements sociaux.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Les bailleurs sociaux sont chargés d'un service d'intérêt économique général (SIEG).

Ce service est défini à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation en application de l'article 106 du TFUE et de la décision de la Commission européenne prévue à ce dernier article, soit la décision du 20 décembre 2011 relative à l'application de l'article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général, dite décision « Almunia »148(*).

Plus précisément, l'article 4 de la décision susmentionnée du 20 décembre 2011 précise :

« Mandat

La gestion du service d'intérêt économique général est confiée à l'entreprise concernée au moyen d'un ou de plusieurs actes, dont la forme peut être déterminée par chaque État membre.

Ce ou ces actes mentionnent notamment :

a) la nature et la durée des obligations de service public ;

b) l'entreprise et, s'il y a lieu, le territoire concerné ;

c) la nature de tout droit exclusif ou spécial octroyé à l'entreprise par l'autorité octroyant l'aide ;

d) la description du mécanisme de compensation et les paramètres de calcul, de contrôle et de révision de la compensation ;

e) les modalités de récupération des éventuelles surcompensations et les moyens d'éviter ces dernières, et

f) une référence à la présente décision. »

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Les politiques de vente de logements sociaux en Europe visent des objectifs très divers :

- Dans certains pays, il s'agit avant tout de faciliter l'accession à la propriété et les ventes se font donc en priorité au bénéfice des locataires du parc social qui peuvent contraindre les bailleurs à la vente ; ces pays (tels que le Royaume-Uni) mettent en avant le droit à l'achat des locataires (« right to buy ») ;

- Dans d'autres pays, il s'agit avant tout de générer des ressources supplémentaires pour les bailleurs sociaux et les ventes sont possibles au bénéfice de différents types d'investisseurs, moyennant éventuellement des mesures protectrices pour les locataires de ces logements vendus ; ces pays (tels que les Pays-Bas ou la France) mettent en avant le droit à la vente des bailleurs (« right to sell »). Toutefois, le régime français est mixte, dans la mesure où la vente de logements occupés ne peut se faire qu'au bénéfice de leurs occupants.

- Enfin certains pays (tels que l'Allemagne) misent avant tout sur la vente en bloc de logements sociaux au profit de personnes morales.

Les modalités d'utilisation du produit des ventes HLM sont également diversement encadrées, tantôt pour garantir la réutilisation de ce produit dans des opérations de développement du logement social, tantôt pour permettre qu'il soit utilisé à d'autres fins (y compris aux fins de désendettement général des administrations publiques)149(*).

Source : Eclairages n°27, La Banque des territoires, juillet 2022.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La procédure d'autorisation de vendre applicable à la vente d'un logement par un organisme HLM agréé OFS au moyen d'un bail réel solidaire apparaît comme étant trop lourde, plusieurs autorisations étant requises aux différents stades de la procédure de vente.

Pour favoriser les ventes HLM, il est proposé de simplifier la procédure en réduisant le nombre d'avis sollicités pour réduire la durée des procédures. En effet, les ajouts issus de la loi 3DS en matière de vente HLM en BRS ont rendu la procédure d'autorisation de vendre peu lisible avec des avis pouvant apparaitre comme redondants avec l'autorisation de vente donnée pour les mêmes logements.

Cette simplification de la procédure d'autorisation doit également préserver, et même renforcer, le rôle de l'ensemble des élus en leur donnant le pouvoir d'autoriser « au fil de l'eau » les ventes de logement sociaux sur leur territoire, en lieu et place du préfet et ce, dans un délai réduit à deux mois au lieu de quatre. Les collectivités locales informeront le représentant de l'Etat des autorisations accordées.

Le principe de l'inscription d'un plan de vente dans la convention d'utilité sociale (CUS) signée par le bailleur et le représentant de l'Etat, avec avis conforme des communes déficitaires au titre de l'article L.302-5 du CCH, n'est cependant pas remis en cause.

Il est également proposé d'apporter des précisions sur la nature des ventes dans les différentes demandes d'autorisations de vendre (CUS et fil de l'eau) afin que les élus puissent juger à meilleur escient de la pertinence de la vente et ainsi faciliter leur décision et par conséquent le nombre de ventes autorisées. Le maintien du caractère social des logements vendus (cas d'une vente en BRS) ou les garanties apportées pour éviter la création de copropriétés en difficulté constituent ainsi des éléments qui peuvent être déterminants dans l'appréciation par les élus de l'opération de vente.

L'ensemble de ces propositions nécessite que des dispositions législatives relatives à ces procédures soient modifiées au sein du code de la construction et de l'habitation. S'agissant de dispositions de nature législative relatives au régime de la propriété et faisant évoluer les compétences des collectivités territoriales, elles ne peuvent être modifiées que par la loi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les objectifs de la politique de vente de logements sociaux restent inchangés :

- politique d'accession à la propriété ;

- politique de mixité sociale ;

- politique d'optimisation des capacités financières des bailleurs.

Le dispositif de vente de logements sociaux, moyen d'accession sociale à la propriété, est devenu un véritable outil de gestion stratégique des ressources propres des opérateurs du logement social ; ainsi, au vu de la conjoncture actuelle, il se doit d'être plus efficace également pour des raisons financières.

Les mesures de simplification et d'harmonisation des procédures d'autorisation de vendre visent de fait à encourager la politique de vente de logements sociaux et à accroître le volume de logements vendus. Elles doivent permettre de renforcer le rôle des collectivités locales (communes et métropoles) dans la gestion des autorisations de vente.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La volonté de simplifier les procédures en vigueur exige la modification de la loi, les procédures à suivre en matière de vente HLM étant fixées par la loi.

Aucune autre option n'a été envisagée, dès lors que le régime de la vente HLM a déjà été largement modernisé, sur tous ses aspects, par la loi ELAN.

3.2. DISPOSITIF RETENU

S'agissant des ventes sous le régime du BRS, dans un souci de simplification et d'harmonisation des procédures, il est proposé de supprimer l'avis simple du préfet et du maire de la commune d'implantation, qui apparaît redondant avec l'autorisation de vendre. Les autorisations de vendre au titre de l'article L. 443-7 seraient maintenues, en précisant au sein du plan de mise en vente (PMV) de la CUS ainsi que dans les autorisations « au fil de l'eau » la nature spécifique de la vente, à savoir qu'elle se fait le cas échéant au moyen d'un BRS. Il est également envisagé d'ajouter une mention concernant les logements qui donneront lieu à l'application différée du statut de la copropriété (définie aux articles L. 443-15-5-1 à L. 443-15-5-8). Cette précision vise à informer le plus largement possible sur la nature des ventes opérées et à offrir le plus de garanties aux élus sur les effets de ces ventes sur les résidences concernées.

De plus, il est envisagé de renforcer le rôle de la commune en lui permettant d'accorder toutes les autorisations de vendre dites « au fil de l'eau » (hors CUS) sur son territoire, en lieu et place du représentant de l'Etat dans le département. Le bailleur devra saisir directement la commune d'implantation, qui se substituera au préfet, que cette commune soit déficitaire au titre de l'article L. 302-5 du CCH ou non (actuellement, l'avis conforme de la commune sur les ventes HLM au fil de l'eau ne concerne que les communes déficitaires). Cette mesure vise à favoriser la vente HLM en simplifiant la procédure d'autorisation de vendre et en renforçant le rôle des communes, qu'il s'agisse de communes déficitaires comme de communes non déficitaires. Dans les territoires des métropoles qui pouvaient déjà exercer cette compétence par délégation de l'Etat dans le cadre des conventions de délégation des aides à la pierre visées au V Bis de l'article L. 301-5-1 du code de la construction et de l'habitation, il est proposé de transférer de droit cette compétence de la commune vers la Métropole.

Pour mémoire, la vente HLM en communes carencées sans convention d'utilité sociale à des personnes autres que des OHLM n'est pas permise (second alinéa de l'article L.443-7 CCH). Le projet d'article ne modifie pas cette interdiction.

Enfin, ces dispositions constituent un transfert de compétence aux communes qui fera l'objet d'une compensation financière de la part de l'Etat dans les conditions prévues aux articles L. 1614-1 à L. 1614-7 du code général des collectivités territoriales et précisées au IV de l'article 151 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Les dispositions présentées entraineront une modification des articles L. 301-5-1, L. 443-7 et L. 445-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 3641-1 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La vente HLM fait partie du service d'intérêt économique général (SIEG) défini à l'article L. 442-1 du CCH ; par conséquent, le traitement comptable et financier de ses produits est soumis aux règles spécifiques qui encadrent le SIEG logement social.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

En 2021, les ventes de logements, par les bailleurs sociaux, ont généré un produit de 1,5 milliard d'euros, soit 5 % du produit d'exploitation des bailleurs150(*). Les dispositions de l'article ont pour objet de faciliter l'augmentation de ce produit.

Les ventes HLM constituent actuellement plus de la moitié des ressources dégagées par les bailleurs sociaux et destinées à être réinvesties dans le développement d'une offre nouvelle ou la réhabilitation du parc existant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré sont à l'origine de la majorité des ventes de logements sociaux : elles sont en effet concernées par 60 % des ventes de logements en 2021 (hors opérations d'accession à la propriété)151(*).

Les ventes permettront d'alimenter les fonds propres de ces bailleurs afin de leur donner une capacité d'auto-financement pour la construction neuve ou pour la réhabilitation.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans objet.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les dispositions présentées affecteront positivement le pouvoir de décision des collectivités, communes ou métropoles suivant les territoires, qui se verront renforcées dans leur rôle en se substituant au préfet pour délivrer les autorisations de vendre dans le cadre de la procédure dite « au fil de l'eau » (définie à l'article L. 443-7 du CCH).

Les précisions apportées aux autorisations de vendre inscrites dans le plan de mise en vente de la convention d'utilité sociale mais également celles instruites au fil de l'eau permettront aux communes et aux métropoles d'avoir une vision complète des stratégies de ventes des bailleurs présents sur leur territoire. Cela leur permettra de se prononcer sur ces ventes en toute connaissance de cause en levant certaines de leurs appréhensions légitimes.

Au vu de l'estimation sommaire de l'activité administrative que représente la gestion de ces ventes pour les services de l'Etat présentée au § 4.4 et en considérant par ailleurs qu'aujourd'hui les communes (et les métropoles) sont déjà sollicitées dans le cadre des dispositifs d'autorisation de vente relevant de l'Etat, l'impact en terme de charge administrative pour chaque commune ou métropole devrait être très limité et ces missions pourront être exercées par un unique collaborateur. En tout état de cause, les dispositions constituent un transfert de compétence aux communes qui devra être évalué précisément et fera l'objet d'une compensation financière de la part de l'Etat dans les conditions prévues aux articles L. 1614-1 à L. 1614-7 du code général des collectivités territoriales et précisées au IV de l'article 151 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La présente mesure supprimera l'instruction des ventes HLM « au fil de l'eau » par les services déconcentrés de l'Etat. S'il est difficile d'estimer précisément le volume d'activité que représentent les ventes au fil de l'eau pour les services, on notera que chaque année, la vente de 10 000 à 20 000 logements sociaux est engagée en France soit quelques centaines d'autorisations au plus. Chaque direction départementale des territoires et de la mer instruit donc au plus 10 à 30 demandes annuellement et cette instruction est assurée en général par un seul collaborateur au sein de la direction, également responsable d'autres missions de contrôle et de suivi des organismes de logement social.

La procédure d'autorisation par le plan de mise en vente de la CUS reste, quant à elle, inchangée.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La disposition vise à favoriser l'accès à la propriété des ménages à revenus modeste et la mixité sociale résidentielle en permettant la cohabitation de plusieurs statuts d'habitants (propriétaires, locataires).

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Le Gouvernement ambitionne, par les présentes mesures, de développer l'offre d'accession à la propriété, pour les ménages les plus modestes en priorité, mais aussi pour l'ensemble des ménages.

Le développement de la vente permettra le développement d'une nouvelle offre de logement social, limitant ainsi largement les effets d'éviction. Il est ainsi estimé qu'un logement vendu à l'unité dégage, par ses plus-values, les fonds propres nécessaires à la production de trois à quatre logements neufs.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales et a rendu un avis favorable le 25 avril 2024.

Le Conseil national de l'habitat (CNH) a été consulté à titre obligatoire en application de l'article R* 361-2 du code de la construction et de l'habitation et a rendu un avis défavorable le 24 avril 2024.

Aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article s'appliquera de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion et à Mayotte (collectivités régies par l'article 73 de la Constitution).

Il ne s'appliquera pas aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution (Wallis-et-Futuna et la Polynésie Française), en Nouvelle Calédonie (articles 76 et 77 de la Constitution), dans les Terres australes et antarctiques française (article 72-3 de la Constitution), à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon (article 74 de la Constitution).

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.


* 1 Les communes nouvellement entrantes dans le dispositif bénéficient de taux réduits sur leurs premières périodes triennales (15 % puis 25 %). Les communes proches de leur taux cible ont des taux augmentés pour faciliter leur sortie du dispositif (50 % quand la commune est entre deux et quatre points de son taux cible ; 100 % si elle est à moins de deux points).

* 2 20 % lorsque la commune dispose d'une part de logements locatifs sociaux inférieure à 10 % et qu'elle n'est pas couverte par un programme local de l'habitat.

* 3 Banque des territoires, Eclairages n° 22, Logement social et territoires, juillet-août 2020, p. 5.

* 4 Housing Europe, Etat du logement dans l'Union européenne, 2017.

* 5 Banque des territoires, Eclairages n° 22, Logement social et territoires, juillet-août 2020, p. 13.

* 6 OCDE, Base de données sur le logement abordable.

* 7 Cour des comptes, L'application de l'article 55 de la loi SRU, février 2021.

* 8 Article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 9 CDC Habitat, Etudes clients et prospective, Occupation des logements LLI - Données CDC Habitat - Mars 2024 (non publiée), p. 5 : sur 7 460 nouveaux ménages accueillis dans le parc LLI de CDC Habitat en 2023, 51 % ont des ressources qui les rendent éligibles au logement social (19 % ont des ressources inférieures aux plafonds PLUS et 32 % aux plafonds PLS).

* 10 Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN).

* 11 Deuxième alinéa de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 12 Source : déclarations des opérations de logements locatifs intermédiaires en application de l'article L. 302-16-1 du CCH.

* 13 Service des données et études statistiques, Stat Info Logement n° 616, Commercialisation des logements neufs - Vente aux institutionnels au quatrième trimestre 2023, Février 2024.

* 14 INSEE, Caractéristiques de la construction par activité en 2021, 25 septembre 2023.

* 15 3° du I. de l'article 279-0 bis A du code général des impôts.

* 16 Les 83 communes non soumises à bilan sont entrées dans le dispositif SRU en 2023 du fait d'évolutions liées à leur démographie, à leur rattachement intercommunal ou à la fin de leur régime d'exemption.

* 17 Etude INSEE, Les familles en 2020 : 25 % de familles monoparentales, 21 % de familles nombreuses, 13 septembre 2021.

* 18 Idem.

* 19 Sénat, rapport d'information n° 485 (2023-2024) de la délégation aux droits des femmes (C. BROSSEL, B. GOSSELIN), Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales, 28 mars 2024.

* 20 CDC Habitat, op. cit.

* 21 Etude ANCOLS, 54 % des ménages résidents en France métropolitaine sont éligibles aux logements PLUS, mars 2024.

* 22 ANCOLS, Les attributions de logements sociaux - Tableau de bord 2022, 23 janvier 2024.

* 23 Comité pour l'économie verte, Les instruments incitatifs pour la maitrise de l'artificialisation des sols, 2019.

* 24 1° de l'article L. 371-4 du code de la construction et de l'habitation.

* 25 Décision 94-359 DC, 19 janvier 1995, cons. 5, 6, 7, 8, Journal officiel du 21 janvier 1995, page 1166.

* 26 « les HLM » en chiffres, Union sociale pour l'habitat (USH), 2018.

* 27 https://www.notaires.fr/fr/immobilier-fiscalite/urbanisme-et-prix-du-foncier.

* 28 Article L. 302-1, III du code de la construction et de l'habitation.

* 29 Voir notamment l'article R. 302-1-4 du code de la construction et de l'habitation.

* 30 Décret n° 2018-1350 du 28 décembre 2018 relatif à la publication sous forme électronique des informations portant sur les valeurs foncières déclarées à l'occasion des mutations immobilières.

* 31 Voir notamment le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

* 32 Voir not. L'article L. 151-41 du code de l'urbanisme.

* 33 Voir notamment les articles L. 151-8 et s. du code de l'urbanisme.

* 34 Voir par exemple l'article L. 151-28 du code de l'urbanisme.

* 35 La saisine du Domaine est obligatoire dans les cas détaillés par la charte des services du domaine : https://www.collectivites-locales.gouv.fr/sites/default/files/migration/charte_domaine_epr02_print.pdf

* 36 Maîtriser l'impact économique du foncier, Agir sur la valeur du foncier : les cessions à prix minoré des collectivités territoriales, Cerema, avril 2019.

* 37 Par exemple pour la vente des HLM : article L. 443-12-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 38 Voir les articles L. 329-1 du code de l'urbanisme et L. 255-1 et s. du code de la construction et de l'habitation.

* 39 Voir les articles L. 256-1 et s. du code de la construction et de l'habitation.

* 40 Voir les articles L. 321-18 et s. du code de l'environnement.

* 41 Notamment : rapports de Dominique Figeat et du député Daniel Goldberg en 2016, rapport et proposition de loi du député Lagleize en 2019, rapport de 2021 de la commission pour la relance durable de la construction de logements, présidée par M. François Rebsamen, Maire de Dijon, Président de Dijon Métropole.

* 42 Articles L. 212-1 et suivant du code de l'urbanisme.

* 43 Voir not. CE, 8 juin 1994, Commune de Mitry-Mory, n° 126486 : « si l'objectif de faire échec à la spéculation foncière pouvant résulter de l'existence de projets d'aménagement ne figure pas au nombre de ceux mentionnés à l'article L. 300-1, ledit objectif constitue le fondement même de l'édiction des dispositions législatives et réglementaires relatives aux zones d'aménagements différés ».

* 44 Sur ce dispositif, voir notamment : https://www.notaires.fr/fr/collectivites-territoriales/droit-de-preemption-et-dexpropriation/le-droit-de-delaissement.

* 45 Article L. 312-6 du code de l'urbanisme.

* 46 Article L. 102-15 du code de l'urbanisme.

* 47 Articles L. 211-1 et suivants du code de l'urbanisme.

* 48 Article L. 211-4 du code de l'urbanisme.

* 49 Article L. 210-1 du code de l'urbanisme ; Voir plus largement le titre Ier du livre II du code de l'urbanisme.

* 50 Article L. 213-3 du code de l'urbanisme.

* 51 Article L. 211-2 du code de l'urbanisme.

* 52 Article L. 211-2 du code de l'urbanisme.

* 53 Article L. L. 211-2-4 du code de l'urbanisme.

* 54 Voir à ce propos la décision du CE refusant de renvoyer une QPC et jugeant que du fait de cette exigence (existence d'un projet) et des motifs d'intérêt général énumérés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, l'article L. 201-1 du code de l'urbanisme relatif au droit de préemption urbain ne porte pas au droit de propriété ou à la liberté contractuelle une atteinte contraire à la constitution (CE 12/11/2011 n° 347444, aux Tables sur ce point ; n° 2014-701 DC du 9 octobre 2014, point 21 ; pour une référence explicite à la lutte contre la spéculation foncière comme étant une mission des SAFER  : Décision 2018-707 QPC - 25 mai 2018, point 7).

* 55 CE, Assemblée, 6 juin 1969, Dame Laudon, p. 288.

* 56 V. p. 13 de ladite étude, disponible en ligne : https://www.conseil-etat.fr/publications-colloques/etudes/le-droit-de-preemption.

* 57 Article L. 141-1, I du code rural et de la pêche maritime.

* 58 Article L. 321-1 et s. du code de l'urbanisme.

* 59 Article L. 324-1 et s. du même code.

* 60 Article L. 321-29 du même code.

* 61 Voir notamment la cartographie des établissements publics fonciers de l'Etat (EPF) et les EPF locaux, janvier 2023.

* 62 Voir notamment les articles 3 et 22, III, 6° à 8° de la loi industrie verte (et les articles L. 321-1 et L. 324-1 du code de l'urbanisme dans leur nouvelle rédaction).

* 63 Extrait de la décision : « la question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors que les dispositions prévoyant un droit de préemption au profit des collectivités publiques dans les zones d'aménagement différé, qui touche aux conditions d'exercice du droit de propriété, trouvent leur justification dans la réalisation d'actions et d'opérations à des fins d'intérêt général, instituent des garanties suffisantes à la protection du droit de propriété et ne portent pas atteinte au principe d'égalité devant la loi ».

* 64 Extrait de la décision : « les dispositions de cet article L. 143-2 [du code rural et de la pêche maritime] n'ont pas pour objet et ne sauraient, sans porter aux conditions d'exercice du droit de propriété et à la liberté contractuelle une atteinte disproportionnée au regard de l'objet des missions de ces sociétés, permettre que l'exercice du droit de préemption qui leur est confié par les dispositions de l'article L. 143-1 soit mis en oeuvre pour des motifs qui ne se rattachent pas principalement à leur mission de favoriser l'installation, le maintien et la consolidation d'exploitations agricoles ou forestières afin que celles-ci atteignent une dimension économique viable au regard des critères du schéma directeur régional des exploitations agricoles, ainsi que l'amélioration de la répartition parcellaire des exploitations ; que, sous cette réserve, les dispositions de l'article L. 143-2 du code rural et de la pêche maritime sont conformes à la Constitution ; »

* 65 « 1. Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

2. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. »

* 66 Voir Décision précitée n° 2018-707 QPC - 25 mai 2018 « En subordonnant l'exercice de ce droit à la rétrocession, dans un délai de cinq ans, du bien préempté, le législateur a entendu garantir que ce droit ne soit utilisé que conformément à l'une des finalités d'intérêt général précitées », point 7.

* 67 Voir notamment l'article L. 213-11 du code de l'urbanisme.

* 68 Il s'agit entre autres, d'une limitation des recours avec l'encadrement de l'intérêt à agir des requérants (article L. 600-1-1 et suivants du code de l'urbanisme), de la possibilité de régulariser l'acte en cours d'instance (article L. 600-5 du code de l'urbanisme) ou de procéder à une régularisation totale de l'acte (article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme).

* 69 Il s'agit de recours malveillants, destinés à retarder la mise en chantier d'opérations de construction ou à s'opposer, par principe, au projet.

* 70 On peut citer à cet effet la suppression du degré d'appel (article R. 811-1-1 du code de justice administrative) pour les recours contre certaines autorisations d'urbanisme, dont notamment celle permettant de construire un bâtiment comportant plus de deux logements en zone tendue.

* 71 Voir par exemple : « Propositions pour un contentieux des autorisations d'urbanisme plus rapide et plus efficace », Christine Maugue, janvier 2018 ; « Construction et droit au recours : pour un meilleur équilibre », Daniel Labetoulle, avril 2013.

* 72 Décret n° 2023-822 du 25 août 2023 modifiant le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts.

* 73 L'article L. 600-3 du code de l'urbanisme est la traduction législative du principe jurisprudentiel selon lequel il y a urgence à suspendre une autorisation de construire, cette dernière étant directement exécutoire et les travaux difficilement réversibles (voir notamment Conseil d'Etat, 27 juillet 2001, 230231).

* 74 Conseil d'Etat, Rapport public de l'activité juridictionnelle et consultative des juridictions administratives en 2022.

* 75 Conseil d'Etat, 7 octobre 2016, Commune de Bordeaux, n° 395211.

* 76 Articles L. 600-1-1 à L. 600-1-4 du code de l'urbanisme.

* 77 Hypothèses retenues : Coût des études = 10 % du coût total du projet, Coût études + portage = 30% du coût du projet, Durée des travaux : 30 mois, Durée du portage financier : 6 mois, Durée totale du projet : 36 mois, Gain de temps sur la procédure contentieuse = 4 mois, Gain de la mesure (4x100/36) × 0,3 = 3,3%.

* 78 https://artificialisation.developpementdurable.gouv.fr/sites/artificialisation/files/fichiers/2022/06/Rapport%20V5.pdf.

* 79 Voir l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme.

* 80 https://www.cerema.fr/system/files/documents/2018/01/co18005314-zae-etude-cerema-1.pdf.

* 81 Article L. 302-1, III du code de la construction et de l'habitation.

* 82 Article L. 141-5-3 du code de l'énergie.

* 83 http://periurbain.cget.gouv.fr/content/LES-RICHESSES-PERIURBAINES-L%E2%80%99HONNEUR-VENISE.

* 84 https://www.atelier-territoires.logement.gouv.fr/IMG/pdf/adtperiurbain_bougerleslignes_dgaln_fevrier2019-5.pdf.

* 85 https://www.urbanisme-puca.gouv.fr/campagnes-urbaines-2019-2020-a1767.html.

* 86 Plan de transformation des zones commerciales.

* 87 https://aides-territoires.beta.gouv.fr/aides/?targeted_audiences=&perimeter=&text=p%C3%A9riurbain&action=search.

* 88 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2011/2011177QPC.htm.

* 89 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2020/2019830QPC.htm.

* 90 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2000/2000436DC.htm.

* 91 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2020/2019823QPC.htm.

* 92 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2012/2012242QPC.htm.

* 93 Cass. 3e civ., 13 oct. 2016, n° 15-23.674.

* 94 Cass. 3e civ., 12 juill. 2018, n° 17-21.081.

* 95 CE, 18 janv. 1974, Min. Aménag. terr. c/ Sté foncière Biarritz-Anglet, n° 88665.

* 96 CE 22 juin 1984, Comité de défense de la zone d'habitation individuelle de Neuilly-Plaisance.

* 97 CE 4 mars 1996, Cne de la Teste-de-Buch, n° 098475

* 98 Article 206 de la loi « Climat et résilience » ; article L. 302-1, III du code de la construction et de l'habitation.

* 99 Rapport d'information sur les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement et de l'accession à la propriété, commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale, juillet 2023.

* 100 Les logements sociaux sont identifiés par la nature du prêt ayant servi à les financer. Les logements financés au moyen d'un prêt locatif social (PLS) sont accessibles aux ménages qui ne peuvent pas se loger dans le parc privé mais dont les ressources sont supérieures aux plafonds applicables pour l'attribution de logements financés par un prêt locatif aidé d'insertion (PLAI) ou d'un prêt locatif à usage social (PLUS).

* 101Ibid.

* 102 Bulletin officiel des finances publiques, BAREME - RFPI - IR - Investissement immobilier locatif - Plafonds de loyer et de ressources pour l'année 2024.

* 103 Développement de l'offre de logement locatif intermédiaire par les investisseurs institutionnels, rapport IGF CGEDD, avril 2021.

* 104 Développement de l'offre de logement locatif intermédiaire par les investisseurs institutionnels, rapport IGF CGEDD, avril 2021.

* 105 Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.

* 106 https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/202403_Pacte_pour_%20le_logement_interme%CC%81diaire_0.pdf.

* 107 Loi n° 77-1 du 3 janvier 1977 Maintien des aides publiques à l'investissement malgré l'institution de l'aide personnalisée au logement.

* 108 Article L. 633-1 du CCH : établissement destiné au logement collectif à titre de résidence principale de personnes dans des immeubles comportant à la fois des locaux privatifs meublés ou non et des locaux communs affectés à la vie collective. Il accueille notamment des personnes âgées, des personnes handicapées, des jeunes travailleurs, des étudiants, des travailleurs migrants ou des personnes défavorisées.

* 109 Zone I, zone I bis, zone II et zone III définies par l'arrêté du 29 mars 1999 pris pour l'application de l'article 2 terdecies de l'annexe III au code général des impôts et relatif au classement des communes par zones ; zones A bis, A, B1, B2 et C applicables aux logements financés en PLS définies par l'arrêté du 1er août 2014 pris en application de l'article R. 304-1 du code de la construction et de l'habitation. Voir pour l'avis loyers applicable aux conventions APL signées en 2024 : https://www.financement-logement-social.logement.gouv.fr/avis-loyers-2024-r789.html.

* 110 Le rapprochement des loyers vers leur plafond : un phénomène tendanciel toujours en cours, ANCOLS, février 2023.

* 111 Ibid.

* 112 https://www.banquedesterritoires.fr/sites/default/files/2024-03/BDT_PERSPECTIVES_2023.pdf.

* 113 D'autres obligations de service public sont également imposées aux bailleurs sociaux dans le cadre du SIEG, en particulier : les obligations s'imposant à eux en matière de procédure d'attribution des logements sociaux à des ménages sous plafonds de ressources en application de l'article L.441-1 du CCH ; le prélèvement d'un supplément de loyer de solidarité, dont le montant est fixé par décret, auprès des locataires du parc social dont les ressources dépassent les plafonds de ressources requis pour l'attribution d'un logement social ; etc.

* 114 https://www.union-habitat.org/centre-de-ressources/economie-financement/l-etat-du-logement-dans-l-europe-en-2023.

* 115 Eclairages - Logement social et territoires, n°22, juillet-août 2020, Banque des territoires.

* 116 Voir note 1.

* 117 Notion introduite par le CCH, notamment au 27ème alinéa de l'article L422-2. Il s'agit de sociétés qui ne sont pas de durées limitées.

* 118 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32012D0021&from=ES.

* 119 (Métropolitiques, Grégoire Fauconnier, « Des HLM à durée déterminée ? Le succès de l'Usufruit locatif social », novembre 2020).

* 120 étude Astérès, septembre 2023, « L'Usufruit locatif social « employeur » : une piste pour surmonter les difficultés de logement ».

* 121 ANCOLS - Février 2024 - Note relative à l'obligation d'attribution de logements aux ménages DALO ou prioritaires du secteur de la participation des employeurs à l`effort de construction - Exercice 2022.

* 122 Enquête annuelle auprès d'Action logement services (ALS) et de l'Association foncière logement (AFL) publiée en mars 2024 par l'ANCOLS.

* 123 Statistiques du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/les-logements-sociaux-0?rubrique=52.

* 124 Source Infocente SNE, Nunique 2024.

* 125 Source RPLS 2022.

* 126 Source Infocente SNE, Nunique 2024.

* 127 Source Infocentre SNE, Nunique 2024.

* 128 Source Infocentre SNE, Nunique 2024.

* 129 Cela représente 106 SEM en 2022, pour environ 655000 logements.

* 130 Source : Cour des comptes, 2023, Assurer la cohérence de la politique du logement face à ses nouveaux défis.

* 131 Statistiques du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/les-logements-sociaux-0?rubrique=52.

* 132 Dans le détail, 29,5% des logements sociaux enquêtés sont exemptés du SLS car localisés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) ou une ex-zone urbaine sensible (ZUS) hors QPV, 5,1% le sont également car situés dans une zone de revitalisation rurale (ZRR), 3,7% le sont car couverts par un programme local de l'habitat (PLH) prévoyant l'exemption. Source : Bilan de l'enquête SLS, édition 2023, ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, DHUP.

* 133 Décret n° 58-1470 du 31 décembre 1958.

* 134 L'application du supplément de loyer de solidarité dans le parc social, ANCOLS, mars 2021.

* 135 Bilan de l'enquête SLS, édition 2022 ; ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, DHUP.

* 136 https://www.ancols.fr/publications/statistiques-etudes/application-du-sls-dans-le-parc-social.

* 137 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32012D0021&from=ES.

* 138 Rapport annuel de performance 2022 du programme 135 du budget de l'Etat.

* 139 Les chiffres de l'apprentissage en 2022, Des emplois pour les jeunes, Des compétences pour les entreprises, Ministère du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion, mars 2023.

* 140 Rapport public thématique de la Cour des Comptes sur la formation en alternance - juin 2022.

* 141 Arrêté du 18 décembre 2023 modifiant l'arrêté du 29 juillet 1987 relatif aux plafonds de ressources des bénéficiaires de la législation sur les habitations à loyer modéré et des nouvelles aides de l'Etat en secteur locatif.

* 142 Théma n° 11de la DGE sur les impacts économiques et la réglementation des meublés touristiques (juin 2023).

* 143 https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Avis/2011/2011_13_mobilite.pdf.

* 144 Arrêté du 7 décembre 2009 fixant le prix de location des meubles dans le parc social.

* 145 Loi n° 65-556 du 10 juillet 1965 relative à l'acquisition d'habitations à loyer modéré à usage locatif par ýles locataires : permet aux locataires de logements construits en application de la législation sur les habitations à loyer modéré d'acquérir le logement qu'ils occupent sous certaines conditions.

* 146 Loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 (dite « loi Méhaignerie ») ; loi n° 94-624 du 21 juillet 1994 ; loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 ; loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 (dite « loi MOLLE ») ; loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 (loi ALUR) ; loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 (dite « Egalité et citoyenneté ») ; loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique ; loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

* 147 Mission d'évaluation de la politique de vente de logements sociaux à leurs occupants et à d'autres personnes physiques, CGEDD, 2014. https://igedd.documentation.developpement-durable.gouv.fr/documents/Affaires-0008034/009083-01_rapport.pdf;jsessionid=37194CF74328AEB1BDA6DEDD5EE911A1.

* 148 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32012D0021&from=ES.

* 149 Eclairages n°27 - Un panorama de la vente de logements sociaux en Europe, La Banque des territoires, juillet 2022.

* 150 « Les organismes du logement social, chiffres clés 2021 », ministère chargé du logement. https://www.financement-logement-social.logement.gouv.fr/IMG/pdf/les-organismes-de-logement-social-chiffres-cles-2021_cle745c45.pdf.

* 151 Idem.

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